« Plusieurs pays ont examiné la possibilité de créer des fonds d’indemnisation depuis 2000. L’Australie et la Jamaïque en sont deux qui ont rejeté le principe. Mais était-ce pour les bonnes raisons ? »

On répète à qui mieux mieux que les investisseurs doivent prendre leur responsabilités en choisissant à qui ils confient leur argent. Mais en ont-ils seulement les moyens ? Un marché efficient et équitable en est un où acheteurs et vendeurs disposent à peu près de la même information. Mais les investisseurs, petits et grands, ont-ils le temps et les ressources pour déterminer si les gestionnaires ou les conseillers ont réellement les moyens pour remplir leurs devoirs de loyauté ?

La réponse nous apparaît clairement lorsqu’on pense au fait que tant d’investisseurs institutionnels (caisses de retraite, fondations, trésoriers d’entreprises, responsables de compagnies d’assurance), pourtant bien au fait du marché de capitaux, ont été victimes de la dernière crise financière. Si même les investisseurs dits « qualifiés » ou « accrédités » n’ont vu venir la débâcle, qu’en est-il des investisseurs moins qualifiés et moins nantis ?

L’insuffisance des assureurs

Lorsque le Trésor australien mena en 2002-2003 une étude intitulée Compensation for Loss in the Financial Services Sector sur la nécessité de revoir les accords de compensation des investisseurs, à la suite des pertes de 60 millions de dollars subies par 270 000 investisseurs, il y avait une crise chez les assureurs qui se disaient incapables de fournir la pleine protection d’assurance responsabilité professionnelle requise par les gestionnaires, petits et grands, du pays. Tout comme au Canada et aux États-Unis, toute la structure de protection des investisseurs-consommateurs reposait sur un système d’assurance privée d’indemnité professionnelle.

L’Australie s’y est tenue, tout comme la Jamaïque d’ailleurs, dans le cadre d’une étude sur les mécanismes de compensation réalisée par Robert Hobart, l’ancien président du programme d’assurance-dépôt des banques d’épargne de la Colombie-Britannique (Compensation Fund Plans for the Jamaican Financial Sector : Options for Consideration). Le hic, c’est que la dernière crise a mis en lumière l’incapacité de ces programmes d’assurance à protéger non pas le capital des investisseurs, mais des pratiques fiduciaires susceptibles de mettre ce capital en péril. En effet, la volatilité sans cesse accrue des marchés transforme le type d’incidents non plus en simples risques opérationnels mais en catastrophes majeures à caractère aléatoire, même pour le monde de l’assurance. Et le cas des difficultés financières de Manuvie en est un bon exemple.

Repenser les paradigmes de l’assurance
C’est d’ailleurs ce qui fait dire aujourd’hui à Gail Pearson, professeur en droit des affaires à L’école des sciences de gestion de l’Université de Sydney, que les arrangements privés d’assurance ne suffisent plus et qu’il faut imaginer une approche plus collective.

Yves Séguin, membre de la Coalition, affirme d’ailleurs que son ministère des Finances avait déposé en 2004 un projet élargi de fonds d’indemnisation qui s’appliquait non seulement à l’industrie des fonds collectifs, mais aussi à l’industrie de l’assurance. Toutefois, ce projet fut abandonné par le gouvernement provincial.

De nombreuses corporations professionnelles, dont la Chambre des notaires et le Barreau du Québec, ont leur propre fonds d’indemnisation contre la fraude et la négligence fiduciaire de leurs membres. Certains affirment que le pallier de couverture serait beaucoup plus élevé que ces fonds de garantie ou l’assurance dépôt. Mais il ne faut pas oublier que plusieurs banques offrent une couverture allant jusqu’à 400 000 $ (4 X 100 000 $) par jeu d’incorporations (le plafond d’assurance-dépôt est de 100 000 $). C’est plus que l’avoir moyen des victimes de Norbourg !

Si on se prémunie contre la fraude au niveau des services, pourquoi hésiterions-nous à le faire chez les manufacturiers ou gestionnaires de fonds ? Pourrait-on se prémunir de manière d’autant plus efficace que la base des participants sera large car la source du risque fiduciaire est la galaxie du gestionnaire et non pas le participant lui-même, contrairement à l’assurance classique ?

La Coalition pour la protection des investisseurs et Les Éditions Rogers ltée vous invitent à vous prononcer à ce sujet en écrivant à :

Alexandre Daudelin
Rédacteur en chef
Avantages

Sites officiels :

 Coalition pour la protection des investisseurs
 Visionner la présentation de la Coalition pour la protection des investisseurs le 6 février 2007 devant la Commission des finances publiques, à l’Assemblée nationale (88 min.)

Robert Pouliot est coordonnateur de FidRisk, membre de la Coalition pour la protection des investisseurs et chargé de cours à l’École des sciences de gestion de l’UQAM.