L’inflation totale selon l’IPC aux États-Unis atteindra 6 % au cours des six prochains mois, ce qui forcera la Réserve fédérale américaine à accroître les taux d’intérêt d’au moins 200 points de base, selon un nouveau rapport de Marchés mondiaux CIBC.

Le rapport souligne également que l’économie américaine n’a pas enregistré un tel taux d’inflation depuis les années 1990 et que cette situation n’avait duré que quatre mois. « La dernière période prolongée pendant laquelle l’inflation a progressé à un rythme aussi élevé aux États-Unis remonte à 1982, au beau milieu de la période de stagflation ayant suivi le deuxième choc pétrolier de l’OPEP », a déclaré Jeff Rubin, économiste en chef à Marchés mondiaux CIBC.

M. Rubin a également indiqué que la flambée des prix de l’énergie suscite une fois de plus des inquiétudes quant à l’inflation, mais que le niveau actuel des prix renforce la position de négociation de nombreux travailleurs américains. « En raison de l’envolée des prix de l’énergie, la courbe des coûts se renverse rapidement à l’échelle mondiale. Les coûts d’expédition ayant monté en flèche du fait que le prix du baril de pétrole se maintient au-delà de 100 $, la capacité concurrentielle de la Chine, qui était auparavant la menace absolue sur l’échiquier mondial, perd de la vigueur de jour en jour. Mais, tandis que les prix élevés de l’énergie protègent les travailleurs américains en raison des frais de transport élevés, ils vident également leurs poches quand ceux-ci doivent faire le plein. »

Ces facteurs pourraient vraisemblablement ramener les indemnités de vie chère au nombre des points à l’ordre du jour dans les négociations salariales en Amérique du Nord, surtout dans les secteurs où les syndicats sont bien présents, comme celui de la sidérurgie, où les frais de transport équivalent maintenant à une protection tarifaire à deux chiffres. M. Rubin a souligné que les prix élevés de l’énergie redonnent aux travailleurs nord-américains du secteur manufacturier un pouvoir de négociation qui leur faisait défaut depuis plus de dix ans, en plus de les inciter à demander des hausses salariales justifiées par l’augmentation des prix de l’essence.

« Dans les années 1980, des indemnités de vie chère étaient intégrées à l’échelle de rémunération de la plupart des conventions collectives, a précisé M. Rubin. Ces clauses d’indemnité sont, dans une large mesure, devenues des visions autoproductrices; elles ont fait en sorte que l’inflation, essentiellement due aux prix du pétrole, devienne "autosuffisante" par une spirale prix-rémunération. »

Avec l’évolution des taux de salaire et sa prise en compte dans des clauses d’inflation, M. Rubin s’attend à ce que les taux d’intérêt augmentent également. Dans son rapport, il signale qu’en 1990, le taux d’inflation atteignait 6 % et le rendement des fonds de la Réserve fédérale avoisinait 7,5 %, soit plus de trois fois leur niveau actuel. Au même moment, une obligation du Trésor à échéance de 10 ans portait intérêt à 8,5 %, c’est-à-dire plus du double de ce qu’elle rapporte aujourd’hui.

« Nous nous attendons à ce que la Réserve fédérale hausse ses tauxd’intérêt d’au moins 200 points de base d’ici la fin de l’année prochaine, a ajouté M. Rubin. Si l’on se fie au passé, nous pourrons nous estimer très chanceux si c’est tout ce que la Réserve fédérale doit faire. »