En 2016, Ubisoft a pris la décision de miser sur la pharmacogénétique pour aider ses employés souffrant de certaines maladies à se remettre sur pied plus rapidement. Trois ans plus tard, le bilan est plutôt positif.

Chez Ubisoft, tout employé qui a reçu un diagnostic de trouble de santé mentale peut passer un test pharmacogénétique, qui sera alors remboursé à 100 %. Pour Louis-François Poiré, directeur, rémunération globale à Ubisoft, les bénéfices de ces tests ne sont plus à démontrer.

« Avant l’arrivée de la pharmacogénétique, le protocole suivi par les médecins pour les diagnostics de santé mentale consistait à prescrire un médicament au hasard, à l’essayer pendant deux semaine, possiblement en augmentant le dosage. Si après cette période la molécule était inefficace ou causait trop d’effets secondaires, on recommençait le processus avec un nouveau médicament », explique M. Poirier, qui partagera l’expérience d’Ubisoft jeudi lors de la conférence annuelle de l’Association de la retraite et des avantages sociaux du Québec (ARASQ).

Avec la pharmacogénétique, le médecin dispose d’un outil supplémentaire pour déterminer dès le début le meilleur médicament à prescrire à son patient. « L’objectif du programme est de m’assurer que mes créateurs puissent être au travail et en pleine forme pour produire les meilleurs jeux vidéo du monde », dit-il.

D’un point de vue financier, les tests pharmacogénétiques permettent de réduire la durée des périodes d’invalidité, mais aussi de favoriser la productivité des employés qui se présentent toujours au travail, mais qui sont incommodés par des effets secondaires causés par leur médication.

« Quand tu regardes les coûts humains et financiers de l’invalidité, ça ne prend vraiment pas beaucoup de journées d’absence en moins pour payer un test de quelques centaines de dollars », souligne Louis-François Poiré.

Rassurer les employés

Chez Ubisoft, le facteur clé de la réussite du projet en pharmacogénétique a été la clinique interne, qui existe depuis plus d’un décennie. Les médecins qui y œuvrent ont reçu une formation sur l’utilisation des tests pharmacogénétiques, et ils les proposent systématiquement aux employés souffrant de troubles de santé mentale.

« Il n’y a aucune résistance de la part des employés quand le médecin leur dit que c’est gratuit et que ça va les aider à guérir plus vite », soutient M. Poiré.

Cela dit, l’entreprise a quand même pris soin de bien communiquer les tenants et aboutissants du programme lors de son lancement en 2016. Pour dissiper les craintes, il a été clairement spécifié que seul le patient et le médecin avaient accès au résultat, pas l’assureur ni l’employeur.

Dans les communications aux employés, Louis-François Poiré a également insisté sur la distinction entre les tests pharmacogénétiques et la génétique diagnostique, qui vise à déterminer les probabilités qu’un individu développe certaines maladies dans le futur.

« Avec la pharmacogénétique, on ne fait que déterminer si l’individu va métaboliser lentement ou rapidement certaines molécules. C’est tout », mentionne-t-il.

Pour autant, il est bien au courant des limites de la pharmacogénétique. « Ce n’est jamais une certitude. Ce n’est pas parce qu’il y a un crochet vert à côté d’une molécule qu’elle va forcément bien fonctionner. Ce n’est pas une science exacte. »