Plusieurs enjeux propres aux femmes influencent leur capacité d’épargner pour la retraite. Comment agir pour rectifier le tir?

Les statistiques de Retraite Québec montrent clairement une réalité différenciée selon les sexes qui perdure tout au long de la vie active des épargnants. Dès l’âge de 20 ans, le taux de participation des femmes au Régime de rentes du Québec (RRQ) est inférieur à celui des hommes. Plusieurs causes ont été identifiées, notamment le fait que les femmes ont des salaires moins élevés que les hommes et une carrière souvent moins continue, puisqu’elles assument encore la majeure partie des responsabilités familiales.

Deux expertes sur la question dressent un portrait de la situation et proposent des mesures à envisager pour rectifier ces importantes inégalités.

Des inégalités qui persistent

Dans un mémoire sur les femmes et la retraite publié en 2017, le Conseil du statut de la femme (CSF) a relevé plusieurs causes aux inégalités concernant la participation au Régime de rentes du Québec. « Les particularités du parcours des femmes sur le marché de l’emploi sont directement en lien avec les inégalités dont elles sont encore victimes », constate Hélène Charron, directrice de la recherche et de l’analyse au CSF. Celle-ci évoque trois particularités dominantes.

Primo, l’orientation professionnelle des femmes serait encore marquée, malgré des progrès réalisés au cours des dernières décennies, par des choix très traditionnels qui les amènent vers des emplois moins rémunérateurs que les hommes. Ces décisions ont, dès lors, une incidence directe sur la cotisation des femmes en vue de leur retraite.

Deuxio, des obstacles subsistent dans la progression de carrière des femmes. En effet, « les femmes peinent à se faire une place équivalente à celle des hommes dans les directions des entreprises ou des postes à responsabilités, et ce, dans tous les secteurs d’emploi », indique Hélène Charron. Cette réalité se traduit par des écarts salariaux entre les hommes et les femmes, même dans des domaines où les femmes sont plus nombreuses.

Finalement, le travail non rémunéré est encore souvent assumé par les femmes, et celles-ci ont donc une carrière moins continue que les hommes. « Que ce soit auprès des enfants ou auprès des personnes qui vieillissent ou qui ont des formes de dépendance, ce travail non rémunéré est mal réparti entre hommes et femmes », mentionne Hélène Charron.

Les femmes sont donc plus nombreuses que les hommes à prendre des congés parentaux ou à travailler à temps partiel pour s’occuper de personnes de leur entourage. Ainsi, « en 2016, 24,8 % des femmes salariées travaillaient à temps partiel contre 12,2 % des hommes », précise Mme Charron.

Ces inégalités ont un effet direct sur l’épargne des femmes en vue de leur retraite à l’âge où elles ont des enfants ainsi qu’en fin de carrière, lorsqu’elles sont plus nombreuses à assumer le rôle de proche aidante. En effet, en 2012, le quart de la population québécoise se trouvait en situation de proche aidance et 58 % de ces personnes étaient des femmes, selon le portrait publié en avril dernier par le CSF.

« L’attitude plus prudente et plus protectrice des acquis amène les femmes à faire des choix économiques différents des hommes. »

– Hélène Charron, Conseil du statut de la femme

Rôle des femmes

Les femmes peuvent-elles agir sur les inégalités dont elles sont victimes et qui affectent leur épargne en vue de leur retraite? Josée Blondin, psychologue organisationnelle et fondatrice de la firme de conseil InterSources, croit qu’elles doivent apprendre à se positionner et à négocier, non seulement au travail, mais aussi dans leur vie familiale.

« Les femmes, tout au long de leur vie, font des sacrifices pour leur famille et culpabilisent souvent, constate-t-elle. De plus, l’argent est encore tabou pour elles. Par conséquent, elles ne se positionnent pas à leur juste valeur et sont moins revendicatrices. »

Les femmes devraient donc développer des habiletés pour mieux négocier, exiger des contrats de travail, mais aussi s’assurer que leur employeur respecte la Loi sur l’équité salariale dans les entreprises de plus de 10 employés.

Outre leurs conditions de travail, les femmes font des choix économiques plus prudents que les hommes. « Évidemment, elles prennent des décisions plus sécuritaires car elles sont préoccupées par l’influence de leurs placements sur la famille », explique Josée Blondin. Les femmes auraient donc intérêt à acquérir une meilleure éducation quant au niveau de risque qu’elles peuvent prendre quand vient le temps de faire des placements financiers pour leur retraite.

« En économie, comme en politique, les femmes prennent des décisions en tenant compte des besoins de tout le monde autour d’elles, renchérit Hélène Charron. Cette attitude plus prudente et plus protectrice des acquis les amène à faire des choix économiques différents des hommes. »

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