DE PLUS EN PLUS d’employeurs reconnaissent la pertinence d’investir
dans un programme visant à favoriser la santé et le mieuxêtre
de leurs employés. Quelles sont les conditions requises pour qu’un
tel programme ait un réel impact positif, sur les individus et sur l’entreprise?

Dépression, burnout, maladies cardiovasculaires, cancers: ces maladies
figurent en tête de liste des problèmes de santé qui affectent
la population, chez nous comme dans la majorité des pays industrialisés.
Nos habitudes de vie de même que l’environnement physique, psychologique
et social dans lequel nous évoluons sont en grande partie responsables
de leur incidence grandissante.

Leurs conséquences, éprouvantes pour les personnes touchées,
ont aussi des répercussions sur d’autres plans dans la société,
notamment dans les entreprises : absentéisme élevé, hausse
des primes d’invalidité, etc. D’où l’intérêt
des employeurs pour l’instauration de programmes de promotion de la santé
et du mieux-être en milieu de travail dans le but de réduire les
coûts humains et financiers qui découlent de ces maladies caractéristiques
de notre époque.

Pourquoi les employeurs devraientils se préoccuper
de santé ?

Comme nous le mentionnions dans un article précédent, de nombreuses
études démontrent que les retombées des programmes de promotion
de la santé et du mieux-être en milieu de travail sont des plus
positives, tant pour les entreprises qui les mettent en place que pour les employés
qui en bénéficient.

Les organisations qui choisissent d’investir dans ces approches peuvent
constater en effet un accroissement de la motivation et de la satisfaction de
leurs travailleurs, une augmentation de la productivité, une diminution
des taux de roulement et d’absentéisme et encore une réduction
des coûts d’invalidité.

Les programmes de promotion de la santé et du mieux-être ont généralement
pour but de sensibiliser les individus aux facteurs qui ont une influence déterminante
sur leur santé et de les aider à déterminer des stratégies
pour diminuer leurs risques d’être atteints de maladies et de vivre
un déséquilibre. Ils permettent également d’aider
les décideurs à mettre en place un environnement de travail qui
favorise un mode de vie sain et à éliminer les facteurs organisationnels
nuisibles pour la santé.

Les clés du succès
Plus d’une douzaine de facteurs doivent être pris en considération
pour s’assurer qu’un programme de santé et de mieux-être
en entreprise aura un impact significatif et durable.

Une telle initiative requiert le soutien et l’engagement de la haute
direction. Dans la mesure où les décideurs croient fermement que
le capital humain est la pierre angulaire de leur entreprise, et qu’ils
sont convaincus que la santé de cette dernière et celle des employés
vont de pair, un programme est en bonne position pour atteindre ses objectifs.

Les FACTEURS DE SUCCÈS
d’un programme de Mieux-être

  • Obtenir le soutien et l’engagement de la haute direction
  • Intégrer la promotion de la santé à la vision
    stratégique de l’organisation
  • Obtenir l’engagement des représentants syndicaux
  • Montrer au personnel sa volonté de lui offrir un milieu de
    travail sain
  • Présenter le programme à des groupes complets d’employés
  • Créer un programme en se basant sur une approche globale de
    la santé
  • Établir un programme en s’appuyant sur les meilleures
    pratiques en matière de santé
  • Favoriser la participation volontaire au programme
  • Privilégier une approche personnalisée
  • Miser sur une approche soutenue dans le temps afin d’initier
    un passage à l’action chez les participants
  • Garantir la confidentialité des renseignements recueillis sur
    les participants
  • Avoir accès à des données d’ensemble afin
    d’y tracer un profil collectif
  • Mettre en place des interventions de groupe qui suscitent un sentiment
    d’appartenance
  • Prévoir des mécanismes pour mesurer la satisfaction
    des employés envers le programme et l’impact des interventions

Les chances d’obtenir des résultats significatifs sont aussi maximisées
lorsque la démarche de promotion de la santé est bien intégrée
à la vie de l’organisation et que les objectifs du programme sont
compatibles avec les objectifs de l’entreprise de même qu’avec
sa vision stratégique. Des mesures telle la participation régulière
des gestionnaires, la mise en place d’un réseau d’ambassadeurs
ou l’établissement d’un plan de communication facilitent
et reflètent cette nécessaire cohérence.

Dans le contexte où les travailleurs visés par le programme sont
syndiqués, l’engagement des représentants syndicaux peut
s’avérer également une condition favorable, voire essentielle,
au succès de la démarche.

Dès le début et tout au long du processus, l’employeur
doit montrer à son personnel sa volonté de lui offrir un milieu
de travail sain et un environnement qui lui facilite l’acquisition et
le maintien de saines habitudes de vie.

On a tout intérêt à proposer le programme à des
groupes complets d’employés, en évitant de viser seulement
les personnes qui présentent un profil de santé spécifique
(par exemple, les gens malades ou ceux qui affichent certains risques de souffrir
de maladies). Cette approche non discriminatoire permet, d’une part, de
joindre les personnes qui ont plus de risques d’être aux prises
avec certains problèmes de santé sans qu’elles ne se sentent
stigmatisées et, d’autre part, d’encourager celles qui présentent
déjà un profil de santé positif à maintenir leurs
saines habitudes de vie.

Selon une étude réalisée en 2002- 2003 par Watson Wyatt
auprès de 180 entreprises canadiennes, les problèmes psychologiques
sont à l’origine de 79 % des absences de courte durée et
de 73 % des absences de longue durée. Dans un tel contexte, un programme
de promotion de la santé et du mieux-être en milieu de travail
ne saurait être complet sans reposer sur une approche globale de la santé,
c’est-à-dire une approche dans laquelle la santé psychologique
est prise en compte au même titre que la santé physique.

Les gestionnaires doivent être bien avisés qu’ils optent
pour un programme élaboré par des professionnels compétents
dont la démarche et le matériel sont basés sur des connaissances
scientifiques rigoureuses et sur les meilleures pratiques dans le domaine de
la promotion de la santé en milieu de travail.

Prendre en main sa santé est avant tout une responsabilité et
un choix personnels, d’où l’importance de faire en sorte
que la participation au programme demeure volontaire. Les employés sont
plus enclins à saisir cette occasion privilégiée de faire
le point sur leur santé s’ils ont la possibilité de négocier
un virage santé à leur rythme et dans un climat positif.

Une approche personnalisée, incluant des outils pour amener chaque participant
à évaluer ses propres risques d’être frappé
de maladies et ses habitudes de vie, permet d’adapter les recommandations
au profil de santé de chacun.

Pour favoriser un impact à long terme, on a avantage à miser
sur une intervention soutenue dans le temps afin d’initier un passage
à l’action chez les participants, puis à les accompagner
dans leur démarche de modification de comportements.

Tout programme de santé et mieuxêtre en entreprise doit formellement
garantir la confidentialité des renseignements recueillis durant la démarche.

Tout en respectant la confidentialité, il est nécessaire que
l’employeur ait accès à des données d’ensemble
traçant un profil collectif afin d’être en mesure de déterminer
des pistes d’action pour favoriser le mieux-être et la santé
de ses employés.

En plus des composantes individuelles du programme, des interventions de groupe
agissent favorablement sur le milieu de travail en suscitant un sentiment d’appartenance
et en ayant un effet mobilisateur.

Il est nécessaire de prévoir des mécanismes pour mesurer
la satisfaction des employés envers le programme et pour évaluer
l’impact de l’intervention, tant sur le plan du profil santé
des employés que des retombées pour l’organisation(amélioration
de la santé des employés, diminution de l’absentéisme,
hausse de la productivité, baisse des réclamations, etc.). Des
résultats quantifiés sont souhaitables, bien que les données
qualitatives puissent également contribuer à l’évaluation
d’ensemble.

Des résultats concluants chez VISA Desjardins

Un programme de santé et mieux-être respectant ces facteurs de
succès a été implanté au sein de VISA Desjardins.
La première phase de ce programme s’est déroulée
sur une période de trois ans, soit de 2001 à 2004.

Une étude réalisée au terme de ces trois années
par des chercheurs de la Direction de santé publique de Montréal
et de l’Institut de Cardiologie de Montréal, parrainés par
l’Institut national de santé publique du Québec, démontre
que le programme a eu un impact concluant pour VISA Desjardins et ses employés
participants(70 % des employés).

La proportion de participants qui obtiennent une note de 75% et plus quant
à leur « Score santé » a doublé, passant de
18% en 2001 à 36% en 2004. Cette mesure permet au participant d’évaluer
où il se situe par rapport à divers paramètres de santé
(activité physique, alimentation, poids, tabagisme, alcool, médicaments,
stress et bien-être, etc.). Enfin, 25 % des fumeurs ont cessé de
fumer.

On note une augmentation de 65 % du nombre de participants dans la catégorie
de ceux qui pratiquent au moins 30 minutes d’activité physique
cinq jours ou plus par semaine et une augmentation de 44 % dans la catégorie
de ceux qui pratiquent au moins 30 minutes d’activité physique
trois ou quatre jours par semaine.

On remarque une augmentation de 57 % dans la catégorie de ceux qui consomment
cinq portions ou plus de fruits et légumes par jour.

L’étude révèle également que le programme
remplit bien un de ses principaux objectifs, soit de favoriser le passage à
l’action des employés pour obtenir une meilleure santé :

81% des participants se sentent davantage capables de prendre
leur santé en main.
86% disent en savoir plus à propos de leur santé.
80% estiment que le programme les a encouragés à
faire des changements dans leurs habitudes de vie.

L’entreprise a par ailleurs vu son taux d’absentéisme diminuer
de 28% et son taux de roulement annuel diminuer de 54 %. Ces résultats
positifs ont été engendrés à la fois par des changements
organisationnels et par l’implantation d’un bon programme Santé
mieux-être.

Cette expérience, comme plusieurs autres, invite à l’optimisme.
Grâce à ce type de programmes, des personnes voient leur santé
et leur qualité de vie s’améliorer. Et même si ce
ne sont souvent que des raisons économiques qui les motivent au départ,
des organisations améliorent leur performance tout en acquérant
dans l’aventure un visage plus humain. Au bout du compte, tous en sortent
gagnants.

EMMANUELLE GAUDETTE est chef de programmes, Services aux entreprises, chez
ACTI-MENU, à Montréal.