Malgré une année 2022 tendue sur les marchés boursiers, la santé financière des régimes de retraite à prestations déterminées (PD) canadiens s’est améliorée en raison de la forte hausse des taux d’intérêt qui a soulagé leur passif.

Le degré de solvabilité des régimes contenues dans la base de données de Mercer est ainsi passé de 103 % au début de 2022 pour augmenter à 108 % au 30 septembre et finalement s’établir à 113 % en fin d’année.

Selon la société de conseil, la baisse de l’actif des régimes au cours de l’exercice, conséquence de la mauvaise performance des actions, a été plus que compensée par la diminution du passif des régimes, résultat de la hausse des taux d’intérêt.

Parmi les régimes de retraite surveillés par Mercer, 79 % présentent un excédent d’actif selon l’approche de solvabilité, alors que seulement 61 % se trouvaient dans la même situation à la fin de 2021.

À noter que 12 % des régimes montrent un degré de solvabilité entre 90 et 100 %, tandis que 4 % obtiennent un ratio entre 80 et 90 %. Seulement 5 % des régimes se trouvent dans une situation plus précaire avec un degré de solvabilité inférieur à 80 %.

« Si l’on se fonde sur l’approche de continuité, la réalité pourrait être différente, précise toutefois F. Hubert Tremblay, conseiller principal du domaine Avoirs de Mercer à Montréal. De plus, la situation financière des régimes qui utilisent l’effet de levier sur la composante à revenu fixe de leur portefeuille d’actifs et qui investissent également dans des actions s’est probablement détériorée. »

Les données d’Aon montrent également une embellie de la santé financière des régimes de retraite au cours des 12 derniers mois. Leur ratio de capitalisation global est ainsi passé de 96,9 % à la fin de 2021 à 100,8 % à la fin de 2022.

L’actif des régimes a cependant été malmené, perdant 15,6 % au cours de l’année écoulée. Le rendement des obligations à long terme du gouvernement du Canada a pour sa part augmenté de 160 points de base par rapport au taux de la fin de l’année précédente, tandis que les écarts de crédit ont augmenté de 45 points de base. Cette combinaison a entraîné une augmentation des taux d’intérêt utilisés pour évaluer les engagements des régimes de retraite, passant de 2,77 pour cent à 4,82 %.

L’incertitude plane sur 2023 

L’inflation continuera de présenter un risque pour les employés, les employeurs et les promoteurs de régimes en 2023, prévient Mercer.

Pour les promoteurs de régimes de retraite de type fin de carrière ou de régimes de retraite indexés, les conséquences de l’inflation élevée déjà réalisée pourraient être importantes. Compte tenu de la possibilité que l’inflation demeure élevée, même si ce n’est qu’à court ou à moyen terme, ces régimes pourraient être exposés à d’importants risques pour leurs passifs liés à l’inflation pouvant ne pas être immédiatement apparents pour le promoteur du régime et les autres intervenants.

En ce qui concerne les promoteurs de régimes non indexés, ils pourraient faire face à des demandes croissantes de la part de groupes de retraités en faveur d’un rajustement ponctuel des rentes en fonction de l’augmentation du coût de la vie. Les promoteurs de régimes à taux de rente fixe ou de régimes de type salaires de carrière peuvent s’attendre à subir des pressions pour augmenter le taux d’accumulation de la rente et mettre à jour la base salariale. Ces demandes et ces pressions pourraient être plus énergiques dans le cas des régimes présentant des excédents d’actifs.

Les promoteurs de régimes qui peuvent compter sur un excédent d’actif devront pour leur part discuter de l’utilisation stratégique de cet excédent. « Devrait-on revoir la répartition de l’actif pour assurer un meilleur appariement de l’actif et du passif, afin de préserver l’excédent et de réduire la volatilité future de la situation financière du régime ? Et comment le portefeuille d’appariement du passif devrait-il être structuré ? Les marges devraient-elles être augmentées pour offrir une protection plus solide contre les expériences défavorables à l’avenir et accroître la sécurité des prestations ? », demande Mercer. Des questions entourant les demandes d’amélioration des prestations ou encore les congés de cotisations pourraient également être soulevées.

« Compte tenu de l’inflation élevée, des vents de face sur les marchés financiers et des tensions géopolitiques qui persistent, l’année 2023 pourrait se révéler aussi volatile que 2022, soutient F. Hubert Tremblay. Les promoteurs de régimes devraient s’assurer qu’ils comprennent les risques auxquels leurs régimes sont exposés et qu’ils sont en mesure d’y faire face, sans quoi ils devraient prendre des mesures dès maintenant pour gérer ces risques. »

Cela dit, la situation avantageuse dans laquelle les régimes se trouvent en ce début d’année permet d’être optimiste. « De nombreux régimes de retraite commenceront 2023 dans une très bonne situation financière, affirme Jason Malone, associé principal et responsable de l’innovation pour les Solutions pour le patrimoine d’Aon. Les promoteurs de régimes peuvent utiliser cette position favorable pour réduire les risques dans la répartition de l’actif ou au moyen d’activités de transfert des risques liés aux régimes de retraite. »

Et les régimes CD ?

L’année 2022 a été source d’inquiétude pour les participants de régimes à cotisation déterminée (CD), qui ont enregistré des rendements négatifs dans leurs comptes. Cette situation pourrait avoir une incidence sur les décisions en matière de retraite des participants approchant de la retraite, ce qui pourrait avoir des répercussions sur les plans de gestion de la main-d’œuvre des employeurs, prévient Mercer.

Pour atténuer d’éventuels effets négatifs, les employeurs doivent mettre l’accent sur les programmes d’éducation sur les placements et les initiatives de mieux-être financier à l’intention des participants. Les promoteurs ont aussi intérêt examiner périodiquement la conception de leurs régimes, la gamme de fonds offerts, les services de tenue de dossiers et les frais.