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Jean-Daniel ­Côté croit quant à lui que les gouvernements devraient s’impliquer encore plus dans la gestion des actifs de retraite. Puisque le ­RRQ verse déjà une rente aux ­Québécois, pourquoi ne ­pourrait-il pas également vendre des rentes viagères ? ­Les retraités remettraient ainsi leur argent à un organisme public dont la gestion des actifs est ­jusque-là irréprochable, ­estime-t-il, au lieu de le mettre dans les mains d’institutions financières aux intérêts privés.

« ­Cette solution n’a pas que des adeptes, ­admet-il, mais moi j’y crois. Le ­RRQ verse déjà un chèque, il n’aurait qu’à être bonifié. Et puis les frais administratifs seraient plus faibles, les frais de placement également, en passant par la ­Caisse de dépôt et placement du ­Québec. Il y a de grandes chances que les rentes soient alors plus élevées que dans le privé. Pas 30 % de plus, mais ­peut-être de 5 à 6 %. »
Ces rentes, qu’elles soient viagères ou gouvernementales, publiques ou privées, devraient avoir pour rôle d’assurer le minimum vital, tout en palliant le risque de longévité, considère pour sa part ­David ­Charland, directeur stratégie de retraite, régimes collectifs de retraite à la ­Sun ­Life. Le reste de l’épargne permettant de s’acquitter du superflu.

« Ça donne plus de flexibilité en début de retraite, ­explique-t-il, au moment où les gens sont encore très actifs. Ils peuvent avoir des besoins très différents d’un mois à l’autre s’ils ont des projets de voyage ou de rénovation, par exemple. En vieillissant, cette nécessaire flexibilité diminue. Les soins de santé augmentent souvent, certes. Mais pour le reste, les dépenses sont assez prédictibles. »

iA ­Groupe financier est l’un des assureurs à avoir consacré des efforts au développement de produits de décaissement afin d’aider les participants à mieux prévoir les revenus de retraite. Son outil n’est cependant pour l’instant disponible que dans un environnement ­REER, rappelle ­Claude ­Harnois, directeur des rentes assurées, précisant que la compagnie travaille avec le législateur afin de l’introduire dans les régimes ­CD, et ce, d’un océan à l’autre.

« ­Les discussions se poursuivent, ­affirme-t-il. L’un des grands enjeux des prochaines années en matière de régimes de retraite, c’est l’harmonisation de la législation à la grandeur du ­Canada. »

Décaissement à même le régime employeur

Harmoniser la législation, certes, mais également la faire évoluer, afin de permettre à de nouveaux outils, déjà développés par les institutions financières, compagnies d’assurances et autres gestionnaires d’actifs, d’être proposés aux participants.

Parmi eux, la possibilité de décaisser à même le régime collectif de l’employeur. Solution dont l’industrie parle depuis plusieurs années maintenant mais que peu d’entreprises sont enclines à proposer aujourd’hui, du fait de leur responsabilité fiduciaire. Il s’agit surtout de syndicats, d’organismes gouvernementaux ou paragouvernementaux, d’universités ou de grandes entreprises.

« ­Tant que l’argent demeure dans le régime collectif, l’employeur est responsable des placements qui sont offerts, explique ­Christine ­Girvan. ­Est-ce que cela signifie aussi qu’il serait responsable du risque de longévité dans le cadre d’un régime offrant le décaissement ? ­La loi devra le clarifier. Aujourd’hui,
en l’absence de protection de règle refuge, il y a de grandes chances que les employeurs ne souhaitent pas garder les retraités dans leurs régimes. »

L’avantage pour les participants serait de continuer à bénéficier de frais réduits et de placements réalisés par des experts ayant des actifs importants à gérer. Pour l’employeur, c’est un argument de plus pour attirer des talents dans un contexte de pénurie de ­main-d’œuvre qualifiée. C’est également plus d’actifs à placer.

« ­Il y a des employeurs plus paternalistes que d’autres, analyse ­Jean-Daniel ­Côté. Plus prêts que d’autres à continuer à s’investir pour leurs ­ex-employés. Mais la grande majorité souhaite se désengager. Ils ont mis fin aux régimes PD justement pour pouvoir se désengager, ce n’est pas pour recommencer avec les régimes ­CD. D’autres se disent que dans 20 ans, il y aura autant de retraités que d’employés dans le régime et que le plus gros du travail d’administration sera fait pour des gens qu’ils ne connaissent même pas. Bref, il y a beaucoup d’hésitations. »

Michel ­Fortin évoque quant à lui la possibilité de créer un ­FRV collectif non pas chez l’employeur, mais directement chez l’administrateur du régime. La responsabilité et le travail
de gestion passeraient ainsi de l’employeur à la compagnie d’assurance.

« ­Il faudrait que les frais soient comparables à ceux du promoteur, ­précise-t-il, et que les assureurs soient très transparents sur ce point. C’est très important que ce soit moins cher que la cote individuelle, car le moindre pourcentage de frais de gestion en moins fait toute une différence sur le long terme. »
Bref, des solutions innovantes, il y en a bel et bien. L’industrie n’attend plus que le feu vert de la législation et de la réglementation pour avancer.