Les caisses de retraite sont plus que jamais à la recherche d’actifs à long terme sécuritaires, offrant un revenu courant élevé et stable. Depuis quelques années, les obligations liées à des projets d’infrastructure, particulièrement ceux structurés en partenariat public-privé (PPP), font émergence et se taillent une place non-négligeable au sein des indices obligataires. Pour certaines organisations, des valeurs ou idéologies pourraient rendre ces obligations moins appropriées. Il n’en demeure pas moins que celles-ci répondent aux besoins de gestion du risque de non-appariement de plusieurs caisses de retraite et que certains gestionnaires institutionnels ont mis sur pied des fonds dédiés à la dette d’infrastructures.
Des besoins en croissance
Selon un sondage réalisé en 2007 par la Fédération des municipalités canadiennes conjointement avec l’université McGill, un déficit énorme existe dans le secteur des infrastructures au Canada. Pour améliorer ou maintenir les infrastructures existantes, des investissements de l’ordre de 123 milliards $ seront requis. Ce montant grimpe de 115 milliards $ lorsque sont inclus les nouveaux projets.
L’encours actuel d’obligations liées à la dette d’infrastructures représente plus de 45 milliards $, pour constituer plus de 40 % des obligations de sociétés portant une échéance de plus de 10 ans disponibles sur le marché. Il existe deux types d’obligations d’infrastructures : les obligations traditionnelles et les obligations de PPP. Le montant disponible d’obligations liées aux PPP atteindra à lui seul 20 milliards $ d’ici peu, soit le double de l’encours actuel selon une étude de la Banque Royale du Canada.
Obligations traditionnelles
Les obligations traditionnelles sont émises pour le financement d’infrastructures dont les opérations sont principalement dans le secteur des services publics (énergies renouvelables, traitement des eaux usées) ou du transport (ponts, routes et aéroports). Des exemples d’émetteurs fréquents de qualité AA à BBB sont NAV Canada, Aéroports de Montréal et Hydro One Inc. Étant donné leur structure plus classique et leur poids important dans l’indice DEX, ces titres présentent une bonne liquidité au sein des obligations de sociétés au Canada.
Obligations d’infrastructures en PPP
Les gouvernements ont recours davantage aux PPP pour financer, structurer et opérer des projets d’infrastructures de services publics. Un consortium de constructeurs, opérateurs et financiers est sélectionné par le gouvernement afin de réaliser un projet, au terme d’un appel d’offres formel. Le gouvernement peut ainsi transférer les risques de construction, d’opération et de financement à des firmes spécialisées. Il prend normalement possession de l’actif et des opérations à l’échéance de la dette.
Afin de financer un projet en PPP, les membres du consortium fournissent conjointement un montant d’équité souvent équivalent à environ 10 % à 20 % du projet. Ils financent la différence en empruntant sur les marchés par l’émission de dettes à long terme. Les obligations de PPP ont généralement une échéance de 30 à 40 ans et portent une cote de crédit de AA à BBB. Le risque de crédit est concentré sur la période de construction, où les risques de dépassement de coûts sont la responsabilité des compagnies faisant partie du consortium. Après la période de construction, qui s’étend normalement sur 4 à 5 ans, le paiement des intérêts et du capital est assuré contractuellement par le gouvernement. Un risque lié aux coûts d’opérations durant la période post-construction existe et celui-ci dépend de l’habileté du consortium à bien évaluer les dépenses d’opérations à long terme.
Les taux de rendement des obligations de PPP sont plus attrayants durant les premières années, soit d’environ de 5 % à 6 %, pour ensuite diminuer rapidement une fois la période de construction terminée, donnant lieu possiblement à des gains de capitaux. Des exemples d’obligations de PPP sont les super hôpitaux de Montréal, tels le Centre universitaire de santé McGill et le Centre hospitalier universitaire de Montréal (CHUM), le siège social de la Gendarmerie Royale et l’autoroute 25.
Le risque principal des obligations de PPP est le risque de crédit. La complexité des structures financières, des contrats et des garanties requiert une expertise spécialisée en analyse de projets d’infrastructures afin de réduire ce risque. Un autre risque à considérer est le risque de liquidité, la structure plus complexe faisant en sorte que ces obligations sont transigées moins fréquemment sur le marché secondaire. L’augmentation du nombre d’investisseurs et la standardisation des émissions sont des éléments qui contribuent progressivement à améliorer la liquidité. De plus, le risque de concentration dans un même secteur est à considérer.
Les obligations d’infrastructures présentent des caractéristiques attrayantes pour les caisses de retraite et ce secteur du marché des obligations de sociétés est appelé à croître au cours des prochaines années. La durée longue des échéances, le revenu courant élevé et la qualité des obligations émises dans des secteurs supervisés par les gouvernements sont des raisons de s’y intéresser.
Sources : Normandin Beaudry