
Faire un pas de plus!
Les coûts croissants liés aux absences sont en tête de liste pour plusieurs organisations. Toutes recherchent le remède efficace. Et s’il s’agissait oser aller un peu plus loin?
Un des principaux défis des entreprises à l’heure actuelle est d’assurer une saine gestion des coûts tout en conciliant les enjeux des ressources humaines. Cependant, le contexte économique et social dans lequel les entreprises évoluent demeure complexe: bouleversements multiples du marché du travail qui a eu pour impact d’augmenter la charge de travail, pénurie de main-d’œuvre qualifiée jumelée à un vieillissement de la population, et ce, sans compter les besoins individuels divergents dont ceux de la nouvelle génération.
Force est de constater une augmentation des coûts liés à l’absentéisme et des défis que celui-ci représente. Signal d’alarme? Voici quelques constats qui nous portent à réfléchir :
- Le Canada a dépensé près de 130 milliards de dollars en soins de santé en 2004, soit une moyenne d’environ 3 500 $ par Canadien;
- Le stress lié à la conciliation travail-famille a des conséquences négatives pour les employeurs, tant en matière d’absentéisme que sur le plan de la baisse du rendement et du nombre de départs d’employés compétents;
- Les principaux motifs d’absences invoqués sont reliés à la famille, aux maladies personnelles, aux conditions de travail puis, à l’utilisation de la banque de congés;
- Les congés de maladie «mal gérés» sont souvent à la source d’un absentéisme élevé.
La face cachée de la problématique
La notion «d’absentéisme» ne réfère plus uniquement aux employés physiquement absents du travail, mais aussi à ceux présents qui ne travaillent pas à leur pleine capacité. Ce phénomène, encore peu connu, se nomme «présentéisme». Il se définit par une baisse de rendement, causée par des problèmes d’ordre personnel ou médical, qui se répète de façon soutenue.
Une étude sur le sujet démontre l’impact de certains problèmes de santé sur le nombre d’heures travaillées quotidiennement. Il appert qu’un individu affligé de dépression, d’anxiété, de stress, d’allergies, d’arthrite, de migraine, de diabète, de problèmes respiratoires ou cardiaques peut perdre entre deux et quatre heures par jour en nombre d’heures «non productives».
Des solutions statiques à une gestion dynamique
Il ne s’agit pas de tout rejeter du revers de la main puisque plusieurs pratiques ont connu du succès, notamment:
- L’adoption d’une politique en gestion de l’absentéisme;
- La création d’un tableau de données pour le suivi mensuel et annuel des absences;
- L’implantation d’un programme d’aide aux employés;
- La gestion de cas;
- La formation des gestionnaires:
- La présence d’un comité de prévention;
- La mise en œuvre de certaines options sur la conciliation travail-vie personnelle.
Toutefois, les solutions adoptées, toujours d’actualité, mais souvent offertes de façon isolée les unes des autres, ne donnent qu’une partie des retombées souhaitées. Pour dynamiser l’approche, un pas de plus s’impose.
Un bon point de départ vise à effectuer un bilan de l’état de la situation. Constitué en trois catégories, celui-ci se résume à ce que l’entreprise doit «continuer de faire» soit les pratiques qui ont démontré du succès par le passé, doit «arrêter de faire» se traduisant par les pratiques toxiques à laisser tomber et doit «commencer à faire» par l’intégration de nouvelles actions.
Contrer le présentéisme! Par où débuter?
L’adoption de pratiques novatrices, faisant partie d’un plan bien défini et mobilisant tous les secteurs de l’organisation, est un autre pas pour contrer le présentéisme, mais aussi pour améliorer la présence au travail et par le fait même, contrôler les coûts s’y rattachant. Plusieurs solutions peuvent être envisagées :
- Dépasser le concept de la gestion de l’absentéisme pour passer à celui de la gestion de la présence au travail. Cela se traduit par l’adoption d’un principe directeur qui vient en tête de liste de la planification stratégique de la gestion des ressources humaines. Le principe directeur, comprenant un cheminement détaillé, met dorénavant l’accent sur la gestion des capacités en plus de faire une plus grande place à la prévention;
- Communiquer, encore communiquer. La haute direction, par le biais du cadre supérieur responsable, doit communiquer sa stratégie aux différents secteurs et les rendre imputables à cet effet. Tenir responsable signifie fournir à chaque secteur tous les paramètres et le soutien en matière de présence au travail en plus d’inclure ce volet aux objectifs de rendement des gestionnaires;
- Favoriser l’adoption d’une culture qui supporte la gestion de la présence au travail. La situation actuelle ne pourra s’améliorer sans la sensibilisation et l’implication de toutes les parties concernées : la haute direction, les gestionnaires, le syndicat, les employés, les ressources humaines en plus du personnel du service de santé;
- En plus des tendances mensuelles et annuelles, évaluer la santé organisationnelle de l’entreprise. Un sondage de satisfaction des employés, un groupe de discussion ou encore, des questionnaires d’évaluation de la santé demeurent des alliés précieux pour prendre le pouls. Les résultats serviront à cibler les champs d’intervention et sur la base de ces faits, il sera plus aisé d’obtenir l’aval de la haute direction sur l’importance, et même l’urgence d’intervenir;
- Offrir de la formation ciblée à tous les gestionnaires pour les aider à détecter et à orienter les employés en détresse vers les bonnes ressources, puis les encadrer adéquatement lorsqu’ils reviennent au travail après une absence. Le rôle du superviseur est primordial et peut faire toute la différence à ce niveau;
- Une tendance émergente vise à offrir un programme d’aide destiné aux gestionnaires. Référence, encadrement, formation et «coaching» sont au nombre des services offerts par ce programme;
- Sensibiliser l’ensemble des employés. Assurer un rappel sur une base annuelle;
- Favoriser la mise en œuvre de certaines options de conciliation travail-vie personnelle. Un programme, visant à la fois la promotion de la santé et du mieux-être, la sensibilisation et l’amélioration de la qualité de vie au travail(ex.: souplesse des horaires, évaluation de la charge de travail, programme de reconnaissance, etc.), aura beaucoup d’impact. À cet effet, l’étude suivante le confirme: «Parmi les principales pratiques de conciliation travail-famille utilisées dans les organisations, la souplesse des horaires réduirait considérablement l’absentéisme, les retards et le stress, alors que le télétravail améliorerait le rendement et la rétention».
- Offrir du soutienaux employés par le biais du Programme d’aide aux employés(PAE). Un tel programme doit devenir un outil de choix et l’ajustement des services doit être fait en fonction des résultats et de l’évolution des objectifs. Un réseau de ressources de première ligne pour les cas de présentéisme pourrait aussi être créé au besoin;
- Adopter des indicateurs de mesure de la productivité en fonction de la nature des activités de l’organisation. Par exemples, le nombre de transactions financières effectuées, le taux de rétention et de satisfaction de la clientèle, etc. Ces indicateurs permettent d’effectuer un suivi en vue d’intervenir le plus rapidement possible sur les facteurs organisationnels déclencheurs du présentéisme.
Une approche gagnante
Investir les efforts nécessaires dans le développement d’une gestion intégrée de la présence au travail et du présentéisme est assurément une approche gagnante pour les employeurs. Bien aligné avec les besoins des employés et les impératifs d’affaires, le programme aura un impact direct sur le taux d’absentéisme et la productivité de l’entreprise, tout en aidant à attirer et conserver les bons candidats. Des employés en santé et satisfaits, qui évoluent dans un milieu de travail sain, contribuent de façon optimale au succès de l’organisation.
Sophie Dubé, MSc., CHRA,est conseillère principale Santé et mieux-être, services aux employeurs à la Standard Life. |
* Les notes bibliographiques sont disponibles sur demande.