La Réserve fédérale des États-Unis accélérera la cadence à laquelle elle retire son soutien à l’économie américaine post-pandémique, alors que l’inflation augmente, et elle prévoit de relever ses taux d’intérêt trois fois l’année prochaine.

Dans un brusque changement de politique, la banque centrale a annoncé mercredi qu’elle réduirait ses achats mensuels d’obligations deux fois plus rapidement qu’elle l’avait annoncé précédemment, y mettant probablement fin en mars. Les achats d’obligations étaient destinés à maintenir les taux à long terme pour soutenir l’économie, mais ils ne sont plus nécessaires maintenant que le taux de chômage a reculé et que l’inflation se trouve à un sommet de près de 40 ans. Le calendrier accéléré place la Fed sur la bonne voie pour commencer à augmenter ses taux au premier semestre de l’année prochaine.

La nouvelle prévision de la Fed voulant qu’elle augmente son taux de référence à court terme trois fois l’année prochaine représente une accélération par rapport à sa prévision de septembre, qui n’entrevoyait qu’une seule hausse de taux pour 2022. Le taux directeur de la Fed, désormais proche de zéro, influence de nombreux crédits à la consommation et aux entreprises, et ces taux devraient également augmenter.

Le président de la Fed, Jerome Powell, avait donné un aperçu de ce changement de politique lors d’un témoignage au Congrès, il y a deux semaines. Cette nouvelle orientation montre que M. Powell reconnaît qu’avec la montée des pressions inflationnistes, la Fed devait commencer à resserrer le crédit aux consommateurs et aux entreprises plus rapidement qu’il ne l’avait pensé quelques semaines plus tôt. La Fed avait précédemment caractérisé la flambée de l’inflation principalement comme un problème « temporaire », qui s’estomperait à mesure que les goulots d’étranglement de l’offre attribuables à la pandémie se résorberaient.

Mais la hausse des prix a persisté plus longtemps que la Fed ne l’avait prévu et s’est propagée des biens comme la nourriture, l’énergie et les automobiles aux services comme les loyers d’appartements, les repas au restaurant et les chambres d’hôtel. Elle a pesé lourdement sur les consommateurs, en particulier sur les ménages à faible revenu et pour les nécessités quotidiennes, et a annulé les hausses de salaire que de nombreux travailleurs ont reçues.

En réponse, la Fed détourne son attention de la réduction du taux de chômage, qui est tombé rapidement à 4,2 %, contre 4,8 % lors de sa dernière réunion, pour la recentrer sur la maîtrise de la hausse des prix. Les prix à la consommation ont grimpé de 6,8 % en novembre par rapport à l’année précédente, a annoncé le gouvernement américain la semaine dernière, sa cadence la plus rapide depuis près de quatre décennies.

La Banque du Canada maintient sa cible d’inflation

La banque centrale du Canada visera à maintenir le rythme annuel des hausses de prix à son taux cible historique, mais prendra désormais plus formellement en compte la santé du marché du travail dans le cadre de son régime de ciblage de l’inflation.

Un nouvel accord-cadre entre le gouvernement fédéral et la Banque du Canada annoncé lundi maintient un taux cible d’inflation annuel de 2 %.

Cependant, la banque centrale examinera désormais également les taux d’emploi et leur proximité avec le niveau le plus élevé qu’ils peuvent atteindre avant d’alimenter l’inflation lors de la fixation de son taux d’intérêt directeur.

Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, et la ministre des Finances, Chrystia Freeland, ont souligné qu’il n’y avait eu aucun changement important aux directives de la banque et que la prise en compte de l’emploi ne constituait pas une double mission pour atteindre deux objectifs différents _ une mesure qui était à l’étude pour le mandat.

M. Macklem et Mme Freeland ont présenté l’accord comme codifiant l’intérêt de la Banque du Canada pour un marché du travail sain, ce que la banque a souligné pendant la pandémie pour expliquer ses décisions.

« La politique monétaire fonctionne mieux lorsque les gens la comprennent, a déclaré M. Macklem, et, vraiment, cet accord clarifie nos objectifs et clarifie comment nous avons et pouvons utiliser la flexibilité qui est intégrée dans notre cadre. »

En vertu du nouvel accord, la Banque du Canada peut décider de permettre à l’inflation de se rapprocher de chaque extrémité de la fourchette cible de la banque de 1 % à 3 % pour de courtes périodes, car elle détermine le moment où le marché du travail atteint son plein potentiel.

Elle a également la possibilité de maintenir son taux d’intérêt directeur au niveau le plus bas possible pendant de plus longues périodes afin d’aider l’économie à se remettre d’un ralentissement.
Depuis 1991, la Banque du Canada vise un taux d’inflation annuel compris entre 1 % et 3 %, atteignant souvent un point idéal à 2 %.

Même dans le cadre de ses mandats précédents, la santé du marché du travail était un facteur dans les décisions de baisser ou d’augmenter les taux, a déclaré Benjamin Reitzes, directeur des taux canadiens à la BMO.

« Par exemple, l’inflation avoisine les 5 % et le ralentissement du marché du travail a été l’une des principales raisons pour lesquelles la (Banque du Canada) a maintenu ses taux directeurs à la limite inférieure », a-t-il écrit dans un rapport.

Le taux directeur de la Banque du Canada depuis le début de la pandémie a été de 0,25 %. Il a été abaissé pour stimuler les dépenses pendant le ralentissement induit par la COVID-19 et le rebond qui a suivi. Dans l’état actuel des choses, la banque ne projette pas de hausse des taux avant avril 2022 au plus tôt.

Les modifications du taux cible du financement à un jour de la Banque du Canada influent sur les taux préférentiels des grandes banques du pays, qui servent de référence pour les prêts tels que les prêts hypothécaires à taux variable et les marges de crédit sur valeur domiciliaire. Les variations de taux peuvent également influer sur les rendements obligataires, ce qui peut entraîner des modifications des prêts hypothécaires à taux fixe et d’autres emprunts.

En vertu de l’accord lundi, la banque centrale a déclaré que le taux pourrait plus souvent toucher le bas de la fourchette et y rester plus longtemps si la banque pense que cela contribuera à ramener l’inflation à la cible.
Un environnement de taux bas pour une plus longue période peut parfois être nécessaire, a déclaré la banque, même s’il augmente la probabilité que l’inflation dépasse l’objectif de 2 % à mesure que l’économie se redresse.

Les hausses de taux pourraient être plus progressives que par le passé, car la banque déterminera si elle a correctement estimé le plein potentiel du marché du travail, ce qui signifie que l’inflation pourrait à nouveau dépasser la cible de la banque.

« C’est l’une des raisons de penser que l’inflation sera, en moyenne, plus élevée au cours des prochaines années qu’au cours de la dernière décennie, mais pas de façon spectaculaire », a estimé Stephen Brown, économiste canadien principal chez Capital Economics, notant que l’inflation a atteint en moyenne 1,7 % depuis la crise financière mondiale.

La banque a noté qu’il peut être « impossible » de déterminer quand le pays a atteint « l’emploi durable maximal », car il ne peut pas être résumé en un seul chiffre, et est compliqué par une main-d’œuvre vieillissante.

La banque prévoit de décrire les indicateurs du marché du travail qu’elle surveille et de les détailler dans le cadre de ses annonces régulières de taux d’intérêt.

L’accord décrit également comment la banque devrait prendre en compte les changements climatiques dans ses politiques, tout en laissant aux gouvernements le soin d’atteindre les objectifs d’émissions. « La politique monétaire ne peut pas s’attaquer directement aux menaces posées par les changements climatiques », indique le communiqué, ce dernier ajoutant que la modélisation économique devrait tenir compte de ses effets sur le système financier.

Alex Speers-Roesch de Greenpeace a affirmé qu’au contraire, la politique de la banque centrale peut aider à lutter contre les changements climatiques. Il a souligné l’option de la banque d’acheter des actifs plus respectueux de l’environnement, ce que la Banque du Canada envisage de faire.