L’ÉPARGNE. La panacée de la croissance. Peu importe qui nous
sommes, l’idée de mettre de l’argent de côté en prévision
des temps difficiles est souvent ancrée au plus profond de nous depuis
l’enfance. Au cours des premières années de notre vie, la tirelire,
puis la caisse scolaire, étaient nos instruments d’épargne préférés.
Au fil du temps, nos besoins financiers ont changé, nous rejoignant dans
le cadre de notre vie au travail.
Afin de répondre à ces besoins, les institutions financières
offrent maintenant aux promoteurs de régimes de retraite, et aux participants
de ceux-ci, une plus grande sélection d’options de placement. De plus,
ces options de placement sont maintenant plus vastes compte tenu de l’abolition
de la règle sur les biens étrangers(RBÉ).
Désormais, le monde s’ouvre aux investisseurs canadiens lorsque vient
le temps de prendre des décisions en matière de placement. Ils
sont en mesure d’étendre leur horizon au-delà de la limite de
30 % établie par la RBÉ et peuvent répartir leur pécule
en vue de la retraite dans différentes options de placement afin de réduire
leur exposition aux fluctuations de l’économie canadienne. Mais voilà
où se trouve l’illusion.
Certains investisseurs, y compris des participants à des régimes
d’épargneretraite collective, croient à tort qu’ils atténuent
ainsi les risques liés à leurs placements, alors qu’ils font maintenant
face à des enjeux d’envergure internationale. On peut par exemple penser
aux poussées inflationnistes, aux variations de taux de change et aux
situations sociopolitiques en constante évolution.
La recherche de diversification s’impose. Ainsi, les promoteurs de régimes
et leurs conseillers doivent intensifier leurs efforts afin de faire savoir
aux participants que la nature des risques auxquels ils étaient exposés
a changé.
L’élimination de la RBÉ engendre deux défis importants
aux promoteurs en ce qui concerne leur obligation fiduciaire d’informer les
participants à leur régime de capitalisation au sujet de l’incidence
des risques potentiels qu’ils pourraient courir sans le savoir. Ces défis
tournent autour de la conception de nouveaux produits d’investissement et l’éducation.
L’industrie peut concevoir de nouveaux produits d’investissement permettant
de minimiser l’incidence des variables liées à ces risques de
placement internationaux. En fait, la plupart des promoteurs de régimes
à prestations déterminées ne veulent prendre que des risques
calculés et augmentent lentement le contenu étranger de leurs
portefeuilles avec l’aide de leurs conseillers et actuaires. L’élimination
de la RBÉ a peu d’incidence sur de nombreux promoteurs de régimes
importants, et ce, en raison des investissements alternatifs qu’ils ont utilisés
dans le passé. Cette industrie possède donc l’expérience
nécessaire quant à la conception de nouveaux produits et leur
utilisation.
Les participants ne bénéficient cependant pas de cette expérience.
Nombre d’entre eux pourraient déplacer aveuglément leurs épargnes
dans des fonds qui leur semblent performants afin de tenter de profiter des
succès des marchés internationaux et de réaliser leur rêve
de prendre leur retraite plus tôt que prévu. Nous ne devons pas
dissiper ce rêve, mais éduquer les participants pour qu’ils prennent
des décisions judicieuses.
Tous visent l’autonomie financière et la possibilité de réaliser
leurs rêves et il n’y a qu’une seule façon d’y arriver : épargner
suffisamment et efficacement.
Bien que le monde soit maintenant à leur portée, de nombreux
participants ne sont pas prêts à s’aventurer dans de nouvelles
contrées, car ils ne connaissent pas suffisamment les facteurs de l’économie
mondiale. Les promoteurs doivent absolument prendre le temps, avec l’aide de
leurs fournisseurs, de leur expliquer les risques que comportent leurs investissements,
y compris dans des fonds internationaux, tout comme le ferait un conseiller
financier.
La possibilité pour les participants d’investir dans l’univers des produits
de placement, de même que l’adoption des Lignes directrices sur les régimes
de capitalisation visant à assurer qu’ils obtiennent l’information et
les outils dont ils ont besoin pour prendre leurs décisions, causent
des inquiétudes. Comment ces gens feront-ils pour se tenir au courant
de tous les changements et de tous les renseignements disponibles au cours de
leur cycle d’épargne? Pourront-ils vraiment prendre des décisions
éclairées?
Quoique les promoteurs de régimes aient l’obligation fiduciaire de fournir
cette information aux participants, le fait d’inonder ceux-ci de documentation
ne leur permettra pas de s’assurer qu’ils comprennent les risques auxquels ils
s’exposent en augmentant le contenu étranger de leur portefeuille.
Évidemment, toute information d’ordre public doit être mise à
la disposition des participants. Cependant, la conception de certains régimes
et l’accès facile à l’information soulèvent la question
suivante : Qu’entend-on par « information suffisante »?
Les communications accrues entraînent-elles la prise de décisions
plus éclairées par les participants ou mènent-elles à
des choix mal fondés découlant de leur confusion?
En raison du contexte actuel de coûts élevés et d’abondance
de renseignements, les lignes directrices exigent aussi des promoteurs de régimes
qu’ils surveillent leurs fonds et gestionnaires de fonds afin de s’assurer de
communiquer et d’éduquer les participants de manière appropriée.
Afin d’aider les participants à s’y retrouver, les promoteurs de régimes
doivent, en collaboration avec leurs conseillers et fournisseurs, leur fournir
de l’information concise et un accès à divers outils de placement
qui répondent à leurs besoins et contribuent à l’atteinte
de leurs objectifs. On ne peut évidemment faire abstraction de la question
des coûts. Elle ne doit toutefois pas se transformer en une excuse pour
qu’aucun effort supplémentaire ne soit effectué.
Les solutions à cet égard vont de l’impartition de la gestion
du régime de capitalisation, qui peut comprendre l’éducation des
participants, à la mise en place de sites Internet et de centres d’information,
en passant par l’élaboration de questionnaires permettant aux participants
de déterminer leur profil d’investisseur et par la tenue de séances
régulières de formation et d’information. Le but est d’offrir
aux participants la possibilité de se tenir au courant des tendances
des marchés et de tous les changements importants survenant dans le domaine
des placements.
Les promoteurs de régimes doivent encourager les participants à
prendre le temps de déterminer leur profil d’investisseur et à
faire preuve d’un sentiment de propriété à l’égard
de leur stratégie, puisqu’ils sont responsables des décisions
relatives à leur régime d’épargneretraite collective.
Afin d’encadrer le mieux possible l’éducation des participants, les
conseillers et les promoteurs de régimes doivent:
- sélectionner avec soin un fournisseur qui se conforme aux lignes
directrices; - s’assurer que les participants ont accès à des outils faciles
à utiliser, comme des questionnaires portant sur les profils d’investisseur
ainsi que des portefeuilles de répartition de l’actif, qui simplifieront
leurs choix et le suivi de leur régime; - élaborer et mettre en oeuvre des programmes d’éducation qui
permettront aux participants de gérer leur régime d’épargne-retraite
collective et leurs autres placements; - adapter leurs stratégies de communication en se concentrant sur les
données démographiques et sociologiques des participants de
même que sur leur comportement; - choisir des options de placement qui comportent des niveaux de risque raisonnables
afin de satisfaire tant aux besoins des participants qui ont une tolérance
aux risques plus élevée que de ceux qui sont plus timides à
cet égard; - éduquer les participants au sujet des différents types de
risques, y compris les risques internationaux, afin de leur démontrer
que la répartition disproportionnée de leurs investissements
à l’extérieur du Canada ne leur procure pas une immunité
aux risques, mais les expose plutôt à des risques différents
qui pourraient être encore plus importants; - éviter de pénaliser les participants qui effectuent des transferts
entre fonds, pourvu qu’ils ne le fassent pas déraisonnablement. L’éducation
des participants devrait plutôt les convaincre de demeurer fidèles
à leur stratégie d’investissement à long terme; - fournir des renseignements continus aux participants et leur offrir des
services qui leur permettront de recevoir des conseils financiers.
Les régimes d’épargne-retraite collectifs offrent désormais
un univers de possibilités en terme d’instruments d’investissement, mais
que ces possibilités s’accompagnent toutefois d’un accroissement des
risques. Leur gestion constitue un défi que tous doivent relever. Nous
devons faire preuve de créativité, d’innovation et de rigueur
et adapter nos communications pour faire en sorte que chaque participant à
un régime d’épargne-retraite puisse bénéficier au
maximum de ce monde nouveau qui s’offre à lui.
MONIQUE TREMBLAY est première vice-présidente, Épargne
et Fonds distincts de Desjardins Sécurité financière.