Devant la montée des enjeux de pénurie et de rétention de ­main-d’œuvre, des problèmes de santé physique et psychologique et des conséquences humaines et financières y étant associées, nombreuses sont les organisations qui investissent désormais dans des mesures visant à prendre en considération la santé mentale, le ­bien-être et la qualité de vie au travail. La question que plusieurs entreprises se posent est : « ­Comment ­peut-on mesurer les retombées de nos investissements en santé mentale et ­bien-être au travail ? ­Comment s’y prendre ? ».

Commençons par nommer un piège auquel il est facile de se laisser prendre : faire un « ­copier-coller » des indicateurs ou tableaux de bord d’autres entreprises. Certains indicateurs sont universels, certes, mais la plupart ont besoin d’être identifiés de manière personnalisée à l’entreprise. Il n’existe pas de recette unique pour évaluer la portée des outils en santé mentale et ­bien-être au travail.

Alors, comment y arriver ? ­La première étape est de bien comprendre et analyser le contexte d’entreprise, les objectifs pour les prochaines années, les défis, les ressources en place, etc. Formaliser ainsi le cadre stratégique guidera le choix des indicateurs et déterminera là où les initiatives en santé mentale et ­bien-être pourront apporter leur contribution. Ce travail d’analyse permettra d’éviter plusieurs erreurs et d’être sur la bonne voie pour élaborer une démarche personnalisée reflétant l’ADN de l’entreprise.

Quel autre élément mettre en place afin de bien réaliser cette première étape ? ­Identifier et impliquer les parties prenantes internes et externes pertinentes à la démarche et ouvrir le dialogue concernant leurs besoins et leurs attentes. Que ces parties prenantes soient des utilisatrices d’un éventuel tableau de bord (haute direction, conseil d’administration, gestionnaires, syndicats) ou contributrices d’informations (fournisseurs de services, assureurs, mutuelles ou encore des sources de données internes), elles doivent être mobilisées à différents stades de la démarche.

La deuxième étape consiste à réaliser un portrait, ou diagnostic, de l’entreprise dans le but de déterminer les objectifs à poursuivre et, subséquemment, d’établir un plan d’action et identifier les indicateurs qui y seront reliés. Ce diagnostic doit à la fois refléter la globalité de l’organisation et son caractère local selon son ADN ou sa structure. Le diagnostic est ainsi lié au plan stratégique et favorise un dialogue avec la haute direction. Ce diagnostic permettra d’obtenir un portait représentatif de l’unicité de l’entreprise. L’exactitude du diagnostic nécessitera non seulement de consulter les bases de données ­RH et parties prenantes contributrices, mais aussi de sonder les employés et gestionnaires pour connaître leur perception de certains aspects de la santé et du ­bien-être, par exemple la santé mentale, les pratiques de gestion et le climat de travail.

Il est maintenant temps d’agir, c’­est-à-dire déployer les moyens priorisés à la suite du diagnostic. Une erreur commune à cette troisième étape ? ­Se pencher sur trop de priorités à la fois ! ­Il est préférable d’en cibler deux ou trois et de s’attaquer à ­celles-ci, selon des échéanciers réalistes. Pendant le déploiement, il faudra mesurer les actions en continu. Il importe de privilégier des indicateurs ­au-delà des taux de participation et satisfaction pour mieux savoir si les moyens mis en place génèrent les effets escomptés. Par exemple : vérifier l’acquisition et l’application des connaissances quelques mois après une formation donnée aux gestionnaires. Les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes ? ­Il s’agira alors d’ajuster les initiatives pendant le processus.

Évaluer les interventions en santé mentale ou ­bien-être au travail à chaque année ou aux deux ans est important. Cette quatrième étape permettra d’agir de façon proactive, d’ajuster les actions au besoin et de favoriser des répercussions positives sur les indicateurs organisationnels à plus long terme. Comment faire ? ­Sonder les employés et gestionnaires, avec les mêmes méthodes que celles utilisées à la deuxième étape et documenter les variations des indicateurs selon leur perception.

C’est seulement après trois, quatre, voire cinq ans qu’il sera réalistement possible d’apprécier la réelle incidence de la démarche sur les indicateurs et la performance organisationnels, plus particulièrement sur la rentabilité de l’investissement. À cette cinquième étape, ce sont les indicateurs organisationnels qu’il faudra mesurer en consultant les bases de données ­RH et les informations provenant des parties prenantes contributrices.

Et ensuite ? ­Le cycle recommence, tel un cycle d’amélioration continue.


• Ce texte a été publié dans l’édition de novembre 2022 du magazine Avantages.
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