L’accès plus difficile aux ressources médicales durant la pandémie a fait reculer le nombre de diagnostics pour les maladies chroniques au Canada. Non traitées, ces maladies auront de graves conséquences pour les promoteurs de régimes d’assurance médicaments et les employeurs en général.

Les données de l’édition 2021 du Rapport sur les tendances en matière de médicaments d’ordonnance d’Express Scripts Canada montrent que plus de 100 000 personnes seraient atteintes de maladies chroniques non diagnostiquées au Canada. Le plus inquiétant, c’est que ces personnes n’auraient commencé aucun traitement en 2020.

Selon le rapport, la diminution importante en 2020 du nombre de nouveaux demandeurs qui utilisent des médicaments associés à des maladies chroniques comme le diabète et le cancer serait à l’origine de cette tendance alarmante.

« Cette tendance est préoccupante, affirme le docteur Dorian Lo, président d’Express Scripts Canada. En raison des retards liés au diagnostic et au traitement, il sera plus difficile pour les patients de prendre en charge leur maladie. Dans la plupart des cas, le fait d’obtenir des soins le plus tôt possible peut vraisemblablement améliorer les résultats sur le plan de la santé et aider à ralentir la progression de la maladie et à réduire les conséquences qui en découlent.

Moins de nouveaux demandeurs

L’an dernier, les personnes qui sont tombées malades ou qui ont développé de nouveaux symptômes ont peut-être tardé à consulter un professionnel de la santé en raison de l’accessibilité restreinte des services ou par crainte d’être infectées par le coronavirus, juge Express Scripts Canada. Ainsi, le nombre de nouveaux demandeurs par semaine en 2020 était moins élevé que prévu dans plusieurs classes thérapeutiques importantes.

« Les personnes qui n’ont pas consulté de médecin relativement à des symptômes apparus en 2020 pourraient recevoir un diagnostic de maladie chronique en 2021 ou par la suite, explique Jeff Boutilier, directeur général des pharmacies et chef des services cliniques à Express Scripts Canada. Les régimes d’assurance pourraient devoir gérer un plus grand nombre de demandeurs à l’avenir. »

M. Boutilier s’attend à ce que les retards accumulés dans le traitement des maladies associées aux principales classes thérapeutiques aient des répercussions à long terme sur le nombre de nouveaux demandeurs dans les régimes et sur la prise en charge des maladies.

Les données sur les demandes de règlements pour les médicaments contre le cancer montrent par exemple que de la fin du mois de mars jusqu’au mois de décembre 2020, le nombre de nouveaux demandeurs a diminué de 2 % par semaine en moyenne. Express Scripts Canada estime donc que 10 000 Canadiens n’ont pas commencé le traitement dont ils auraient besoin. Jeff Boutillier précise qu’il existe moins d’options thérapeutiques pour les cancers à des stades plus avancés, et que celles-ci coûtent plus cher.

Le constat est semblable concernant le diabète, alors que sur la même période, le nombre de nouveaux demandeurs a reculé de 1 % par semaine en moyenne. Cela représente 20 000 Canadiens qui n’ont pas commencé un traitement contre la maladie. Lorsqu’ils sont instaurés tardivement, les traitements pour le diabète sont eux aussi plus intenses et coûteux.

Les données soulèvent également des préoccupations liées au retard accumulé dans le traitement de l’hypertension artérielle, qui augmente le risque de crise cardiaque et d’AVC.

Les Canadiens réticents à consulter

Les conclusions du rapport d’Express Scripts Canada vont dans le même sens que les résultats d’un sondage de Novo Nordisk Canada qui révèle que les Canadiens atteints de maladies chroniques, telles que l’arthrite, le cancer, le diabète, les maladies cardiaques ou l’obésité, sont réticents à demander des soins proactifs pendant la pandémie de COVID-19.

Plus précisément, 38 % des Canadiens interrogés qui ont reçu un diagnostic clinique de maladie chronique ont déclaré qu’ils évitent complètement le système de santé pendant la pandémie. Parmi les répondants ayant reçu un diagnostic clinique de maladie chronique, 13 % n’ont ni consulté leur médecin ni effectué de visite virtuelle ou d’appel téléphonique depuis le début de la pandémie. Plus du quart des patients (27 %) avouent ne pas se sentir à l’aise de voir un médecin en personne pendant la pandémie.