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En commission parlementaire, les représentants des entreprises et des patrons ont demandé des dérogations au projet de loi 19 sur le travail des enfants, qui vise notamment à instaurer un âge minimal pour travailler au Québec.

Les employeurs réclament davantage d’exceptions afin de permettre l’embauche d’enfants de moins de quatorze ans, ce que décrient les syndicats et les associations de jeunes.

Dans le cadre de l’étude du projet de loi 19 sur le travail des enfants, les représentants des entreprises et des patrons ont demandé des dérogations et davantage d’exceptions au ministre du Travail, Jean Boulet.

Le projet de loi prévoit pour la première fois au Québec un âge minimal pour travailler, fixé à quatorze ans. Cela reflète le consensus du Comité consultatif du travail et de la main-d’oeuvre (CCTM), réunissant des syndicats ainsi que des associations d’entreprises et patronales, dont la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) et le Conseil du patronat du Québec (CPQ).

Ces organisations demandent désormais des dérogations et plus d’exceptions : elles souhaitent pouvoir embaucher des enfants de moins de quatorze ans dans des entreprises familiales de toutes tailles, ou encore pour garder au travail les enfants qui ont déjà des emplois.

Le ministre Boulet dit y voir « une tentative de faire indirectement ce qu’on ne peut pas faire directement ».

À l’heure actuelle, certaines exceptions à l’âge minimal sont déjà prévues dans le projet de loi 19, notamment pour une entreprise familiale de moins de dix salarié?es, si les parents de l’enfant qui travaille en sont les propriétaires.

Par le biais d’un communiqué, le Conseil du patronat et la FCCQ ont fait savoir que cette exception ne devrait pas se limiter aux compagnies qui comptent moins de 10 employés, puisque plusieurs entreprises familiales font appel à de nombreux travailleurs temporaires, notamment dans le secteur agricole.

« Il ne devrait pas y avoir de chiffre [limite] », affirme en entrevue Charles Milliard, président de la Fédération des chambres de commerce. Il propose que la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) puisse émettre d’autres dérogations. « C’est pour que tous les employeurs éligibles puissent avoir cette main-d’oeuvre-là. »

Ces propositions sont également mises de l’avant par la Fédération des entreprises indépendantes. La FCEI a par ailleurs proposé une dérogation à l’âge minimal pour les 90 000 enfants de moins de quatorze ans qui sont actuellement sur le marché du travail et qui cesseront de travailler si le projet de loi est adopté.

« On est très surpris », signale Éric Gingras, président de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) qui a participé aux consultations préalables du CCTM. Il rappelle que les exceptions ne devraient pas permettre à des employeurs de contrevenir à l’esprit de la loi en embauchant des enfants de moins de quatorze ans dans de grandes entreprises, qu’elles soient de type familial ou non. « Notre souhait, c’est que le ministre s’appuie sur le consensus [du CCTM]. »

« Le manque de balises claires peut avoir des répercussions graves dans la vie des jeunes et avoir des conséquences notables sur l’ensemble de leur trajectoire professionnelle » en nuisant aux études des plus jeunes, prévient par ailleurs Simon Telles, président de Force Jeunesse, par le biais d’un communiqué. L’organisme qui fait valoir les droits des jeunes, croit également que les exemptions doivent demeurer restreintes.

La CSQ et Force Jeunesse sont aussi inquiets de la hausse des accidents de travail chez les enfants de moins de 14 ans. La CNESST signale 8000 accidents de travail chez les moins de 18 ans entre 2012 et 2021.