Le spécialiste québécois de la télémédecine Dialogue passera dans le giron de l’assureur Sun Life, un important actionnaire et client de l’entreprise.

La société a accepté une offre d’achat de 5,15 $ par action, ce qui représente une prime de 43 % par rapport à la veille de l’annonce, ont annoncé mercredi les deux entreprises.

En passant dans le giron d’un grand assureur canadien, l’entreprise fondée en 2016 se retrouve avec un actionnaire patient en mesure de financer son plan de croissance, a expliqué le cofondateur et chef de la direction de Dialogue, Cherif Habib, en entrevue. « On peut planifier au-delà du trimestre par trimestre et penser aux années, des décennies, en avant de nous. »

Ce pourrait être un atout pour l’expansion internationale de l’entreprise. « Aller dans d’autres marchés est quelque chose qui prend énormément de capitaux et dans un environnement de compagnie publique où les investisseurs s’attendaient à certains rendements, c’était difficile de faire ces investissements-là. »

L’offre survient au moment où l’engouement des investisseurs pour les sociétés technologiques en santé s’est estompé avec la fin de la pandémie et la hausse des taux d’intérêt.

Le prix de 5,15 $ offert demeure inférieur aux sommets atteints après les premiers pas de Dialogue en Bourse, au printemps 2021. L’engouement pour les perspectives de la télémédecine avait porté le titre aux alentours des 17 $.

Malgré tout, M. Habib, qui détient 5,5 % des actions, estime que l’offre est la bonne pour les actionnaires.

L’entreprise a reçu une première proposition de Sun Life. Elle aurait ensuite tenté de trouver un autre acheteur et aurait approché d’autres parties pour solliciter des offres. La proposition de la Sun Life serait demeurée la meilleure. « On a parlé à plusieurs partenaires potentiels et c’est vraiment l’offre de Sun Life qui s’est démarquée. »

L’analyste Jérôme Dubreuil, de Desjardins Marché des capitaux, croit que le prix proposé est « juste ». « Bien que nous voyons un bon potentiel à long terme pour Dialogue, nous croyons que l’offre est juste compte tenu du peu d’intérêt pour les sociétés technologiques en santé depuis la fin de la pandémie. Nous croyons que ces facteurs limitent la possibilité d’une meilleure offre concurrente. »

L’offre de la Sun Life obtient déjà l’appui d’actionnaires détenant 21 % de la société ainsi que de hauts dirigeants ayant une participation de 8,7 %.

Avec une participation de 9,37 %, la Caisse de dépôt et placement du Québec examine la proposition en vue de l’assemblée des actionnaires, a répondu l’institution dans un courriel.

Pas de restructuration

Dans le cadre de son offre, la Sun Life s’est engagée à ce que Dialogue demeure une entité indépendante. L’entreprise maintiendra son siège social à Montréal et l’assureur garantit le maintien des emplois.

« Ce n’est pas une transaction pour des raisons de coûts, assure M. Habib. Il n’y a aucune personne chez Dialogue qui perd son emploi. On garde nos 900 employés et collaborateurs dans leur rôle actuel. »

Pour la Sun Life, il s’agit d’une transaction de 277 millions $ en tenant compte des actions qu’elle détient déjà (22,6 %) et de la participation minoritaire de 3 % que conserveront certains membres de la haute direction de Dialogue.

L’analyste Doug Young, de Desjardins Marché des capitaux, ne pense pas que la transaction aura un impact important sur le bilan de l’assureur, et calcule qu’elle représente environ 1 % ou 2 % de ses ratios de capitaux propres. « Même si ce n’est pas une transaction matérielle, elle est sensée du point de vue stratégique. »

Dialogue pourra continuer à servir d’autres clients, même ceux provenant de concurrents de la Sun Life, précise le président de Sun Life Canada, Jacques Goulet. « Les employeurs voient l’accès à la santé virtuelle comme un élément très important du programme de garanties collectives. Si on veut se démarquer aujourd’hui comme employeur, si on veut attirer les bons talents et les retenir, c’est important d’avoir une offre concurrentielle. »

L’action de Dialogue bondissait mercredi après-midi de 1,47 $, ou 40,69 %, à 5,07 $ à la Bourse de Toronto.