L’épuisement professionnel ne frappe pas les hommes et les femmes au même moment au cours de leur carrière, révèle une récente étude de l’Université de Montréal.

Pour les hommes, le point critique se trouve en tout début de carrière, soit à partir de 18 ans. Le risque de souffrir d’épuisement professionnel diminue ensuite jusqu’à l’âge d’environ 30 ans, et ne remonte jamais.

La réalité est bien différente chez les femmes, pour qui le risque de souffrir d’épuisement professionnel s’accroît continuellement de 20 à 35 ans, avant de s’atténuer. Par contre, les symptômes réapparaissent avec force à partir de 55 ans.

Selon Alain Marchand et Nancy Beauregard, professeurs à l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal et coauteurs de l’étude, les résultats du côté des jeunes femmes indiquent qu’après avoir acquis une certaine aisance du point de vue professionnel, elles sont frappées de plein fouet, et davantage que les hommes, par les problèmes de conciliation travail-famille.

Quant à elle, l’amplification des symptômes d’épuisement professionnel chez les femmes à partir de 55 ans pourrait découler d’une double pression, soit celle d’être performante au travail et celle de devoir venir en aide à un parent âgé. En fin de carrière, les femmes occupent des postes plus importants, et sont donc plus susceptibles de subir une forte pression dans leur vie professionnelle.

L’épuisement émotionnel mène à l’épuisement professionnel

Les chercheurs ont constaté que l’épuisement émotionnel est la composante qui s’avère la plus déterminante dans l’apparition de l’épuisement professionnel. « Globalement, le cynisme et l’épuisement émotionnel sont relativement faibles en début de carrière et s’accentuent jusqu’au début de la trentaine pour ensuite diminuer, fait remarquer Alain Marchand. Mais chez les femmes, l’abattement émotionnel augmente radicalement à partir de 55 ans. »

Les études qui soutiennent que les risques de souffrir d’épuisement professionnel s’estompent avec l’âge feraient donc fausse route en ce qui concerne les femmes.

Le fait que les hommes ne soient pas touchés par cette deuxième vague d’épuisement professionnelle en fin de carrière peut s’expliquer par le fait qu’ils réussissent à obtenir de meilleures conditions de travail, ou alors à mieux s’adapter à leur travail.

L’épuisement pousse-t-il les femmes à la retraite?

Alors que les employeurs sont de plus en plus nombreux à vouloir garder en poste leurs employés âgés, les résultats de cette étude laissent croire que les manifestations d’épuisement professionnel chez les femmes de 55 ans et plus pourraient les inciter à prendre leur retraite plus tôt que prévu.

« Le vieillissement de la main-d’œuvre est une tendance démographique lourde depuis plusieurs années et il pose notamment la question du maintien de la force de travail pour éviter les retraites précipitées, dit Alain Marchand. Or, les femmes auraient tendance à partir à la retraire plus tôt que les hommes possiblement à cause de symptômes d’épuisement plus marqués. »

La solution? Selon le chercheur, les employeurs doivent mettre en place des programmes de prévention spécialement conçus pour les femmes de 20 à 35 ans, puis pour celles de 55 ans et plus.

L’étude a été réalisée à partir de l’analyse de données obtenues auprès de 2073 travailleuses et travailleurs de 63 entreprises québécoises du secteur privé, tirées d’une recherche effectuée de 2009 à 2012.