Les dépenses provinciales en santé augmentent à un rythme supérieur à celui des recettes publiques et on prévoit que six des dix provinces consacreront plus de 50 % de leurs revenus disponibles aux soins de santé d’ici 2036, selon une nouvelle étude publiée aujourd’hui par l’Institut Fraser, un organisme de recherche indépendant.

Le Nouveau-Brunswick et le Manitoba subiront la plus grande pression financière, puisqu’on prévoit que la première province consacrera 50 % de ses recettes pour les soins de santé d’ici 11 ans alors que la deuxième atteindra ce seuil d’ici 12 ans.

Terre-Neuve-et-Labrador atteindra le seuil de 50 % d’ici 17 ans, suivie par la Nouvelle-Écosse (19 ans), la Saskatchewan (25 ans), l’Ontario (28 ans) et la Colombie-Britannique (31 ans).

L’étude intitulée Paying More, Getting Less: 2008 Report montre qu’il faudra 86 ans au Québec pour atteindre le seuil de 50 % des revenus consacrés à la santé. L’Alberta est la seule province où les recettes totales ont augmenté à un rythme semblable à celui des dépenses en santé dans les dix dernières années.

« Lors des dix dernières années, les dépenses en santé de neuf des dix provinces ont augmenté à un rythme non viable. À moins que les gouvernements trouvent une meilleure façon de financer les soins de santé, les provinces devront probablement recourir à des hausses d’impôts, à un plus grand rationnement des biens et services médicaux ou à des réductions de dépenses difficiles dans d’autres secteurs importants », a affirmé Brett Skinner, directeur de la recherche sur les politiques en matière de santé, de médicaments et d’assurances à l’Institut Fraser et auteur principal de l’étude.

L’étude, qui a fait l’objet d’une révision par des pairs, se fonde sur des données de Statistique Canada des dix dernières années afin de prédire les tendances de croissance des dépenses publiques en santé par rapport aux recettes totales. Les tendances sont obtenues à partir des taux de croissance annuelle moyens pour les dépenses provinciales totales en santé et les recettes publiques disponibles de toutes les sources lors de la période de dix ans la plus récente.

M. Skinner note que bien que certaines provinces aient bénéficié d’une croissance de leurs recettes grâce à la hausse des prix de l’énergie, notamment l’Alberta, la Colombie-Britannique, la Saskatchewan, Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse, cette tendance pourrait ne pas se poursuivre et on ne peut pas s’y fier pour compenser la croissance des dépenses en santé. De plus, certaines provinces sont fortement dépendantes des transferts fédéraux pour une grande partie de leurs recettes. La croissance des dépenses en santé du Manitoba, du Nouveau-Brunswick, de Terre-Neuve-et-Labrador, de la Nouvelle-Écosse et de l’Île-du-Prince-Édouard est subventionnée par les transferts fédéraux dans une bien plus grande proportion que dans les autres provinces.

Dans les provinces ne possédant pas d’importantes ressources énergétiques, les recettes ont crû grâce à des impôts plus élevés. M. Skinner mentionne la « prime santé » de l’Ontario, un impôt sur le revenu supplémentaire établi en 2004, comme exemple d’un gouvernement provincial qui tente de trouver de nouvelles sources de revenus pour compenser la hausse des coûts de la santé.

« Le fardeau fiscal ne peut continuer d’augmenter à long terme à moins que les gens soient prêts à accepter un déclin de la croissance économique et un niveau de vie moins élevé. Il est futile de tenter de financer des hausses de recettes à long terme grâce à des impôts plus élevés ».

L’étude conclut que l’actuel système public d’assurance maladie au Canada n’est pas financièrement viable si on a uniquement recours à des fonds publics et propose plusieurs réformes :

* encourager l’usage efficace des soins de santé en demandant aux patients d’effectuer un co-paiement chaque fois qu’ils ont besoin d’un bien ou d’un service médical financé par le secteur public;

* enlever une partie de la pression financière reposant sur le système public d’assurance maladie en accordant le droit aux patients de payer de façon privée (de sa poche ou grâce à des assurances privées) pour tous les types de biens et services médicaux, y compris les services hospitaliers et les consultations auprès de médecins, tel qu’on le permet déjà pour l’accès aux médicaments sur ordonnance;

* permettre aux fournisseurs de soins de recevoir un remboursement pour leurs services de n’importe quel assureur, qu’il soit public ou privé;