Pour certaines entreprises, le télétravail et les modèles hybrides persistent plus de cinq ans après le début de la pandémie de COVID-19, offrant aux employés la flexibilité à laquelle ils se sont habitués. 

Dans d’autres domaines, de plus en plus d’employeurs demandent à leurs salariés de retourner au bureau. Ce changement est une bonne nouvelle pour le secteur de l’immobilier de bureaux au Canada, après des années de hausse du taux de vacance.

Les sociétés immobilières commerciales affirment que le retour au bureau devrait s’accélérer au cours de la prochaine année, les propriétaires s’adaptant pour répondre aux besoins changeants des locataires et de leurs employés.

« Les grandes entreprises souhaitent de plus en plus que leurs employés retournent au bureau pendant une période significative », que ce soit trois ou cinq jours par semaine de travail en présentiel, rapporte Mark Fieder, président d’Avison Young Canada.

« Cela se traduit indéniablement par une forte demande, ou ce que nous appelons l’absorption d’espaces de bureaux. L’activité est si intense en ce moment qu’il est difficile de la mesurer », ajoute-t-il.

Le dernier rapport d’Avison Young sur le marché canadien des bureaux indique que le taux de disponibilité total à l’échelle du pays était de 18,7 % au troisième trimestre, comparativement à 19,6 % au même trimestre l’an dernier.

M. Fieder a souligné un autre facteur clé dans certains secteurs où le retour au bureau est devenu obligatoire. Il a cité l’exemple des grandes banques concentrées au centre-ville de Toronto, qui ont augmenté leurs effectifs au cours des cinq dernières années.

Avec des équipes plus importantes qu’avant l’essor du télétravail, la recherche d’espaces supplémentaires pour accueillir tout le monde est devenue une véritable course.

« Avant la pandémie, ces entreprises n’avaient pas de places disponibles pour autant de personnes, et maintenant, elles doivent s’adapter. La demande rattrape son retard », a-t-il déclaré.

En Ontario, l’emploi dans les secteurs d’activité utilisant des bureaux a progressé d’environ un quart depuis février 2020, selon les données de Statistique Canada. Cette donnée est suivie de près par la firme immobilière commerciale CBRE, qui note que 2025 a été l’année la plus dynamique pour l’absorption d’espaces de bureaux à Toronto depuis le début de la pandémie, et que d’autres grandes villes canadiennes affichent des tendances similaires.

Les taux d’inoccupation ont diminué davantage pour les immeubles de la plus haute qualité dans les grandes villes. Au troisième trimestre, les 12 meilleurs immeubles du centre-ville de Toronto affichaient un taux d’inoccupation inférieur à 2 %, tandis que le marché de la sous-location a connu une forte contraction.

« Les entreprises savent que louer les meilleurs espaces facilite le retour de leurs employés au bureau », a affirmé M. Fieder.

Proposer des espaces neufs ou rénovés ne suffit cependant pas, selon Brendan Sullivan, vice-président principal de la location de bureaux chez CBRE.

Il a expliqué que les entreprises privilégient l’expérience du retour au bureau pour inciter leurs employés à revenir travailler dans un espace centralisé. Cela signifie offrir aux locataires des avantages, tels que des services au sein de l’immeuble — centres de remise en forme, salons ou restauration — tout en garantissant l’accessibilité aux transports en commun.

« Il est essentiel d’offrir une expérience personnalisée à l’occupant, au locataire, afin de répondre aux besoins des employés de l’entreprise », a déclaré M. Sullivan, qualifiant ce phénomène de « changement générationnel dans la façon dont les entreprises et les particuliers utilisent les immeubles de bureaux ».

« Il ne suffit pas de dire aux gens de venir au bureau ; il faut leur en donner la raison. »

M. Sullivan a indiqué que de nombreuses entreprises ont adopté une attitude attentiste au début de 2025, notamment en raison des défis géopolitiques et d’autres sources d’incertitude économique, ce qui a entraîné un ralentissement de l’activité immobilière commerciale au premier semestre.

« Un signe encourageant pour 2026 »

Depuis, CBRE a enregistré certaines de ses plus importantes transactions des cinq dernières années au cours du second semestre, et prévoit que cette dynamique se poursuivra jusqu’en 2026.

Selon Scott Figler, directeur de la recherche chez JLL, une autre raison de cette forte demande est que les entreprises anticipent leur croissance future pendant que des espaces sont encore disponibles.

Il a précisé que seules quelques constructions neuves sont en cours au Canada, comparativement à l’afflux d’espaces neufs mis sur le marché après la pandémie.

Alors que ces cinq dernières années, les entreprises avaient tendance à baser leurs décisions concernant leurs besoins en espaces de bureaux sur la répartition de leurs employés (télétravail, hybride et présentiel), elles planifient désormais en fonction de leurs effectifs prévus dans dix ans.

« Elles constatent que le taux de vacance va diminuer, et je pense qu’elles se disent : “Si nous voulons obtenir le meilleur prix possible, il faut agir maintenant, car ces bonnes affaires ne dureront pas” », a expliqué M. Figler.

Avec peu de nouveaux projets de bureaux prévus, la demande pourrait se déplacer vers les espaces plus anciens dès le début de l’année prochaine. Les entreprises d’autres secteurs en croissance, comme la technologie, devraient être le moteur de cette demande soutenue.

« Il n’y a pratiquement plus de constructions neuves. Par conséquent, pour se développer, il faut investir dans des espaces de seconde génération déjà existants », a déclaré M. Figler.

M. Sullivan a indiqué que CBRE prévoit que 2026 sera une « année de reprise » pour son secteur des bureaux, notamment pour des marchés comme Montréal, Vancouver et Calgary.

« Les entreprises commencent à comprendre que le passage à quatre ou cinq jours par semaine au bureau nécessite davantage d’espace », a-t-il affirmé.

« Cette année, nous avons constaté une forte croissance du secteur bancaire dans le marché des bureaux, soutenue par la technologie et les services professionnels. Nous observons une demande croissante d’espaces de bureaux sur l’ensemble de nos marchés par rapport au début de l’année. Je pense donc que c’est un signe encourageant pour 2026. »

Malgré le retour progressif au travail en présentiel, de nombreuses entreprises reconnaissent que le télétravail est là pour durer, sous une forme ou une autre, convient M. Figler.

Il croit qu’il est peu probable que les normes de 2019 reviennent pleinement à court terme à cause des inquiétudes économiques persistantes.

« Je ne pense pas que le modèle hybride soit définitivement abandonné. Nous évoluons également dans un contexte économique où les entreprises cherchent à maîtriser leurs dépenses. Il y a clairement une volonté de faire revenir davantage de personnes au bureau. C’est indéniable et plus marqué dans certains secteurs, comme celui de la finance, mais je ne pense pas que les entreprises reviendront au télétravail à 100 % de sitôt. »