Le niveau de solvabilité des régimes de retraite canadiens a chuté depuis le début de l’année, alors que les craintes grandissantes d’une pandémie de COVID-19 font plonger les marchés boursiers mondiaux.
Le ratio de solvabilité médian des régimes de retraite des clients de Mercer atteignait 92 % le 29 février, en baisse de 6 points de pourcentage par rapport au 31 décembre dernier. Chez Aon, le ratio a dégringolé de 6,7 points sur la même période, passant de 102,5 % à 95,8 %.
« La réaction des marchés au virus porte un double coup aux régimes PD : le repli des marchés boursiers érode l’actif, alors que la chute des taux obligataires entraîne une augmentation du passif », explique F. Hubert Tremblay, conseiller principal au sein du Groupe de stratégie financière de Mercer Canada.
Les rendements des obligations canadiennes de référence à 10 ans ont chuté de 50 points de base à la fin du mois de février, tandis que les rendements des obligations canadiennes à long terme ont baissé de 40 points de base. La chute des rendements a entraîné une augmentation de 6,3 % des engagements de retraite, selon Aon.
« Compte tenu des récentes baisses des taux d’intérêt des banques centrales, dont la Réserve fédérale et la Banque du Canada, nous pourrions entrer dans une nouvelle phase prolongée de baisse des rendements obligataires », prévient Claude Lockhead, associé exécutif de Solutions pour la retraite chez Aon.
Du côté des marchés boursiers, les inquiétudes croissantes liées au COVID-19 ont poussé les investisseurs à vendre massivement leurs actions. L’indice composé S&P/TSX a perdu 4,3 % de sa valeur au cours des deux premiers mois de l’année, tandis que le marché des actions américaines a reculé de 8,1 %, en dollars américains. Les actions internationales ont subi la perte la plus marquée, l’indice MSC EAEO ayant affiché un rendement de -9,2 % en monnaie locale.
La panique s’empare des marchés
Si le mois de février a été pénible pour les investisseurs, le début du mois de mars ne leur donne aucun espoir d’embellie. À l’ouverture des marchés lundi, la Bourse canadienne a chuté de près de 10 %, sa pire dégringolade depuis le crash d’octobre 1987, selon Bloomberg. À New York, l’indice S&P 500 a plongé de 7 %, forçant les autorités à interrompre les transactions pendant une quinzaine de minutes.
L’indice VIX qui mesure le niveau de volatilité du S&P 500 a pour sa part atteint son sommet depuis décembre 2008.
En cause, l’effondrement du prix du pétrole suite à un différend entre les principaux pays producteurs. L’Arabie Saoudite a ainsi drastiquement réduit le prix de son pétrole, tout en augmentant sa production. Résultat, le baril de Brent perdait 31 % de sa valeur lors de l’ouverture des marchés asiatiques lundi, son plus important recul depuis 1991, lors de la guerre du Golfe. À la Bourse des matières premières de New York, le cours du pétrole a cédé 10,77 $ US, ou 26 %, à 30,49 $ US le baril, après avoir reculé de 10 % vendredi dernier.
Le marché boursier canadien a été frappé de plein fouet, considérant l’importance du secteur énergétique dans l’économie du pays. À Bay Street, le sous-indice de l’énergie a reculé de plus de 20 %.
« L’effondrement des cours du pétrole va causer des dommages irréparables à l’économie canadienne et au marché boursier », a commenté à Bloomberg Ed Moya, analyste de marché senior à Oanda Corporation, à New York.
Face à l’incertitude des marchés boursiers, les investisseurs se ruent sur les obligations gouvernementales, les actifs les moins risqués qu’ils peuvent trouver. Or, les bons du Trésor américain 10 ans ont baissé à un niveau record de 0,338 %, comparativement à 0,709 % vendredi, rapporte le Wall Street Journal. Même mouvement du côté des obligations 30 ans, qui ont chuté de 1,216 % à 0,712 % lundi. Selon le quotidien financier, cela signifie que les investisseurs sont tellement inquiets face à l’avenir qu’ils sont prêts à accepter « de minuscules intérêts », et ce, pendant trois décennies.
« Je n’ai jamais vu cela, et ça fait 30 ans que je travaille dans le secteur », s’est exclamé en entrevue au Wall Street Journal Scott Thiel, stratégiste en chef, revenu fixe à BlackRock.
Au Canada, les obligations 10 ans sont tombées à 0,225 %, et les obligations 5 ans, à 0,276 %.
La Réserve fédérale américaine a pour sa part annoncé lundi qu’elle allait augmenter les montants qu’elle injecte chaque jour dans le marché monétaire pour les porter à au moins 150 milliards de dollars quotidiens. La plupart des acteurs du marché s’attendent maintenant à ce que la banque centrale annonce une nouvelle baisse de son taux directeur à l’issu de sa réunion la semaine prochaine.