Comme un peu partout en Occident, le système de retraite public français est soumis à de fortes pressions en raison du vieillissement de la population. C’est dans ce contexte que le premier ministre Édouard Philippe a annoncé dimanche que les prestations de retraite n’allaient pas être indexées au même niveau que l’inflation au cours des deux prochaines années. Une annonce qui sème la grogne partout dans le pays.

Les prestations des retraités français seront ainsi indexées à hauteur de 0,3 % en 2019 et en 2020, alors que l’inflation, elle, devrait atteindre 1,7 %, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Jusqu’à aujourd’hui, l’indexation des prestations suivait toujours l’inflation en France.

Interrogé par Franceinfo, l’économiste Philippe Crevel a expliqué que « le gouvernement est un peu contraint, en 2019 et 2020, de revoir le périmètre des dépenses sociales et d’essayer de les comprimer ».

DES RETRAITES QUI PÈSENT LOURDS

Le gouvernement français se défend en soutenant qu’un tel coup de hache dans l’indexation des prestations de retraite est nécessaire pour « maîtriser les dépenses publiques ».

Il est vrai que les retraites publics pèsent très lourd dans l’économie française, rapporte L’Obs. À elles-seules, les prestations versées par l’État aux retraités représentent 13,8 % du PIB du pays. Au sein de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), seuls l’Italie et le Portugal devancent la France à ce chapitre. Au Canada, le poids des régimes de retraite publics est largement moindre, représentant seulement 4,6 % du PIB, alors que la moyenne de l’OCDE est de 8,2 %.

Le service statistique du ministère des Solidarités et de la Santé indique que le revenu mensuel médian d’un retraité français est de 1 760 euros (2 665 $ CAN). À titre comparatif, le revenu mensuel médian de l’ensemble des Français est légèrement plus bas, soit 1 690 euros. Le revenu annuel disponible d’un ménage de retraité, lui, serait de 24 170 euros (36 600 $ CAN), selon l’Insee. Encore là, il se situe légèrement au-dessus de celui de l’ensemble des ménages du pays (23 500 euros).

La générosité du système de retraite public français fait en sorte qu’il y a deux fois moins de pauvreté parmi les retraités que dans le reste de la population.

En maintenant la croissance des prestations sous l’inflation, le gouvernement cherche également à inciter les Français à demeurer actif sur le marché du travail plus longtemps, a expliqué le premier ministre Édouard Philippe.

LA COLÈRE GRONDE

« On peut dire que c’est un double coup de massue pour les retraités », a réagi lundi auprès de l’Agence France-Presse Michel Salingue, secrétaire général de la Fédération générale des retraités de la fonction publique. Trouvant la mesure « un peu dure à avaler », l’organisation estime que les 16 millions de retraités du pays vont voir leur pouvoir d’achat baisser de manière considérable. L’Union nationale des retraités et personnes âgées estime quant à elle qu’on « méprise les retraités ».

Il faut dire que cette coupe de l’indexation survient quelques mois après une hausse de 1,7 point de pourcentage de la contribution sociale généralisée (GSC), une cotisation prélevée sur le revenu des Français et servant à financer différents programmes sociaux, dont le système public de retraite.

Des syndicats ont appelé lundi à une grande journée de mobilisation intersyndicale le 9 octobre pour dénoncer l’indexation des pensions de retraite « au bon vouloir du gouvernement ».

La réduction de l’indexation n’est pas plus populaire dans les rangs de l’opposition à l’Assemblée nationale du pays. Autant la gauche que la droit ont dénoncé la mesure, affirmant qu’elle allait « assommer les retraités ».

L’administration d’Emmanuelle Macron travaille en ce moment sur une vaste réforme du système de retraite français, prévue pour 2019.