Depuis le retour des activités en présence dans les universités, des étudiants se mobilisent pour demander à leur établissement de se libérer de leurs portefeuilles d’actions investies dans l’industrie des combustibles fossiles. C’est le cas à l’Université de Montréal et à l’Université McGill, où des étudiants occupent l’entrée d’un pavillon depuis le début de la semaine.

Vendredi midi, une vingtaine d’étudiants occupent l’espace à l’entrée du pavillon des arts de l’Université McGill.

Plusieurs tentes sont installées sous une banderole qui appelle à « investir dans la communauté et non dans le pétrole et le charbon ». Depuis lundi dernier, des dizaines d’étudiants se relaient pour manifester. Certains dorment, mangent et étudient sur les lieux.

Léo Ortega mentionne à La Presse Canadienne « que ça fait dix ans » que des étudiants demandent à l’université de retirer ses actifs du secteur des énergies fossiles.

« Nous exigeons le désinvestissement des carburants, mais aussi des compagnies de défense militaire comme Lockheed Martin », précise l’étudiant en philosophie, qui s’implique avec le groupe de militants « Divest McGill ».

Alors que des manifestants commencent à distribuer de la pizza aux « occupants », quelques étudiants en biologie font un détour par le pavillon des arts pour s’informer de « l’occupation ».
« On a des cours qui nous enseignent les conséquences des changements climatiques, alors que l’université investit dans les énergies fossiles, c’est incohérent, il y a une discontinuité avec ce qu’on nous enseigne », indique Majdi Hunter Batal, qui dit s’être déplacé pour en apprendre davantage sur les revendications des étudiants qui occupent l’entrée du bâtiment.

Au même moment, vendredi midi, des étudiants de l’Université de Montréal publiaient un communiqué dans lequel ils revendiquaient avoir installé une bannière portant le slogan « Action climatique maintenant » sur l’emblématique tour du pavillon Roger-Gaudry de l’UdeM.

Ces étudiants demandent également le désinvestissement de la totalité des actifs de leur université dans le secteur des énergies fossiles.

« Considérant le dernier rapport du GIEC qui nous sommait de réduire urgemment nos émissions de gaz à effets de serre, on trouve incohérent et incroyablement cynique que notre université continue à investir dans les énergies fossiles », a déclaré Quentin Lehmann, militant au sein de l’Écothèque, un regroupement d’étudiants militants.

L’UdeM veut « bouger dans les mois qui viennent »

Selon un courriel transmis à La Presse Canadienne par la relationniste Geneviève Omeara, le fonds de retraite de l’UdeM investit près de 78 millions $ dans le secteur pétrolier et gazier.

La relationniste souligne que ce fonds de retraite possède « sa propre gouvernance et donc est administré par son Comité de retraite et non pas par l’UdeM ».

Toutefois, l’université administre également un fonds de dotation, dans lequel 14 millions $ sont placés dans l’industrie du pétrole, des gaz et des combustibles.

« Actuellement, nous n’avons pas de politique de désinvestissement du secteur des énergies fossiles pour le fonds de dotation, mais c’est un enjeu qui reste à l’étude de manière continue », a indiqué la porte-parole Geneviève Omeara.

Dans un texte publié récemment sur le site de l’université, le recteur Daniel Jutras a indiqué que l’établissement d’enseignement « réfléchit et fait du chemin sur l’enjeu du désinvestissement. On veut bouger dans les mois qui viennent, mais de façon raisonnée et informée. »

Rappelons qu’en 2019, l’Université de Montréal s’était jointe à une dizaine d’autres établissements d’enseignement supérieur pour souligner qu’elle reconnaissait la nécessité de lutter contre la menace des changements climatiques.

L’UdeM avait signé une déclaration dans laquelle elle s’engageait à atteindre « la carboneutralité pour 2030 ou 2050 au plus tard, mobiliser davantage de ressources pour la recherche axée sur les mesures pour remédier aux changements climatiques et faciliter le développement de compétences, et accroître l’accès à l’éducation relative à l’environnement et au développement durable dans les programmes d’enseignement, sur les campus et dans les programmes de sensibilisation des communautés ».

McGill soutient avoir réduit ses placements

Dans un courriel envoyé à La Presse Canadienne, l’Université McGill a affirmé avoir « déjà réduit de moitié ses placements dans les actions des 200 plus grandes sociétés figurant dans la liste Carbon Underground 200″.

« Carbon Underground 200 » fait référence à une liste compilée par la firme américaine FFI Solutions qui publie des données sur les 100 entreprises publiques détenant les plus importantes réserves de pétrole et de gaz naturel ainsi que les 100 entreprises publiques détenant les plus importantes réserves de charbon.

La porte-parole de l’Université McGill, Cynthia Lee, a indiqué que les placements de l’université dans ces industries étaient passés « d’environ 2 %, soit environ 32 millions de dollars en septembre 2019, à moins de 1 %, soit environ 17 millions de dollars ».

Cynthia Lee a ajouté que l’établissement a « adopté une approche innovante » qui vise à investir dans « les énergies renouvelables, les technologies propres, l’efficacité énergétique, la construction écologique, la prévention de la pollution, l’eau durable et d’autres fonds à faible émission de carbone ».

Des universités font le choix du désinvestissement

Depuis quelques années, de plus en plus d’universités, souvent pressées par les étudiants, font le choix de ne plus investir dans les combustibles fossiles.

La Fondation de l’UQAM affirme ne plus avoir de placement dans le secteur des énergies fossiles depuis 2018.

L’Université Laval a promis de se débarrasser progressivement de ce type d’actions et « depuis le 31 août 2021, la Fiducie a cessé complètement tout investissement dans des entreprises figurant sur le Carbon Underground 200 », selon un communiqué publié sur le site de l’établissement.
En 2019, la fondation de l’Université Concordia s’est engagée à effectuer 100 % de placements durables d’ici 2025 et à renoncer complètement à investir dans le charbon, le pétrole et le gaz.