Le député Alexandre Leduc de Québec Solidaire a déposé mercredi un projet de loi à l’Assemblée nationale afin d’obliger les employeurs à élaborer une politique de déconnexion dans leur milieu de travail.

Le parti d’opposition estime que la pandémie de COVID-19 qui a obligé des centaines de milliers d’employés à travailler de la maison à temps plein rend plus nécessaire que jamais un cadre réglementaire sur le droit à la déconnexion.

« La pandémie a brouillé les frontières entre vie personnelle et travail, qui étaient déjà mises à mal par la présence grandissante de la technologie dans nos vies. En ce moment, une personne sur deux fait du télétravail au Québec, et le sentiment d’être constamment au boulot est plus présent que jamais chez les travailleurs. Or, la loi n’est pas équipée pour répondre à cette réalité. Le gouvernement ne peut pas dire d’un côté de la bouche vouloir favoriser la technologie et le travail, et de l’autre, ne pas encadrer le droit à la déconnexion. L’un ne doit pas aller sans l’autre », soutient Alexandre Leduc.

Le projet de loi 492 vise à obliger les employeurs à établir une politique de déconnexion en dehors des heures de travail applicable à l’ensemble de leurs salariés. Cette politique doit notamment déterminer les périodes durant lesquelles un salarié a le droit d’être coupé de toute communication relative à son emploi et prévoir un protocole d’utilisation des outils de communication en dehors des heures de travail.

Pour les employeurs de 100 salariés ou plus, la politique de déconnexion serait élaborée par un comité dont la moitié des membres représentent les salariés, alors que pour les employeurs de moins de 100 salariés, elle serait élaborée par l’employeur et devrait être approuvée par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST).

Non à un cadre trop rigide

L’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés du Québec a salué l’intention de Québec solidaire d’ouvrir la discussion sur le droit à la déconnexion, mais prévient que le cadre réglementaire instauré ne doit pas être trop rigide. « Il est impératif que la législation ne soit pas contraignante ou ne dicte pas ce qui est acceptable ou non », souligne l’ordre professionnel.

Selon la directrice générale de l’Ordre des CRHA, Manon Poirier, il appartient aux travailleurs et aux employeurs de convenir conjointement du mode de travail à adopter de façon à favoriser la flexibilité et la personnalisation. « Puisque les besoins diffèrent d’une organisation à l’autre et d’un travailleur à l’autre, il serait difficile d’instaurer un cadre unique pouvant s’appliquer à toutes les situations et aux préférences de chacun. La solution devra passer en grande partie par la sensibilisation et la flexibilité », dit-elle.

Selon un récent sondage réalisé par l’Ordre des CRHA, 46 % des professionnels RH estiment que le pourcentage des travailleurs en télétravail sera maintenu pour les prochains mois et 5 % mentionnent qu’il sera même augmenté. Sur le long terme, 79 % prévoient que leur organisation élargira leurs mesures de télétravail.

Québec solidaire se défend de vouloir imposer un cadre uniforme à toutes les entreprises. « Le but n’est pas d’imposer une règle mur à mur, mais de confier à chaque employeur la responsabilité d’élaborer sa propre politique de déconnexion en fonction des besoins et des contraintes, explique Alexandre Leduc. La première étape, c’est de reconnaître qu’un changement de culture est nécessaire dans nos milieux de travail. Les employeurs doivent se demander si le texto à 23h ou le courriel le dimanche matin est vraiment nécessaire. »