Récemment, le premier ministre François Legault indiquait en conférence de presse que les coûts des nouveaux médicaments font augmenter l’enveloppe budgétaire du système de santé, poussant d’ailleurs les provinces à demander au gouvernement fédéral d’augmenter les transferts en santé. Cette réalité budgétaire ne concerne pas uniquement les décideurs publics. Les employeurs paient eux aussi le prix de ces nouveaux médicaments par l’entremise de régimes collectifs dont les coûts augmentent constamment, ce qui resserre encore davantage leurs finances déjà éprouvées par la crise de la COVID-19.

Grâce à d’importantes avancées scientifiques, de nouveaux médicaments de spécialités, bien souvent biologiques, et utilisés pour traiter l’arthrite, les cancers, le diabète ou des maladies rares, sont entrés dans le marché au cours des 20 dernières années. Plusieurs de ces traitements coûtent des milliers, voire des centaines de milliers de dollars par patient. Cette réalité a contribué à une augmentation constante du coût des régimes collectifs au cours des dernières années.

Selon le plus récent rapport de Telus Santé, les régimes privés d’assurance médicaments ont enregistré en 2019 leur plus forte augmentation depuis cinq ans quant au coût moyen réclamé par personne assurée. Le poids des régimes collectifs dans la masse salariale ne cesse d’augmenter. Ces régimes représentent désormais jusqu’à 12 % de la masse salariale des employeurs, une situation de plus en plus difficile à supporter pour bon nombre d’entre eux.

Devant cette situation, certains employeurs n’ont d’autre choix que d’augmenter les contributions de leurs employés ou de diminuer leur niveau de couverture. Dans certains cas, des employeurs vont même jusqu’à abandonner leur régime collectif, faute de capacité financière.

Heureusement, des solutions s’offrent aux employeurs qui souhaitent mieux contrôler leurs dépenses. La substitution vers les médicaments génériques permet de contrôler le coût des régimes collectifs. Les médicaments génériques possèdent la même qualité et efficacité que les médicaments d’origine. Or, ils sont offerts à des prix pouvant aller à 10 % du coût des médicaments de marque. On parle de traiter 10 patients pour le prix d’un.

Pourtant, le Québec arrive en queue de peloton parmi les provinces canadiennes en matière de recours aux médicaments génériques dans le secteur privé. En effet, seulement 64,4 % des ordonnances couvertes par les régimes d’assurance médicaments privés ont été remplies avec des génériques en 2019, alors que cette proportion atteint 76,1 % en Saskatchewan. Cette faible utilisation est d’autant plus dommageable lorsqu’on sait que pour chaque augmentation de 1 % du recours aux médicaments génériques, l’ensemble des régimes privés au Québec pourraient économiser jusqu’à 114,3 M$.

Les employeurs et les assureurs doivent aussi encourager les employés à avoir recours aux médicaments biosimilaires. Les biosimilaires sont des versions très semblables aux médicaments biologiques qui exercent une pression considérable sur les soins de santé. Bien que les médicaments biologiques ne représentent que 1,8 % de l’ensemble des ordonnances couvertes par les régimes privés au Québec, ils s’élèvent à 31,3 % des coûts. Les biosimilaires sont des médicaments approuvés pour la vente par Santé Canada après avoir démontré qu’ils ne possèdent pas de différences cliniques en termes efficacité et d’innocuité avec leur produit biologique de référence.

À titre indicatif, le plus récent rapport du Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés indiquait qu’une adoption des médicaments biosimilaires à des niveaux comparables à ceux d’autres pays de l’OCDE aurait permis à l’ensemble des provinces canadiennes d’engendrer des économies de 345,6 M$ pour l’année 2018, et des économies potentielles de 694,7 M$ en 2021 pour les régimes publics. La population québécoise représente 22,6 % de la population canadienne; ces économies pourraient donc s’élever à 157 M$ au Québec en 2021.

Selon le rapport de Telus Santé 2020, « si les tendances actuelles se maintiennent, les médicaments de spécialité représenteront environ 46 % du coût mensuel moyen par certificat d’ici 2025 ». Le recours accru aux biosimilaires est donc d’autant plus critique dans le contexte de la croissance du recours aux médicaments biologiques.

Des solutions existent, et les employeurs tout comme les gouvernements doivent s’en prévaloir pour contrôler leurs dépenses, particulièrement dans le contexte de l’incertitude économique créé par la pandémie. La substitution générique ainsi qu’un recours accru aux médicaments biosimilaires offrent l’occasion de limiter les coûts associés aux régimes collectifs, aussi bien maintenant que dans l’avenir. Personne ne devrait se priver de ces économies.

Jim Keon
Président
Association canadienne du médicament générique et Biosimilaires Canada