Sur les marchés émergents, les fluctuations des taux de change et des prix des marchandises, de pair avec l’incertitude politique, peuvent constituer des barrières à l’entrée et rebuter bien des investisseurs.

D’ailleurs, si l’on remonte jusqu’en 2012, on constate que la dépréciation des monnaies et la baisse des prix des marchandises ont particulièrement réduit l’attrait des marchés émergents en tant que source de rendements fiables.

Si certains reculent devant cette incertitude, ­peut-être avec raison, les tenants de la gestion active s’efforcent plutôt d’en profiter et de saisir les occasions issues de situations difficiles, ce qui leur réussit très bien.

En restant en tout temps fidèles à une philosophie de placement axée sur la « prudence patiente » au travers des aléas des cycles de marché, on peut arriver à générer des rendements annuels supérieurs à ceux du marché.

C’est dans les périodes difficiles que l’on voit les entreprises sous leur vrai jour. La patience est toujours révélatrice, mais particulièrement pendant les cycles plus éprouvants. Elle permet de repérer les mauvaises entreprises qui craquent sous la pression. Surtout, elle permet de repérer les bonnes entreprises, capables de surmonter les difficultés et de générer des résultats durables.

Qui plus est, les périodes difficiles engendrent souvent des distorsions de cours : de bonnes entreprises se retrouvent parfois ­sous-évaluées sous l’effet de l’incertitude et présentent ainsi des occasions de valeur ajoutée à long terme.

Cette philosophie de placement ne se résume toutefois pas à trouver de bonnes entreprises à faible prix qui sont capables de générer des résultats fiables sur l’ensemble des cycles de marché. La patience doit s’allier à la prudence, qui prendra la forme d’une analyse ascendante fondamentale détaillée de chaque entreprise.

Le processus débute par l’application de critères de sélection à l’ensemble des bonnes entreprises afin de ne retenir que les plus prometteuses ; pour ce faire, les sociétés font l’objet d’une analyse très rigoureuse visant à bien comprendre leur situation financière, les éléments à la base de leurs flux de trésorerie, leurs antécédents en matière de répartition du capital, les rendements des réinvestissements et leur impact sur les futurs flux de trésorerie.

Fondamentalement, le succès en matière de placement dépend de la solidité de la gouvernance d’entreprise, surtout sur les marchés émergents mondiaux. La question se résume au lien de confiance entre les actionnaires et l’équipe de direction de l’entreprise.

La prudence en matière de répartition du capital au sein du fonds constitue une part essentielle du processus de diligence raisonnable. Les rencontres avec la direction permettent de réellement comprendre l’entreprise ; l’investisseur peut donc être à peu près certain qu’elle est capable d’investir prudemment le capital. Après tout, c’est de cette répartition prudente que dépend la viabilité de la croissance des résultats et, par ricochet, de la valeur intrinsèque de l’entreprise. La gouvernance est le point de départ de toutes les décisions de placement.

Pour réussir, il faut évaluer les entreprises une par une, regarder comment elles surmontent les difficultés et en comprendre le fonctionnement en détail, notamment le mode de gestion, et leur engagement à l’égard des investisseurs ainsi que leur capacité à respecter leurs promesses. Toutefois, l’avantage d’une philosophie de placement axée sur la patience tient non seulement à sa capacité à repérer de très bonnes actions, mais également au fait qu’elle permet d’établir un lien de confiance et de conserver les actions choisies.

Savoir faire preuve de patience et laisser d’excellentes entreprises se développer et offrir des rendements en croissance aux actionnaires sur un horizon de placement à moyen terme constitue un important moteur de rendements. La force de cette méthode réside dans la composition de la croissance dont bénéficient les investisseurs au fil du temps.

Toutefois, tous les investisseurs n’ont pas la patience d’investir sur les marchés émergents. La liste des éléments à surveiller est longue : taux de change, taux d’intérêt, taux de croissance, incertitude politique et effets de la mondialisation. À long terme, toutefois, les éléments fondamentaux ­sous-tendant ces marchés offrent, selon moi, de nombreuses occasions.

Les marchés émergents bénéficient de moteurs de croissance structurels. L’évolution démographique, les dépenses en infrastructures, la hausse des revenus, les changements de mode de vie et les nouvelles habitudes de consommation qui en découlent continueront d’alimenter la demande structurelle sur ces marchés. C’est pourquoi je suis optimiste.

Alex ­Duffy est le gestionnaire du portefeuille ­Global ­Emerging ­Markets ­Fund
de ­Fidelity ­Investments.