Le retour au travail d’un employé après un congé pour un trouble de santé mentale doit être soigneusement planifié pour minimiser le risque de rechute, prévient un expert de l’Université du Québec à Montréal.

L’Organisation de coopération et de développement économiques calcule que jusqu’à la moitié des incapacités au travail dans la population active sont attribuables à des problèmes de santé psychologique.

Et jusqu’à la moitié des employés qui effectuent un retour au travail après un congé pour un trouble de santé mentale seraient ensuite victimes d’une rechute, toujours selon l’OCDE.

« Dépression, trouble anxieux, épuisement professionnel, parfois même stress post-traumatique… tout ça rentre sous ce vocable de trouble mental courant, a dit le professeur Marc Corbière, du département d’éducation et de pédagogie de l’UQAM.

« Ça a bien sûr des coûts financiers, mais aussi humains parce que les personnes qui sont en absence maladie développent souvent d’autres problèmes, comme une perte d’identité socioprofessionnelle, un abus de substances ou autres. Donc c’est important de permettre aux personnes de se rétablir, mais aussi de leur permettre un retour dans les meilleures conditions possibles. »

« Il ne suffit pas de travailler sur les caractéristiques de l’individu concerné par la maladie, mais c’est aussi de travailler sur l’environnement de travail parce qu’on sait désormais qu’il s’agit d’une interaction entre les caractéristiques de l’individu et les caractéristiques de l’environnement de travail qui font que la personne fera une rechute », a expliqué le professeur Corbière.

La communication entre les différents acteurs, qu’il s’agisse des gestionnaires, du service des ressources humaines, du syndicat, des collègues ou même du système de santé, sera essentielle pour maximiser les chances d’un retour au travail réussi, a-t-il ajouté, par exemple pour organiser un retour au travail progressif. Mais tout ça n’est pas simple, prévient-il.

« Même si la personne revient au travail, il faut prendre soin d’elle. Mais si le milieu n’y est pas sensibilisé, il sera beaucoup plus difficile pour la personne de se maintenir en emploi », a rappelé le professeur Corbière.

C’est notamment pour favoriser ce dialogue qu’on assiste de plus en plus au Québec à l’apparition de ce qu’on appelle un CORAT (soit un coordonnateur ou une coordonnatrice de retour au travail), une fonction déjà bien implantée en Europe du Nord, a dit le spécialiste.

Cette personne aura comme responsabilité de coordonner les actions des différents acteurs, « parce que c’est là que le bât blesse », a expliqué le professeur Corbière.

« En général il y a peu de communication, ou à tout le moins il y a des délais entre un acteur et un autre pour dialoguer, a-t-il déploré. Ça ralentit le processus ou encore il y a des informations erronées qui circulent. »

Avant le retour au travail de l’employé, le CORAT aura par exemple communiqué avec le gestionnaire pour vérifier si les aménagements requis ont été apportés, puisqu’il serait pratiquement inutile de replonger l’employé dans les mêmes conditions que celles qui ont originalement contribué à son départ.

Et en cas de rechute, il va de soi que l’employé sera ensuite beaucoup plus hésitant à de nouveau reprendre son poste.

« Si ça s’est mal passé lors de son premier retour au travail, eh bien cette personne-là va avoir énormément d’appréhension à retourner à son poste, donc on peut supposer que les absences seront plus longues », a dit le professeur Corbière.