Les caisses de retraite de toutes tailles s’intéressent de plus en plus à l’infrastructure comme catégorie d’actifs. Le profil risque-rendement attrayant, le fait que les projets d’infrastructure génèrent des flux de trésorerie stables de qualité, leurs caractéristiques défensives et le fait qu’une faible corrélation soit observée avec les autres catégories d’actifs offrent des avantages de diversification indéniables. Les régimes de retraite ont également réalisé que les infrastructures de longue durée pouvaient avoir une utilité certaine dans une stratégie globale d’appariement de leurs obligations.

Les infrastructures vieillissantes, la croissance de la population, l’évolution de la technologie et la transition énergétique découlant notamment de la lutte aux changements climatiques sont des facteurs qui laissent entrevoir une croissance et un développement continu de cette catégorie d’actifs.

Rappelons que le ­Plan québécois des infrastructures 2021‑2031 se chiffre à 135 G$ et celui du ­Canada à près de 200 G$ (d’ici 2028). Selon le ­Global ­Infrastructure ­Hub (une initiative du ­G20), il faudrait investir près de 100 000 G$ ­US en infrastructures d’ici 2040 dans plus de cinquante pays.

Une évolution importante du domaine

L’infrastructure déborde maintenant largement des projets traditionnels tels les ponts, les routes et la production d’énergie électrique. Au fil des ans, se sont ajoutés les réseaux de transport en commun rapide, les aéroports, les réseaux de distribution électriques, les ports et les hôpitaux. Certains fonds investissent maintenant dans les logements ou le transport pour étudiants, les résidences pour aînés, dans la connectivité à l’internet mobile avec débit accru (5G) et son accessibilité en région, les centres de données, etc.

Infrastructures et cycle économique

Le secteur des infrastructures profite normalement de la croissance économique, alors qu’il s’avère résilient en présence de ralentissement économique. En effet, plusieurs des investissements produisent un flux de revenus à partir d’actifs stables à moindre risque. Fait également important, les projets comprennent souvent un mécanisme de rajustement à la hausse de leur revenu en fonction de l’inflation.

Les projets d’infrastructure sont majoritairement financés par l’émission de dette, et une hausse des taux d’intérêt peut donc rendre plus difficiles les conditions financières. Dans ce cas, il convient alors d’analyser la structure du capital et la sensibilité du rendement possible de chaque projet.

Un outil de diversification

La diversification réelle découlant de l’utilisation de cette catégorie d’actifs dépendra en fin de compte des investissements effectués. Comme tous les types de placements, les projets d’infrastructure sont soumis à une grande variété de risques. Il y a les projets composés d’actifs existants qui rapportent déjà des flux stables de trésorerie, ou encore la production d’énergie électrique traditionnelle dans les économies développées (meilleur contrôle des coûts et cadre réglementaire strict). À l’autre extrémité se trouvent les nouveaux projets dans les économies émergentes, où les risques de construction, de contrat, politiques et de devise sont omniprésents. Tous ces éléments entraînent une volatilité plus grande des rendements prévus.

Comment y investir ?

Les options d’investissement dans les infrastructures comprennent les actions et les fonds.

Un comité de retraite peut investir au moyen d’une exposition aux titres d’infrastructures listés, qui ont l’avantage de se négocier sur les marchés boursiers et d’être liquides. En revanche, certaines études, notamment le ­Listed ­Infrastructure ­Proxy de ­EDHECinfra, tendent à démontrer que cette approche ne permet pas d’améliorer la relation ­risque-rendement et concluent que « l’infrastructure répertoriée » est déjà couverte par les catégories d’actifs existantes.

L’avantage le plus important des fonds est la grande capacité de diversification dans l’ensemble des secteurs, des régions géographiques et par style de gestion. De plus, même au sein des actifs d’infrastructure, les taux de croissance des flux de trésorerie ne sont que légèrement corrélés, ce qui signifie qu’un portefeuille constitué de ces actifs profiterait grandement des avantages de la diversification. Toutefois, une corrélation relativement élevée est observée entre les routes à péage, les aéroports et les ports.

Les gestionnaires de fonds ont normalement une expertise plus pointue dans un secteur en particulier dans lequel ils évaluent chacun des projets ainsi que les risques politiques, réglementaires et de change qui y sont associés.

Les comités de retraite à l’heure des choix

Dans le cadre de son rôle fiduciaire et de son désir d’exposer la caisse de retraite à l’infrastructure, un comité de retraite est appelé à prendre des décisions qui, souvent, sans qu’il en soit pleinement conscient, comportent des risques inhérents.

En effet, les risques relatifs au choix du gestionnaire et de sa spécialité sont non négligeables, particulièrement dans le contexte d’un investissement à long terme. De façon globale, en 2020, les infrastructures ont démontré une bonne résilience, mais ce n’est pas nécessairement le cas pour toutes les catégories qui la composent (par exemple, le secteur des aéroports et des transports a durement souffert en 2020).

Un comité doit donc faire preuve de prudence, car souvent son choix de gestionnaire sera assimilé au choix d’une stratégie sectorielle, pour lequel il en assumera l’imputabilité. De façon imagée, cette approche s’apparente à faire des études et analyses amenant le comité à décider d’investir dans les marchés boursiers mondiaux. Cependant, pour donner suite à cette décision, le comité accorderait plutôt un mandat de gestion spécialisée à un gestionnaire qui ne couvrirait dans les faits qu’un ou deux secteurs d’investissement.

Soulignons également que, contrairement aux catégories d’actifs traditionnelles, le comité ne pourra changer de gestionnaire à moins qu’il ne vende sa participation au fonds par l’entremise du marché secondaire. Il est de plus difficile pour un petit investisseur d’exercer une influence réelle sur les visions ­ESG du gestionnaire. Un seul projet problématique pourrait contaminer l’ensemble du fonds à cet égard.

En conclusion, le secteur des infrastructures constitue une occasion d’investissement très intéressante pour les caisses de retraite. Cependant, une bonne compréhension des divers enjeux est de mise, et le comité doit s’assurer d’une saine diversification de ses placements.

À cette fin, une approche qui devrait être considérée est celle relative à l’utilisation d’un fonds de fonds régi par une politique de placement responsable et diversifiée, dont un exemple est détaillé plus bas.

Selon cette approche, non seulement la diversification sectorielle, géographique, par projet et stade de l’investissement, par style et par type de gestion sera présente, mais s’ajoutera également une réduction marquée du risque associé au choix du gestionnaire.

Ainsi, le comité de retraite bénéficiera d’une exposition globale aux principaux ­sous-secteurs de l’infrastructure tout en s’assurant de bien diversifier tous les risques, ce qui, finalement, répondra aux objectifs. De plus, les gestionnaires qui offrent des fonds de fonds sont de grande envergure et font profiter leurs clients d’escomptes négociés avec les fonds ­sous-jacents, permettant donc aux caisses de retraite de diversifier cette catégorie d’actifs à moindre coût tout en tirant parti de leur expertise avancée en la matière.

Ventilation de la stratégie d’investissement pour un portefeuille d’infrastructures équilibré et diversifié avec des fonds primaires, secondaires, des fonds à capital variable et des co-investissements


• Ce texte a été publié dans l’édition de novembre 2021 du magazine Avantages.
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