Le 2octobre2007, le ministre fédéral des Finances, M. Jim Flaherty, a présenté un avant-projet de loi renfermant des dispositions relatives à la retraite progressive.

L’avant-projet de loi propose d’apporter des changements au Règlement de l’impôt sur le revenu (RIR) concernant les règles liées à la retraite progressive et à d’autres programmes de maintien en poste des travailleurs âgés. Ces règles permettent que des employés admissibles reçoivent, aux termes d’un régime de pension agréé (RPA) à prestations déterminées (PD), des rentes de raccordement seules ou jusqu’à 60% de leur rente accumulée tout en accumulant d’autres prestations de retraite.

Le dernier budget fédéral comprend une proposition qui vise à encourager les travailleurs plus âgés à rester sur le marché du travail en leur permettant de prendre une retraite progressive à compter de 2008. Actuellement, le Règlement de l’impôt sur le revenu interdit aux participants à un RPAPD de toucher des prestations de retraite tout en continuant à accumuler des services validables. Les modifications proposées permettront à un employé de toucher, sous réserve de certaines restrictions, des prestations de retraite d’un RPA PD dès l’âge de 60ans – ou de 55 ans s’il a droit à une rente non réduite.

Si les changements sont adoptés, ils permettront aux RPAPD d’offrir aux employés admissibles la possibilité d’obtenir jusqu’à 60% de leur rentePD accumulée, tout en continuant à accumuler des prestations de retraite additionnelles au titre du service courant à l’égard de l’emploi qu’ils continuent d’occuper après le début du versement de leur rente. Le plafond de 60% sera fondé sur le montant des prestations de retraite (y compris les rentes de raccordement) qui seraient versées par le régime si l’employé prenait une retraite complète.

Il ne sera pas exigé que la rente partielle soit fondée sur une réduction du temps de travail ou du salaire, ce qui est actuellement obligatoire aux termes des dispositions existantes en matière de retraite progressive en Alberta, au Manitoba et au Québec. De plus, il n’y aura pas de restrictions en ce qui a trait au moment ou à la fréquence selon laquelle le montant de la rente accumulée par un employé peut être recalculé de manière à tenir compte des services validables additionnels de l’employé et de ses gains annualisés accrus.

Le nouveau règlement fera également en sorte que l’interdiction du versement des seules rentes de raccordement (c.-à-d. sans le versement simultané d’une rente viagère) ne s’applique pas aux employés admissibles à la retraite progressive.

Des impacts pour le Québec
Les modifications proposées pallieront le principal inconvénient des dispositions actuelles en matière de retraite progressive en Alberta, au Manitoba et au Québec aux termes desquelles un participant est tenu de transférer une partie de ses prestations de retraite normale et d’en toucher la valeur en un versement forfaitaire, ce qui l’empêche de profiter de la valeur ajoutée offerte par les règles sur la retraite anticipée de nombreux régimes. Les modifications au Règlement permettront le versement d’une prestation mensuelle directement du RPAPD pendant la période de retraite progressive. À cet égard, les modifications sont semblables à celles proposées dans le budget de 2007 du gouvernement du Québec, mais elles sont plus souples que ces dernières, puisque le versement et l’accumulation de prestations peuvent s’effectuer simultanément, sans que le participant ait à réduire ses heures de travail.

Le mécanisme prévu dans le Règlement, qui permet à un participant d’accumuler des prestations déterminées complètes, même si celui-ci ne travaille pas à plein temps, ne s’appliquera pas pendant la période de retraite progressive. Par conséquent, si un participant réduit ses heures de travail et sa rémunération pendant la période de retraite progressive, les prestations accumulées doivent rendre compte de la juste part des heures de travail à temps plein du participant pendant la période en question.

Ces mesures ne s’appliqueront pas aux régimes désignés (régimes pour les employés à rémunération élevée ou les employés liés).

La proposition sur les règlements en matière de retraite progressive donne aux employeurs la possibilité de garder les travailleurs âgés qui disposent d’une expertise, de connaissances et de compétences très recherchées. Certaines organisations accordent déjà, de manière informelle, la retraite progressive à leurs employés: elles les autorisent souvent à prendre leur retraite, puis leur offre un contrat d’emploi à temps partiel. Même si le concept a bien fonctionné en théorie (il permettait aux employés de commencer à toucher des prestations de retraite tout en continuant à travailler dans l’organisation), le système n’est pas sans défaut: les personnes visées perdaient leur ancienneté et les avantages sociaux des participants actifs, la durée des contrats restait incertaine et l’employé ne pouvait pas continuer d’accumuler de rente additionnelle.

D’après M. Ian Markham, directeur de l’innovation en matière de retraite chez Watson Wyatt, «un système formel de retraite progressive est plus qu’une histoire d’argent – il doit offrir des rôles véritables, une formation et un perfectionnement continus et d’autres avantages non financiers intéressants aux personnes concernées.» L’avantage financier de toucher et d’accumuler simultanément des prestations de retraite peut suffire à inciter certains employés à rester actifs plus longtemps. D’autres peuvent être plus attirés par la possibilité d’être mentors, de se consacrer aux principaux aspects agréables de leur travail, de travailler sur des projets spéciaux, etc.

La retraite progressive sera un outil utile sur le plan de l’encouragement financier. Sans retraite progressive, un employé admissible à une retraite anticipée relativement généreuse pouvait– s’il tenait compte de la valeur des prestations de retraite qu’il ne pouvait pas accumuler– avoir l’impression de perdre de la valeur ou de travailler pour beaucoup moins que son salaire. Les mesures proposées, qui permettent à l’employé de continuer à accumuler une rente PD tout en recevant une part de la rente non réduite, limiteront cette probabilité de perte de revenu. Grâce à ce changement proposé, l’employé dans cette situation peut toucher jusqu’à 60% de sa rente anticipée tout en continuant à accumuler davantage.

Les employeurs devront envisager toutes les conséquences d’un programme de retraite progressive pour que ce dernier atteigne son objectif, à savoir encourager les employés à rester un peu plus longtemps, au lieu de les inciter à partir ou à réduire leurs heures de travail plus tôt que prévu. En attendant que les lois sur les normes applicables aux régimes de retraite soient modifiées pour tenir compte de la retraite progressive, il n’est pas sûr si cette dernière pourra s’appliquer de façon sélective ou si elle devra être mise à la disposition de l’ensemble des participants.