Dans le cadre de son déjeuner annuel sur les prévisions et perspectives pour les régimes de retraite 2012, Malcolm Hamilton, partenaire, Régimes de retraite, gestion des risques et finance, au bureau de Mercer à Toronto, a partagé sa vision de la situation actuelle des régimes de retraite et émis quelques commentaires sur la voie à emprunter pour les gouvernements canadiens et provinciaux dans les prochains mois.

Actuaire depuis près de 35 ans, M. Hamilton est une figure très connue dans le reste du Canada. Il a rappelé que la crise financière actuelle, qui est à l’origine des problèmes de solvabilité de la plupart des régimes de retraite, n’est pas un problème typiquement canadien. Par conséquent, il faut être prudent à tout vouloir changer dans le système en place.

En dépit de quelques lacunes, le système de retraite canadien est l’un des meilleurs au monde. Les différents paliers de gouvernement au pays tentent de créer une solution favorisant l’épargne chez les travailleurs, mais il ne faut pas penser que cela est nécessaire pour tout le monde.

« Il faut surtout trouver une façon d’aider les gens de la classe moyenne à épargner davantage en vue de la retraite. Dans le système actuel, il n’est pas avantageux pour les bas salariés de cotiser à un REER ou autre véhicule d’épargne-retraite puisque cela pourrait les empêcher de toucher aux prestations de la sécurité de la vieillesse. »

M. Hamilton a rappelé que le système de retraite des Pays-Bas est souvent considéré comme étant le meilleur sur la planète. « Sa principale qualité est qu’il n’offre pas une promesse de rentes proprement dit. Le système s’adapte aux fluctuations du marché selon sa capacité de payer. Même si les marchés boursiers sont en forte baisse, le système des Pays-Bas ne brisera pas. Il résistera aux turbulences des marchés. »

Depuis 20 ans, les rendements des placements ont été relativement satisfaisants. Si on tient compte de l’inflation, les rendements réels ont été de 6,2 %. Le problème vient plutôt de la croissance des éléments de passif qui a dépassé le rendement des placements. Le passif des régimes a diminué d’environ 10 % en moyenne à cause de la faiblesse des taux d’intérêt long terme, qui persiste depuis plus d’une décennie.

M. Hamilton a également parlé de l’impact des politiques de Bernard Bernanke qui n’est pas très favorable pour les régimes de retraite. « Pour l’instant, les décisions de M. Bernanke semblent sauver l’économie américaine d’une des pires crises financières en gardant l’inflation sous contrôle. »

Quelques réflexions personnelles
En terminant, M. Hamilton, qui prendra sa retraite sous peu, y est allé de quelques réflexions personnelles, qu’il a divisé en cinq éléments :

  1. Les choses s’améliorent, mais lentement et non sans quelques aléas. C’est vrai autant pour le système des retraite que pour la vie en général.
  2. Améliorer… sans tenter d’atteindre la perfection. Nous avons un système dont nous pouvons être fiers. C’est l’un des meilleurs du monde et il en existe peu contre lesquels nous voudrions l’échanger. Contrairement à d’autres, nous avons réalisé des choses importantes dans les années 1990 : nous avons réformé le Régime de pensions du Canada, réduit la dette et encouragé les gens à épargner en vue de la retraite. Nous avons fait du bon travail.
  3. Ce qui importe, c’est la résilience. Améliorer le régime ne veut pas dire augmenter les dépenses, donc augmenter les prestations. Nous pouvons – et devrions – procéder régulièrement à de petites améliorations plutôt que de faire des pas de géant pour tenter d’atteindre la perfection. Améliorer le régime, c’est faire en sorte qu’il soit viable. Il faut ériger des systèmes souples, qui « plient mais ne cassent pas ».
  4. Voir les choses telles qu’elles sont, non comme nous voudrions qu’elles soient (trop de systèmes sont axés sur « le long terme », une destination vers laquelle nous ne cessons d’avancer sans jamais y parvenir). Nous ne pouvons pas concevoir un régime adapté à toutes les situations économiques. Les régimes de retraite devraient être soumis à de simples tests de tension. Ces tests sont importants.
  5. Le défi des ressources humaines est d’aider les travailleurs, sans pour autant les rendre dépendants de cette aide. Les retraités du Canada peuvent assumer le risque. Ils peuvent faire face à la déception. Dans un monde où les placements sûrs ne rapportent à peu près rien, il faut prendre des risques et ces risques doivent être assumés. De préférence, ils seront assumés par les personnes au profit desquelles ils sont pris. Ils ne peuvent être mis en commun et ce sont les individus qui les assument, non les institutions. Ce sont les contribuables qui assument les risques, non les gouvernements. Et ce sont les participants à un régime de retraite qui assument les risques, non les promoteurs du régime. Le risque global de notre régime de pensions sera assumé par la population. Or dans une population vieillissante composée d’un nombre croissant de retraités, ceux-ci devront en assumer une part. On ne peut reporter entièrement le risque sur les générations futures. Les retraités peuvent et doivent apporter leur contribution. Nous avons besoin d’eux, sinon aujourd’hui, du moins plus tard, à mesure que le régime prendra de la maturité.