La Banque du Canada dit observer des signes qui lui permettent de croire que certaines entreprises pourraient éprouver des difficultés à surmonter la crise économique liée à la pandémie de COVID-19.

La banque centrale a passé les deux derniers mois à prendre une série de décisions politiques qui l’ont vue réduire son taux d’intérêt directeur et se lancer dans un programme d’achat d’obligations sans précédent pour soutenir les flux du crédit.

Dans sa Revue du système financier publiée la semaine dernière, elle suggère que ces mesures ont contribué à atténuer les tensions de liquidité et à fournir un accès facile au crédit à court terme pour les entreprises et les ménages.

Mais la Banque du Canada a aussi averti que le problème de flux de trésorerie que connaissent certaines entreprises qui enregistrent une forte baisse de revenus pendant la crise pourrait bientôt devenir un problème de solvabilité.

L’examen du système financier du pays par la banque centrale révèle que les prix du marché font craindre une hausse probable des défauts de paiement.

Le rapport s’inquiète également du fait que le niveau d’endettement des ménages est susceptible d’augmenter et de devenir aigu pour les ménages dont les revenus ne se remettent pas complètement de la pandémie.

« Lorsque la crise sanitaire mondiale a commencé, nous disposions d’une économie vigoureuse et d’un système financier résilient », a affirmé le gouverneur de la banque, Stephen Poloz, dans le rapport.

« Mais nous savons que le niveau d’endettement va augmenter, de sorte que la bonne combinaison de politiques économiques est également importante. »

Mis à part une aide fédérale directe qui approche maintenant des 150 G$, la banque centrale a fait passer son taux d’intérêt directeur de 1,75 % à 0,25 % au cours du seul mois de mars.

Elle a également acheté des obligations fédérales pour fournir un financement à faible coût à Ottawa, afin de couvrir un pic massif de dépenses.

Le bilan de la banque a plus que triplé pour atteindre 392 G$ depuis le début mars, dans le cadre d’une expansion plus importante et plus rapide que lors de la crise financière de 2008 et 2009, lorsque son bilan avait augmenté de 50 %.

Mais plus le choc économique de la COVID-19 perdure, plus il augmente les risques d’insolvabilité des consommateurs, selon la banque centrale.

Le nombre de ménages vulnérables, ceux qui consacrent plus de 40 % de leurs revenus au paiement de leur dette, « affichera vraisemblablement une hausse », selon la banque. Les retards sur les remboursements de prêts risquent ainsi d’augmenter, même avec les reports de six mois sur les paiements hypothécaires accordés à quelque 700 000 ménages jusqu’à présent.

L’examen de la banque centrale suggère également que les institutions financières pourraient être beaucoup moins capables de réagir et de contenir les cybermenaces alors que de nombreux employés travaillent à domicile.

« On observe un plus grand nombre d’attaques d’hameçonnage et d’attaques au moyen de maliciels visant à tirer avantage de l’augmentation du travail à distance et de l’appétit du public pour l’information sur la COVID-19 », a précisé la banque centrale dans son rapport.

« Les cybercriminels profitent aussi de l’intérêt que suscitent les nouveaux programmes de soutien gouvernementaux pour attirer les usagers sur des sites web malveillants. »

Ottawa prolonge et assouplit la subventions salariale d’urgence

Ottawa prend les grands moyens pour convaincre les employeurs d’utiliser la Subvention salariale d’urgence du Canada (SSUC).

Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé vendredi que la SSUC sera prolongée jusqu’à la fin du mois d’août et qu’il y aura des assouplissements pour que davantage d’employeurs y adhèrent. Un plus grand nombre d’entreprises peuvent déjà postuler dès maintenant.

« On doit s’assurer que ce programme continue d’aider les gens, qu’il encourage les employeurs à réembaucher leurs employés et à élargir leurs heures d’activités autant que possible », a-t-il dit.

« Au cours du prochain mois, on va travailler avec les représentants des entreprises et des travailleurs pour effectuer des ajustements nécessaires », a ajouté M. Trudeau, notant que le critère d’admissibilité pour la baisse de revenus de 30 % pourrait être revu.

En attendant ces ajustements de concert avec l’industrie, le ministre des Finances a annoncé que davantage d’employeurs sont maintenant admissibles à la subvention salariale.

Bill Morneau dit que la SSUC s’étend aux associations de sport amateur, aux organisations journalistiques enregistrées et aux écoles et collèges non publics, incluant ceux qui offrent une formation spécifique comme l’apprentissage des langues ou la conduite automobile. Ces changements entrent en vigueur immédiatement.

Le gouvernement fédéral compte également proposer des modifications législatives à la SSUC afin d’y inclure entre autres les travailleurs saisonniers, a précisé le ministre Morneau.

La subvention salariale devait initialement prendre fin au début du mois de juin. Elle sera prolongée de 12 semaines, jusqu’au 29 août.

Le milieu des affaires a salué la prolongation du programme et exigé de revoir le critère du 30 % minimum exigé pour prouver une perte de revenus.

Dans une déclaration, la Chambre de commerce du Canada a dit que de nombreuses entreprises ne se qualifient pas pour ce programme en raison de ce critère précisément. C’est ce qui explique « le peu d’intérêt » à l’endroit de la SSUC présentement, selon la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante.

M. Trudeau dit qu’il veut éviter de compromettre la relance économique en raison de quelques critères.

« Nous ne voudrions pas que les gens qui recommencent à faire des affaires sentent qu’ils doivent s’empêcher de croître, de prendre de l’expansion, de réembaucher pour continuer de bénéficier de la subvention salariale. Alors nous allons travailler avec l’industrie, avec les syndicats et les intervenants clés pour s’assurer qu’on fait bien les choses », a-t-il expliqué, en anglais.