
A fin d’éviter d’en faire des fourre-tout inutiles, les programmes de mieux-être doivent respecter plusieurs conditions avant, pendant et après leur mise en place. Que devraient-ils offrir ? Dans quel but ? Comment assurer leur efficacité ? Tant de questions auxquelles il faut être en mesure de répondre pour que ces programmes soient réellement efficaces, voire indispensables.
« Depuis une dizaine d’années, mais surtout depuis la pandémie, les employeurs ont commencé à élargir l’aide offerte à leurs employés, en mettant en place des solutions plus préventives ou en épaulant les travailleurs dans toutes les situations de leur vie, que ce soit en santé physique ou émotionnelle, évidemment, mais aussi d’un point de vue financier, social ou familial », souligne Alix Daigle, conseiller principal en assurance collective chez Mercer.
Dès lors, les programmes de mieux- être sont venus s’ajouter aux programmes d’assurance collective traditionnels pour offrir du soutien aux employés sur la nutrition, la fertilité, la ménopause, les besoins légaux ou financiers, etc. « Ce sont des programmes qui proposent un ensemble de pratiques visant la santé globale des employés dans une organisation », explique Brigitte Marcoux, directrice, excellence des pratiques et accompagnement, santé organisationnelle à Beneva.
« Il fut un temps où les activités de santé mieux-être étaient un peu comme la cerise sur le sundae, une récompense, un ajout, une composante pour faire plaisir aux employés. Mais c’est bien plus que cela ! »
– Brigitte Marcoux, Beneva
« Il fut un temps où les activités de santé mieux- être étaient un peu comme la cerise sur le sundae, une récompense, un ajout, une composante pour faire plaisir aux employés, ajoute- t-elle. Mais c’est bien plus que cela ! Chez Beneva, on parle davantage de santé organisationnelle que de santé et mieux- être parce que les programmes de santé et mieux- être doivent avoir un impact sur la santé de l’organisation. »
84 %
Proportion des employés qui disent s’attendre à ce que leur employeur soutienne leur santé et leur mieux-être au-delà de l’offre d’un régime d’avantages sociaux traditionnel
29 %
Pourcentage d’employés qui estiment qu’un programme officiel de mieux-être fait partie des trois plus importantes mesures que les employeurs peuvent mettre en place pour soutenir leur santé et leur mieux-être
79 %
Proportion d’employeurs qui prévoient de consacrer du financement ou du personnel supplémentaire à au moins un domaine du mieux-être
Source : Sondage Benefits Canada sur les soins de santé 2025
Quelles sont les solutions gagnantes ?
Voilà la question que tout employeur peut se poser quand vient le temps de choisir quoi insérer dans son programme de mieux- être. Toutefois, la réponse diffère d’un milieu à un autre. « Les activités qui vont découler du programme vont être spécifiques au milieu de travail, précise Brigitte Marcoux.
« Les programmes de mieux- être appartiennent aux entreprises, ajoute Martin Nadon, directeur principal, développement de produits et formation chez Desjardins Assurances. Donc, chaque entreprise doit avoir son propre programme. »
Il est essentiel pour les employeurs de bien connaître leur population pour déterminer les solutions incontournables à intégrer dans un programme de mieux- être. « La plupart des solutions qui existent sur le marché peuvent être utiles, mentionne Alix Daigle. L’important est vraiment de comprendre les besoins de ses employés pour mettre en place des mesures ou des actions qui vont être ciblées à sa propre population. »
Les choix de solutions devront s’appuyer sur des indicateurs clés et des objectifs qui s’y rattachent. « Ces indicateurs, dans nos organisations, peuvent être le taux d’absentéisme, les motifs d’absence, les taux d’invalidité, la durée des invalidités, etc., énumère Brigitte Marcoux. Ils permettront de déterminer des objectifs précis favorisant la santé globale de l’organisation. »
« Est- ce que l’objectif, par exemple, est d’atteindre un taux de participation particulier à certaines activités ? demande Martin Nadon. Est- ce que c’est de réduire l’absentéisme ? Cela peut également être d’augmenter l’engagement et la satisfaction des employés, ce qui pourra se mesurer par différents sondages. »
Il est également important, en parallèle, de sonder l’intérêt des employés. « Pour qu’un programme soit efficace, il doit d’abord cibler les besoins des employés, donc être personnalisable », insiste Alix Daigle.
Parmi les éléments incontournables, Brigitte Marcoux identifie les services en lien avec la santé mentale et les services de soins de santé virtuels. « Tout ce qui permet aux employés d’avoir une meilleure accessibilité à des soins en cas de besoin, c’est très important », dit- elle.
Il faudra néanmoins s’assurer que l’offre du programme de mieux- être complète celle d’un programme d’aide aux employés (PAE) déjà existant. « Quand on travaille avec nos clients, on commence par recenser ce qu’ils ont déjà dans leur régime d’assurance collective, explique Brigitte Marcoux. On leur demande s’ils ont un PAE, s’ils offrent de la télémédecine, s’ils remboursent les soins de santé mentale, etc. Parfois, ces services existent déjà dans le régime d’assurance collective, mais les gens ne sont pas nécessairement au courant qu’ils y ont accès. Donc le programme de mieux- être est un bon vecteur pour venir communiquer les services qui sont déjà en place. »
Le choix parmi une vaste gamme de solutions devra donc se faire en fonction d’objectifs clairs et de besoins exprimés par les employés. « Il faut faire attention à ne pas vouloir se diriger trop rapidement vers une solution sans avoir fait tout le travail préalable de s’assurer qu’on a une stratégie, qu’on a un objectif à atteindre et que l’on connaît les facteurs de risque », résume Martin Nadon.
« Il faut faire attention à ne pas vouloir se diriger trop rapidement vers une solution sans avoir fait tout le travail préalable de s’assurer qu’on a une stratégie, qu’on a un objectif à atteindre et que l’on connaît les facteurs de risque. »
– Martin Nadon, Desjardins Assurances
Les clés du succès
Une fois le programme de mieux- être mis en place, quelques conseils judicieux favoriseront son succès. Le premier sera d’assurer une bonne communication. « Le programme doit être accompagné d’une communication régulière, insiste Martin Nadon. Il faut s’assurer qu’il est mis de l’avant en continu pour le faire vivre. »
Alix Daigle ajoute qu’une mauvaise communication peut affecter négativement l’efficacité d’un programme. « On peut avoir le meilleur programme pour ses employés, s’il est mal ou trop peu communiqué, c’est un coup d’épée dans l’eau ! », dit- il. Un sondage mené par Mercer en 2025 a d’ailleurs permis de constater des écarts flagrants entre ce qui était offert par les employeurs et la perception des employés. « Par exemple, 27 % des employés affirmaient avoir accès à des services de télémédecine, alors que 69 % des employeurs nous confirmaient l’offrir, indique Alix Daigle. Ça montre vraiment une inefficacité dans la communication de l’offre aux employés. »
La mise en place d’un comité de santé, de porte- paroles ou de « champions » figure également parmi les mesures qui favoriseront la communication du programme et son succès. « Un comité de santé peut se réunir tous les trois mois et regarder les résultats des activités, entendre les besoins et les intérêts des employés, dresser un plan d’action précis avec des échéanciers, explique Brigitte Marcoux. Le comité devra faire des constats et des recommandations qui devront remonter à la direction. Il devra aussi sonder l’appréciation des activités. »
L’engagement de la haute direction est un autre élément clé. « Si elle n’est pas convaincue du bien- fondé de la démarche, on pédalera dans le vide ! indique Brigitte Marcoux. Le soutien de la direction peut prendre la forme d’une politique pour la santé et le mieux- être en milieu de travail, assorti d’un budget opérationnel. On va aussi accorder du temps et des ressources matérielles à nos équipes de santé et leur permettre de se réunir sur les heures de travail. Il faudra également que la haute direction soit présente lors d’activités. »
Martin Nadon croit qu’il ne faut pas négliger les incitatifs. « Cela peut être des tirages, de la reconnaissance, précise- t-il. Il y a plusieurs façons de rejoindre les gens. Il faut créer une culture avec des ambassadeurs, des communications, l’implication de la haute direction afin que cette culture ne soit pas ressentie comme une obligation ou une contrainte. »
Exemples de mesures pouvant être mises en place dans le cadre d’un programme de mieux-être
• Programme de mise en forme (gym, cours de groupe)
• Installation de vestiaires et douches
• Poste de travail roulant
• Cours de cuisine et activités culinaires
• Collations santé, paniers bio, potagers urbains
• Programme pour cesser de fumer
• Programme de prévention des maux de dos
• Matériel ergonomique (bureau pour travailler debout)
• Programme de sensibilisation sur la gestion du stress
• Politiques de droit à la déconnexion
• Programme de mieux-être financier
• Programme de « don » de vacances
• Facilitation du transport collectif
• Programme d’accès à des services à taux avantageux (ménage, aide à domicile, nettoyeur, etc.)
• Accès aux soins de santé Virtuels
Source : Ordre des CRHA
Un succès difficile à mesurer
« La question de la rentabilité de l’investissement nous est toujours adressée ! s’exclame Brigitte Marcoux. Il y a beaucoup de littérature sur le sujet. On dit souvent qu’un dollar investi rapporte en moyenne de trois à cinq dollars. Mais on sait que dans la vraie vie, un employeur veut ses chiffres à lui. »
Tous les assureurs s’entendent pour dire que le rendement du capital investi se mesure à partir des objectifs de départ. « En fonction des objectifs propres à son programme de mieux- être, on va se doter d’indicateurs précis, explique Martin Nadon. Il est important d’avoir à la fois des indicateurs qualitatifs et des indicateurs quantitatifs afin d’obtenir un portrait global qui ne soit pas uniquement chiffré. Le volet qualitatif permet de démontrer l’engagement, l’appréciation. »
« On peut avoir le meilleur programme pour ses employés, s’il est mal ou trop peu communiqué, c’est un coup d’épée dans l’eau ! »
– Alix Daigle, Mercer
Brigitte Marcoux aime dire que la rentabilité importe moins que la santé des employés. « En 2025, on ne devrait plus se demander si ça va rapporter deux dollars ou un dollar, dit- elle. S’occuper de la santé de nos employés, c’est venir démontrer que l’on accorde de la valeur à nos gens. C’est venir leur démontrer aussi qu’on veut les garder chez nous et qu’on veut attirer de nouvelles personnes. Ces programmes sont des leviers à l’attraction de la main- d’oeuvre et à la réduction du taux de roulement. »
Ce texte a été publié dans l’édition de septembre-octobre 2025 du magazine Avantages. Vous pouvez également consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.