Les régimes d’assurance collective tels que nous les connaissons aujourd’hui ont certes évolué au rythme des besoins au cours des dernières décennies, mais ­répondent-ils encore aux attentes des employeurs et des employés?­

Depuis plusieurs années, nous discutons de la nécessité de faire évoluer les régimes pour en assurer la pérennité. Or, notre vision de leur transformation était nettement plus ambitieuse que ce qui a été opéré comme changement.

Que ce soit pour satisfaire les besoins des différentes générations, pour mieux gérer les maladies chroniques ou pour favoriser la prévention, le temps est venu de repenser les régimes de soins de santé. L’industrie de l’assurance collective est un des terrains les plus fertiles en ce moment. Les joueurs les plus innovateurs y obtiendront du succès.

Pour provoquer un véritable changement, quelques constats s’avèrent nécessaires.

Évidemment, la première préoccupation réside dans l’augmentation fulgurante des dépenses en santé au ­Canada. En effet, les dépenses ont tout simplement triplé en 20 ans, passant de 75 milliards de dollars en 1996 pour atteindre 226 milliards de dollars en 2016. Et la tendance à la hausse continue de se faire sentir. Non seulement les coûts des médicaments augmentent, notamment avec l’apparition de nouveaux médicaments spécialisés et de nouvelles classes thérapeutiques, mais les coûts des autres soins de santé s’accroissent aussi.

Et la population change. Les entreprises d’aujourd’hui doivent composer avec quatre générations, qui ont toutes des attentes différentes. Comment alors répondre à ces besoins variés, offrir de la flexibilité, tout en restant simple ? ­Le sondage ­Sanofi ­Canada sur les soins de santé de 2017 statuait que 54 % des adhérents et 45 % des promoteurs de régime ont un intérêt marqué pour le régime à la carte. Mais seulement 19 % des employeurs offrent présentement un tel régime, principalement en raison de sa complexité et d’un manque de compréhension.

La santé mentale et les maladies chroniques provoquent aussi un effet pervers dans toutes les entreprises. Environ 35 % des demandes d’invalidité de longue durée sont liées à la santé mentale et 57 % des employés déclarent vivre avec une maladie chronique.

Une réingénierie de l’assurance collective s’impose. Alors, comment ­pouvons-nous façonner le régime collectif de demain?

D’abord, en retournant à la base. Le concept même de « l’assurance », en opposition aux « avantages sociaux », devrait établir l’assise du changement : un volet « assurance » pour les événements catastrophiques et un volet « avantages sociaux » pour les garanties à choisir en fonction de ses besoins.

Ensuite, en intégrant la technologie au service de la santé. Avec l’arrivée de l’intelligence artificielle, qui peut offrir des outils de diagnostic, de monitorage et de prescription avec une plus grande précision, la responsabilisation du patient dans la gestion de sa santé est ainsi privilégiée. La clé réside dans un dialogue entre les données, la technologie et les gens. Si 80 % des adhérents souhaitent recevoir de l’information pour les aider à mieux gérer leur santé et si la tendance actuelle prône l’amélioration des habitudes de vie, les communications ciblées auront pour effet de soutenir les efforts des gens en ce sens. Les personnes vivant avec une maladie chronique pourront alors être appuyées dans l’autogestion de leur maladie.

La technologie numérique devra aussi servir les employeurs comme les employés : paiement des demandes de règlement en temps réel, administration du régime simplifiée, ­libre-service, consultation ­Web, navigation dans le réseau des soins de santé…

Sur le plan des médicaments, deux éléments sont à considérer : le soutien au sujet de l’observance du traitement et les tests pharmacogénétiques permettant de prescrire le bon médicament dès le départ.

Enfin, développer une conception de régime qui encourage le remboursement selon le rendement est une avenue très intéressante puisqu’elle encourage un changement de comportement et une responsabilisation.

Nous en sommes donc à la croisée des chemins. Les différents intervenants de notre industrie doivent dès lors prendre collectivement les responsabilités qui s’imposent pour entraîner un changement et repenser les régimes d’assurance collective. Et le nouveau concept devra résider dans l’obligation de résultat, soutenue par la technologie, la communication et la gestion optimale et par l’acceptabilité grâce à des communications ciblées pour les différentes générations.­

Êtes-vous prêts pour le régime de soins de santé du futur?

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Pierre ­Marion est directeur de marché à ­Croix ­Bleue ­Medavie.