L’engouement envers les investissements responsables semble bien réel au Canada. Près de 250 personnes ont en effet assisté au Congrès canadien sur l’investissement responsable qui se tenait à Montréal du 27 au 29 mai dernier.
Présentement, les investissements responsables représentent 4,4 milliards en actifs $ au Canada. Le nombre de fonds ne cesse d’augmenter et l’intérêt des investisseurs, dont quelques caisses de retraite importantes, est en hausse particulièrement depuis deux ans.
Selon François Meloche, analyste au Groupe investissement responsable(GIR), 10 des 40 plus importantes caisses de retraite québécoises possèdent une politique de la sorte dans leur stratégie d’investissement. Il reste néanmoins beaucoup de travail à faire selon lui pour convaincre la majorité des quelque 1 400 caisses de retraite au Québec de posséder une telle politique.
« Seulement une quinzaine de fonds de placements éthiques sont disponibles pour les investisseurs québécois, dit-il. Le manque d’analyses comparatives sur le sujet afin d’aider les investisseurs à faire les bons choix constitue sans doute la raison principale qui explique pourquoi plusieurs grandes caisses de retraite hésitent encore à aller de l’avant avec une telle politique. »
Tim Smith, président chez Social Investment Forum, a affirmé que nous sommes maintenant entrés dans une nouvelle ère et que l’importance d’une saine gouvernance a changé la donne au cours des dernières années.
« Les entreprises deviennent de plus en plus proactives lorsque vient le temps de choisir où elles veulent investir, a-t-il dit. Grâce aux nombreux moyens technologiques maintenant disponibles, il devient de plus en plus facile d’avoir accès à des informations précises sur les sociétés dans lesquelles on désire investir. »
Joe Keefe, PDG chez Pax World Funds, a quant à lui, parlé de la transition dans laquelle nous nous trouvons présentement, passant des investissements éthiques aux investissements en gestion durable.
Par le passé, les investissements éthiques avaient une perception négative, selon lui.
« Plusieurs croyaient à tort que ce type d’investissement sacrifiait automatiquement la performance », a-t-il déploré.
« Aujourd’hui, ils sont plus sophistiqués, a-t-il ajouté. Les stratégies d’investissements socialement responsables visent tout autant des performances à long terme que les autres types d’investissement. Les sociétés qui s’y intéressent ne veulent pas uniquement être associées aux valeurs morales de ces fonds. EIles cherchent également un maximum de résultats et de performance », a-t-il insisté.
Michael Jantzi, président chez Jantzi Research Inc. a aussi confirmé avoir perçu un virage à 180 degrés concernant l’intérêt des investissements responsables au Canada depuis deux ans.
« De façon générale, les Canadiens, en tant qu’individu et en tant que société, sont plus préoccupés par l’environnement et les droits humains. Il n’est donc pas surprenant de voir un vif intérêt dans ce genre d’investissement », a-t-il dit.
Debra Sisti, vice-présidente chez ISS Canada Corp. est d’accord. Elle a aussi souligné le fait que les investisseurs canadiens, qu’ils soient institutionnels ou non, évaluaient de plus en plus les sociétés en fonction des critères environnementales, sociales et de saine gouvernance(ESG). « Les investisseurs canadiens veulent connaître à fond dans quel genre de société ils vont investir afin d’éviter les mauvaises décisions et les scandales », a-t-elle déclaré.
Dermot Foley, vice-président, Analyse stratégique chez Inhance Investment Management, estime d’ailleurs que les principes d’investissement responsable mis de l’avant par l’ONU ont eu un impact favorable sur l’intérêt de ce type d’investissement.
« Cela a aussi un impact favorable sur les façons de faire des gouvernements. Toutefois, il nous faut résoudre un problème d’éducation sur le sujet, croit-il. Il reste encore bon nombre de fausses croyances et de perceptions trompeuses dans le marché quant aux rendements des investissements socialement responsables notamment. »
M. Foley a aussi expliqué que la définition des critères de sélection des compagnies quant à leur responsabilité sociale peut varier passablement d’un investisseur à un autre. « Pour plusieurs investisseurs, elle ne porte pas uniquement sur l’historique d’une société, mais également sur son désir de s’améliorer ou encore d’établir des objectifs précis et de se fixer des moyens concrets pour les atteindre, a-t-il rapporté.
« Ces objectifs peuvent porter sur l’efficacité énergétique, la gestion des matières résiduelles, la réduction des gaz à effet de serre, ou encore le développement durable. Fait important, il s’agit d’un processus en continu auquel les investisseurs tout comme les entreprises dans lesquelles ils investissent doivent se plier rigoureusement pour obtenir des résultats probants », a-t-il prévenu.