Les promoteurs de régimes de retraite à cotisation déterminée (CD) réalisent de plus en plus l’ampleur du défi d’élaborer une politique de placements qui réponde aux besoins de leurs participants. Les fonds axés sur une date d’échéance jouissent certes d’une popularité grandissante, mais représentent-ils l’unique solution?

En 2015, 22 % des actifs de régimes CD étaient investis dans des fonds à date d’échéance, par rapport à seulement 16 % en 2014, a souligné Anne Meloche, vice-présidente régionale, affaires institutionnelles, Québec et Est du Canada à Placements mondiaux Sun Life lors du Colloque retraite, investissement institutionnel et finances personnelles qui a eu lieu la semaine dernière à Québec.

Plus de la moitié des régimes (55 %) utilisent par ailleurs des fonds à date d’échéance comme option de placement par défaut, comparativement à 33 % en 2014. L’utilisation accrue de ces fonds a notamment eu pour effet d’augmenter la répartition des jeunes employés en actions. Car l’appétit pour le risque n’est pas seulement lié au niveau de littératie financière, il varie également selon les générations.

« Les participants de la génération Y sont très frileux dans leurs placements en raison de la crise de 2008, qui est très fraîche dans leur mémoire. Les boomers, au contraire, prennent généralement plus de risques parce qu’ils ont profité de longues périodes de marchés haussiers au cours de leur vie », constate Anne Meloche.

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Vers plus de personnalisation?

Malgré le fait qu’ils offrent une bonne diversification et une répartition d’actif évolutive sur une longue période, les fonds à date cible comportent certaines lacunes. La principale est probablement qu’ils ne tiennent pas compte de la situation particulière de chaque participant.

« Un fonds à date d’échéance est conçu en fonction d’un participant qui verse des cotisations moyennes, a des attentes de rendements moyennes et a une tolérance au risque moyenne », résume Mme Meloche.

Bien conscients de cette lacune, certains régimes CD aux États-Unis offrent maintenant une option plus personnalisée à leurs participants, les managed accounts. Pas encore disponibles au Canada, ces types de fonds récoltent des informations sur les participants dans le but de fixer un taux de cotisation et une répartition d’actif personnalisé. Si l’idée de base semble plutôt bonne, Anne Meloche mentionne que les managed accounts ne sont utilisés que par 10 % des participants et coûtent de 30 à 60 points de base supplémentaires en frais de gestion.

« La plupart des participants les utilisent sans indiquer d’informations supplémentaires ou de préférences. Résultat, ils paient plus sans avoir un plus haut niveau de personnalisation », soutient Mme Meloche.

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Une offre à la carte plus diversifiée

L’engouement pour les fonds à date d’échéance n’a pas totalement éclipsé les fonds à la carte, encore bien présents dans la majorité des régimes CD. Ont-ils encore leur place? Oui, à condition que les promoteurs offrent une meilleure diversification aux participants, estime Anne Meloche.

En déplaçant les participants qui ont de faibles connaissances en investissement vers les fonds à date cible, croit-elle, les promoteurs seront plus enclins à ajouter des catégories d’actifs non traditionnels à leur offre à la carte. « Alors que les actifs traditionnels sont très corrélés depuis 2008, les participants gagneraient probablement à s’exposer à une certaine prime d’illiquidité. » Avec une répartition se situant entre 5 et 7 %, les actifs non traditionnels se font en effet beaucoup plus rares dans les régimes CD que dans les régimes à prestations déterminées.

Mais la question demeure : combien d’options de placements offrir? Il faut trouver un compromis entre simplicité et diversification, résume Anne Meloche. « Les promoteurs qui ne sont pas prêts à vraiment s’impliquer dans l’élaboration d’une bonne offre à la carte feraient mieux d’offrir seulement des fonds à date d’échéance. »

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