Les gens qui considèrent avoir un problème de poids accordent plus d’importance à leur propre responsabilité qu’à des facteurs médicaux sur lesquels ils n’ont possiblement pas d’emprise, démontrent des travaux réalisés à l’Université Concordia.
Cela s’applique aussi bien aux individus dont le poids est « normal » qu’à ceux qui présentent un surplus de poids ou qui sont en situation d’obésité.
Les chercheuses ont ainsi constaté que 20 % des sujets ayant un poids normal ou un déficit pondéral ; 29 % des personnes en surpoids ; et 51 % des personnes obèses ont tendance à se condamner elles-mêmes pour leur poids ou à entretenir des attitudes négatives envers elles-mêmes.
« C’est vraiment remarquable dans notre étude de voir que 20 % des gens dont l’indice de masse corporelle est normal internalisent ces stéréotypes négatifs, a noté l’autrice principale de l’étude, la chercheuse Vida Forhouar. Ils croient que leur valeur en tant qu’individu est liée à leur poids et ils se stigmatisent à cause de ça. »
Les résultats de cette étude découlent d’une recherche menée en 2018 sur près d’un millier d’adultes concernant les attitudes relatives au poids.
Les facteurs comportementaux arrivent loin devant les facteurs médicaux quand vient le temps pour les participants d’expliquer leur problème de poids, qu’il soit réel ou perçu : 71 % des sujets ont évoqué la suralimentation, 67 % la sédentarité et 59 % une alimentation riche en gras.
On retrouve à l’autre bout de l’échelle les facteurs médicaux : 35 % des participants ont mentionné des troubles endocriniens et 41 % les facteurs métaboliques.
« La majorité des gens croient surtout aux causes comportementales liées à l’obésité, a dit Mme Forhouar. Ils pensent que c’est vraiment “on mange trop et on ne bouge pas assez”. Mais dans la littérature, on voit que la régulation du poids est vraiment plus complexe que ça, c’est multifactoriel. Ce n’est pas aussi simple que “manger moins et bouger plus”. »
Plus on croit que l’obésité est due à des facteurs contrôlables, poursuit-elle, et plus on considère qu’il s’agit d’un problème de comportement, plus on risquera de développer un biais négatif et de l’internaliser.
Cette étude, a dit Mme Forhouar, révèle que les préjugés liés au poids sont présents partout et entretenus par tout un chacun, quelles que soient la forme et la taille de leur corps, et non seulement les personnes obèses.
Et sans grande surprise, les idéaux de « beauté » et de « corps parfait » véhiculés par la culture populaire sont probablement responsables de la situation, a-t-elle ajouté.
« Il y a beaucoup de pression pour avoir une certaine apparence dans la société, a dit Mme Forhouar. Ça touche tous les gens, pas seulement les gens avec de l’obésité, mais aussi les gens de tous les poids. Et pour cette raison-là, il y a beaucoup d’anxiété liée à la prise du poids pour tout le monde. »
Des études précédentes ont établi un lien entre l’intériorisation des préjugés liés au poids et un accroissement des symptômes de dépression, d’anxiété, de détresse psychologique, de troubles du comportement alimentaire et d’évitement de l’activité physique.
Les travaux de Mme Forhouar et de ses collègues démontrent enfin que presque la moitié des Canadiens, soit 44 %, considèrent que les comportements constituent une cause très ou extrêmement importante de l’obésité : en d’autres mots que les personnes obèses sont essentiellement responsables de leur sort.
Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal médical BMC Public Health.