« Si l’ensemble des fonds collectifs étaient couverts par le fonds d’indemnisation, à combien devrait s’élever la protection maximale ? Un million de dollars comme dans le cas du fonds d’indemnisation des courtiers, ou 100 000 $ comme dans le cas de l’assurance dépôt ? »
Telles sont les questions que se pose René Delsanne, actuaire et professeur de mathématiques à l’Université du Québec à Montréal. M. Delsanne préside le comité de placement de la caisse de retraite de son université et siège comme membre à deux comités d’examen indépendants (CEI) de fonds communs de placement : les Fonds Férique de la Corporation des ingénieurs du Québec et les fonds iShares canadiens.
Membre de la Coalition pour la protection des investisseurs et chargé du projet de fonds d’indemnisation, le professeur Delsanne siège également auprès de plusieurs autres caisses de retraite canadiennes et a présidé l’Institut canadien de la retraite et des avantages sociaux en 1996-1997. Il n’est pas que théoricien, car il a déjà géré des portefeuilles chez Natcan. Il croit qu’une « étude approfondit sera requise pour préciser quels seraient les montants couverts ».
Le cas des caisses de retraite
L’ensemble des fonds communs, fonds d’éducation et fonds distincts ne soulève guère de problème, car leur taille et la dispersion de leurs clients-investisseurs se prêtent bien à un tel fonds. Le Québec compte près de 1500 caisses de retraite, dont environ 50 ont plus de 100 millions de dollars (certains allant jusqu’à plus de 25 milliards de dollars avec des investissements répartis à travers le monde). La majorité ont moins de 100 millions de dollars.
Le fonds d’indemnisation en risque fiduciaire (fraude et négligence) ne serait pas responsable des cas de faillite de caisses ou des situations où l’employeur ne veut ou peut plus honorer ses contributions. Un tel fonds existe en Ontario et a causé beaucoup d’aléa moral en incitant parfois les entreprises à se « débarrasser » de leurs responsabilités en « refilant le bébé » aux contribuables.
C’est ce qu’on appelle le risque de crédit qui découle de circonstances bien différentes des fraudes. Mais la faiblesse de certaines sociétés, comme le cas de Mine Jeffrey l’illustre bien, peut inciter des entreprises à prendre plus de risques d’investissement et à devenir coupables de négligence fiduciaire.
Le cas des papiers commerciaux adossés à des actifs (PCAA) achetés par des sociétés de gestion a également mis certaines caisses de retraite québécoises déjà en liquidation en état de cessation de paiements puisque, faute de liquidités (leurs actifs en PCAA ne sont pas monnayables sur la place), elles n’ont pu distribuer les montants de rente prévus. Par contre, une société de gestion montréalaise ayant fait preuve de négligence dans la sélection de titres obligataires devra payer plusieurs millions de dollars pour rembourser une partie importante des pertes encourues par cet investissement qui s’est fait en dehors des conditions de mandat.
Ce litige se serait réglé bien plus rapidement si un Fonds d’indemnisation avait pris en main les négociations et davantage en faveur des régimes de retraite victimes.
Quelle couverture assurer ?
« Nous pourrions croire que le montant initialement investi dans un fonds de victimes d’une fraude serait le montant couvert. Les revenus de placement, réels ou présumés, ne devraient pas être couverts, sauf par l’entremise d’un nouvel investissement. »
– « Si nous devions fixer un montant maximum de couverture (1 000 000 $, par exemple), la garantie contre la fraude serait valable pour un particulier, mais le serait-elle pour un investisseur institutionnel comme une caisse de retraite ou une fondation qui ont des dizaines de millions en jeu ?
– Si cette couverture n’est pas satisfaisante, un montant plus élevé deviendrait-il prohibitif ? L’ancien ministre Claude Castonguay croit que dans le cas des plus grandes institutions, un mécanismes de ré-assurance pourrait contribuer à réduire le risque total pris en charge par le fonds.
– Le montant maximum s’applique-t-il par fonds d’investissement ou par gestionnaire ?
– Comment effectuer la transition entre le système actuel sans couverture et le nouveau système avec Fonds d’indemnisation ?
De nombreuses corporations professionnelles, dont la Chambre des notaires et le Barreau du Québec ont leur propre fonds d’indemnisation contre la fraude et la négligence fiduciaire de leurs membres. Certains affirment que le pallier de couverture serait beaucoup plus élevé que ces fonds de garantie ou l’assurance dépôt. Mais il ne faut pas oublier que plusieurs banques offrent une couverture allant jusqu’à 400 000 $ (4 X 100 000 $) par un jeu d’incorporations. C’est plus que l’avoir moyen des victimes de Norbourg.
Quel est votre point de vue ? Quel montant le fonds devrait-il assurer ? Les caisses de retraite devraient-elles avoir un régime particulier ?
La Coalition pour la protection des investisseurs et Les Éditions Rogers ltée vous invitent à vous prononcer à ce sujet en écrivant à :
Alexandre Daudelin
rédacteur en chef
Revue Avantages
Sites officiels :
– Coalition pour la protection des investisseurs
– Visionner la présentation de la Coalition pour la protection des investisseurs le 6 février 2007 devant la Commission des finances publiques, à l’Assemblée nationale (88 min)
Robert Pouliot est coordonnateur de FidRisk, membre de la Coalition pour la protection des investisseurs et chargé de cours à l’École des sciences de gestion de l’UQAM.