Les attentes de rendement futur sur les actifs de retraite ont changé au cours des dernières années. En effet, le rendement prévu des actifs à revenu fixe, qui peut représenter une partie importante du portefeuille d’un retraité type, a diminué d’environ 1 % au cours des trois dernières années. Quelle est la conséquence de la baisse des rendements obligataires sur la suffisance du revenu de retraite ?

Les hypothèses sous-jacentes à l’outil Réalité Retraite d’Aon ont été mises à jour récemment pour tenir compte de la diminution des attentes quant aux rendements futurs des obligations. Cela se traduit par le fait que les futurs retraités doivent accumuler davantage de fonds pour maintenir un rythme de vie similaire pendant leurs années de retraite. L’outil Réalité Retraite définit les besoins privés comme le montant qu’une personne doit accumuler, déduction faite des rentes gouvernementales (Régime de pensions du Canada/Régime de rentes du Québec et Sécurité de la vieillesse), pour prendre une retraite confortable. Ce montant est exprimé en multiple du salaire à la retraite.

En raison de la baisse du rendement attendu, l’employé moyen devra accumuler 1,4 M$ d’ici à ce qu’il atteigne 65 ans s’il veut prendre une retraite confortable, ce qui représente une augmentation de 100 000 $ par rapport à notre étude de 2019. En d’autres termes, les besoins privés de l’employé canadien moyen ont augmenté de 0,7 fois le salaire, passant de 10,9 à 11,6 depuis 2019. Les calculs sont effectués pour un employé de 45 ans ayant un salaire annuel de 60 000 $, et cotisant à un régime d’épargne-retraite de l’entreprise avec 5 % de cotisations salariales et 100 % de cotisations de contrepartie de l’employeur.

Réalité Retraite définit la suffisance du revenu de retraite comme le fait d’avoir le même revenu disponible après la retraite qu’avant, en tenant compte des changements dans l’épargne, les impôts, les frais médicaux, etc. Il compare l’accumulation anticipée de l’épargne-retraite à l’accumulation cible nécessaire pour maintenir le niveau de vie d’un employé après sa retraite.

Que peuvent faire les futurs retraités pour combler l’écart ?

Lorsqu’on s’attend à ce qu’il y ait un manque à gagner sur le niveau de préparation à la retraite, les futurs retraités peuvent prendre certaines mesures pour corriger le tir. Cet écart peut être couvert par les épargnes de l’employé en dehors du régime de retraite (REER, CELI, autres épargnes), ses biens immobiliers (maison, chalet, etc.) ou ses régimes de retraite d’employeurs précédents. Toutefois, si l’on ne s’attend pas à ce que d’autres actifs en dehors du régime de retraite de l’employeur soient suffisants pour combler le manque à gagner à la retraite, les employés doivent adopter une ou plusieurs des mesures suivantes pour combler cet écart :

  • Prévoir de réduire leurs dépenses pendant la retraite
  • Partir à la retraite plus tard
  • Cotiser davantage à leur régime avant la retraite
  • Modifier la stratégie d’investissement

Dans quelle mesure ces facteurs doivent-ils être ajustés pour combler le manque à gagner ? Cela dépend du profil de l’employé (voir tableau 1) :

  • l’analyse de l’écart dépend du niveau de revenu, puisque les besoins projetés augmentent pour les tranches de salaire plus élevées, les rentes gouvernementales couvrant une plus petite partie du salaire à la retraite ;
  • les besoins varient également en fonction de l’âge, car on s’attend à ce que les jeunes employés voient leur espérance de vie augmenter davantage que celle de ceux qui sont plus proches de la retraite.

Tableau 1 : Illustrations — combler le nouveau manque à gagner à la retraite (basé sur les nouvelles hypothèses)

Âge/salairePartir à la retraite après 65 ansRéduire le niveau de dépenses durant la retraiteCotiser davantage jusqu’à la retraite et prendre sa retraite plus tard
45/60 000 $6 ans plus tardRéduction de 30 %Augmentation de 8 % des cotisations et départ à la retraite 4 ans plus tard
60/45 000 $4 ans plus tardRéduction de 20 %Augmentation de 8 % des cotisations et départ à la retraite 3 ans plus tard

Aux fins de comparaison, on estimait dans notre étude de 2019 que l’employé canadien moyen de 45 ans gagnant 60 000 $ par année devait retarder sa retraite de cinq ans pour combler le manque à gagner de préparation à la retraite, comparativement à six ans dans la présente étude.

En fonction des nouvelles hypothèses de l’étude 2021 Réalité Retraite, l’augmentation des cotisations des employés ne pourrait pas à elle seule combler le manque à gagner de préparation à la retraite pour les profils illustrés, mais pour y parvenir, cette stratégie pourrait être combinée avec le report de la retraite et la réduction du niveau de dépenses pendant la retraite.

Comment les promoteurs de régimes peuvent-ils aider leurs participants à combler cet écart ?

La première étape est l’évaluation. Leur régime de retraite est-il conçu de façon à être suffisant en soi pour assurer aux travailleurs une retraite confortable ? Si ce n’est pas le cas, l’outil Réalité Retraite peut fournir aux promoteurs de régimes des données analytiques pour identifier les stratégies permettant de répondre aux besoins des employés et combler tout écart éventuel de préparation à la retraite. Plusieurs solutions peuvent être mises en place pour aider à combler le manque à gagner, sans nécessairement augmenter le coût du régime, comme passer à une conception avec des caractéristiques automatiques pour combattre l’inertie, mener une campagne de communication pour accroître l’implication des employés à la planification de leur retraite et optimiser les options d’investissement disponibles pour augmenter les rendements futurs.

En tant qu’employeur, prendre des mesures pour assurer à vos employés une retraite confortable montre que vous vous souciez d’eux. C’est une façon d’investir dans leur bien-être, mais aussi dans leur fidélisation et leur mobilisation.

Émilie Alary est conseillère principale, Solutions pour le patrimoine à Aon.