
Alors que l’on pourrait aisément croire que les horloges biologiques du corps humain n’en font souvent qu’à leur tête, des travaux réalisés par des chercheurs de l’Institut universitaire en santé mentale Douglas et de l’Université McGill permettent d’envisager de nouvelles pistes thérapeutiques pour accélérer leur synchronisation.
Si le sujet peut sembler anodin, il faut savoir que, chez les humains, créatures fondamentalement diurnes, vivre la nuit crée une perturbation importante des horloges biologiques internes dans tout le corps.
En effet, les changements physiologiques au cours de la journée sont régulés par un système circadien composé d’une horloge centrale située profondément au centre du cerveau et de multiples horloges périphériques localisées dans les différentes parties de notre corps.
Les travailleurs de nuit s’exposent donc à des risques accrus de développer divers problèmes de santé métaboliques et cardio-vasculaires, ou même certains types de cancer.
« Les troubles d’ajustement aux horaires atypiques de travail représentent un enjeu de taille pour la société. Nos études antérieures montrent clairement que la désynchronisation des horloges circadiennes perturbe le sommeil, les performances et les paramètres cardiaques des travailleurs de nuit », soutient la Dre Diane B. Boivin, directrice du Centre d’étude et de traitement des rythmes circadiens où l’étude s’est déroulée.
Les résultats de l’étude, menée auprès de 16 volontaires sains étudiés en chambre d’isolement temporel, montrent pour la première fois qu’il est possible de synchroniser les horloges biologiques périphériques des cellules sanguines blanches par l’ingestion de comprimés de glucocorticoïdes.
Même si la science connaît encore mal les mécanismes par lesquels les horloges biologiques périphériques s’adaptent au travail de nuit chez les humains, les chercheurs pensent qu’ils dépendent essentiellement de l’horloge centrale.
« À ce stade, nous ne recommandons pas d’utiliser les glucocorticoïdes pour ajuster les rythmes des travailleurs à cause des risques médicaux qu’ils comportent, précise la Dre Boivin. Par contre, ces résultats permettent de croire qu’il serait éventuellement possible de combiner une intervention qui cible plus particulièrement l’horloge centrale (révision des horaires de travail, luminothérapie contrôlée), avec un traitement pharmacologique qui ciblerait plus particulièrement les horloges périphériques, pour un ajustement plus complet de nos horloges. »
Les travaux antérieurs du Dr Boivin et de son équipe avaient montré que la luminothérapie ou la révision des horaires de sommeil peuvent perturber la synchronisation de l’horloge biologique centrale avec son environnement extérieur.
Cette nouvelle percée scientifique ouvre la porte à des interventions novatrices qui peuvent agir sur plusieurs niveaux du système contrôlant les rythmes biologiques afin d’ajuster ces rythmes à des horaires de sommeil décalés.
Ces études ont des applications possibles pour les voyageurs, les travailleurs de nuit et les patients souffrant de troubles du sommeil et des rythmes circadiens, ainsi que de divers troubles psychiatriques.
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