Censés être une mesure temporaire pour soutenir une croissance économique chancelante, les taux négatifs et les mesures d’assouplissement quantitatif sont presque devenus la normalité en Europe. Et les régimes de retraite en paient le prix fort.

Les taux d’intérêt négatifs ou près de zéro sont en effet catastrophiques pour les gestionnaires de caisses de retraite européens, peut-on lire sur Bloomberg. Selon des estimations provenant d’une enquête de la société française Amundi réalisée auprès de 153 fournisseurs de prestations de retraite en Europe, une baisse de 1 % des taux d’intérêt entraîne une augmentation d’environ 20 % du passif et une réduction d’environ 10 % du ratio de capitalisation.

La situation des régimes européens est critique. Près d’un quart d’entre eux ont un niveau de capitalisation de moins de 90 %, et une plus grande proportion de régimes enregistrent des flux de trésorerie négatifs (40 %) que positifs (33 %).

Les administrateurs de ces caisses de retraite n’hésitent pas à accuser les banquiers centraux d’être responsables de leurs malheurs. Pas moins de 62 % des répondants sont d’accord pour dire que les mesures d’assouplissement quantitatif ont gonflé à outrance les engagements de leurs régimes. La moitié d’entre eux vont même jusqu’à dire que l’assouplissement quantitatif a carrément miné la viabilité à long terme des régimes de retraite.

Avenir compromis

Alors qu’environ 11,7 billions de dollars américains d’obligations affichent un coupon négatif à l’échelle mondiale, les caisses de retraite européennes s’inquiètent de ne pas pouvoir générer des rendements suffisants pour respecter leurs engagements. Ainsi, 64 % d’entre elles s’attendent à obtenir des rendements de 5 % ou moins au cours des prochaines années.

Un rapport de la firme Pacific Investment Management publié la semaine dernière affirme que les taux inférieurs à zéro créent des défis importants pour les caisses de retraite, et que les politiques de taux négatifs ne disposeront plus de beaucoup de marge de manœuvre à mesure que les conséquences involontaires d’un tel assouplissement deviendront de plus en plus apparentes.

L’avenir ne s’annonce pas particulièrement radieux pour les régimes de retraite, les banques centrales ne montrant aucun signe imminent de normalisation de leur politique monétaire. Au contraire, la Fed a fait marche arrière, et la Banque centrale européenne a relancé son programme d’assouplissement quantitatif plus tôt cette année.

Seule lueur d’espoir à l’horizon, la Banque de Suède devrait ramener son taux directeur à 0 % jeudi après des années de taux négatifs, et ce, malgré un taux d’inflation toujours en-deçà de la cible. Si le scepticisme de la Banque de Suède par rapport aux mesures d’assouplissement quantitatif se répand à d’autres banquiers centraux, les régimes de retraite européens pourront peut-être reprendre leur souffle.