Complexe Desjardins à Montréal
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S’il y a une catégorie d’actif où l’intégration des critères ESG a un impact concret, c’est bien l’immobilier commercial. Mais dans un contexte de forte concurrence, les investissements requis pour maintenir les immeubles aux normes environnementales actuelles peuvent donner le vertige.

« Les immeubles verts sont très recherchés sur le marché. Il s’agit d’un levier de valorisation important pour les investisseurs. Personne ne veut acheter un actif qui coûte trop cher en énergie ou en entretien », a expliqué Bernard Bitar, conseiller de programmes, Développement durable immobilier à Desjardins lors de la conférence annuelle de l’Association de la retraite et des avantages sociaux (ARASQ), le mois dernier.

Parmi les quelque 46 000 employés de l’institution financière, 12 000 travaillent dans des immeubles détenus par Desjardins. « Ne pas considérer les enjeux ESG dans notre stratégie immobilière reviendrait à doubler nos risques, puisque nous sommes à la fois propriétaire et occupant », souligne-t-il. 

Une production d’énergie qui surpasse la consommation

Aujourd’hui, le nerf de la guerre en immobilier commercial, c’est la construction de bâtiments à haute performance énergétique.

Alors que le coût de l’énergie est à la hausse, et que la tendance ne fera que s’accentuer dans les prochaines décennies, les propriétaires d’immeubles cherchent non seulement à réduire leur facture d’électricité, mais aussi à éliminer complètement les énergies fossiles et plutôt se tourner vers les sources d’énergie renouvelable, installer des systèmes de réutilisation de l’eau et réduire le volume de déchets. De plus, les avancées en intelligence artificielle permettront d’amener la performance énergétique des édifices à un niveau jamais vu.

« Ultimement, l’objectif est que les immeubles produisent davantage d’énergie qu’ils n’en consomment. C’est de cette façon que nous allons vraiment pouvoir diminuer nos coûts opérationnels », affirme Bernard Bitar.

Cela dit, le propriétaire de l’immeuble n’est pas le seul à avoir un rôle à jouer. Les autres parties prenantes comme les locataires et les gestionnaires d’immeubles doivent aussi participer à la démarche. Desjardins a par exemple introduit des « clauses vertes » dans ses nouveaux baux pour s’assurer de l’engagement de ses locataires en matière environnementale.

Une cuillère à la fois

En améliorant l’empreinte environnementale de leurs actifs immobiliers, les investisseurs ne font pas que réduire leurs coûts opérationnels, ils rendent également leurs propriétés plus attrayantes sur le marché. À ce chapitre, les certifications telles que LEED et BOMA BESt sont devenus des incontournables.

Mais construire un édifice tout neuf pour qu’il atteigne des hauts standards énergétiques est une chose, remplir le même objectif en rénovant un immeuble construit il y a plusieurs décennies en est une autre. Il faut donc savoir cibler ses investissements pour maintenir la valeur de ses immeubles sans pour autant jeter de l’argent par les fenêtres, soutient Bernard Bitar.

« Économiquement, ça n’a pas vraiment de sens d’essayer de viser une certification LEED Platine pour un immeuble comme le Complexe Desjardins, qui a été construit en 1976. Il faut y aller une cuillère à la fois », dit-il

C’est d’ailleurs une cuillère à la fois que Desjardins a entrepris de remplacer les quelque 11 000 fenêtres de son immeuble phare du centre-ville de Montréal, un projet qui s’étendra sur 14 ans. « Il y a plus de fenêtres au Complexe Desjardins que sur l’Empire State Building! », s’est exclamé Bernard Bitar.

Pour autant, les propriétaires immobiliers n’ont d’autres choix que d’investir massivement dans la mise à niveau de leurs actifs, surtout dans des marchés très effervescents comme le centre-ville de Montréal. « En immobilier, nos comparatifs se trouvent de l’autre côté de la rue, prévient M. Bitar. Si on ne fait rien, la dévaluation peut être très rapide et faire grimper le taux d’inoccupation en flèche. »