Wall Street et les banques centrales tiennent compte des données subjectives dans leurs prévisions de rendement. Si cette méthode a permis de prédire efficacement les mouvements de l’économie pendant des décennies, elle s’avère de moins en moins pertinente, selon ces auteurs.

Ces données subjectives sont constituées des résultats des différents sondages sur la confiance des consommateurs, des investisseurs, des entrepreneurs, des dirigeants d’entreprise, etc. Or, depuis le milieu des années 1990 et surtout le milieu des années 2000, ces données reflètent davantage des biais et des effets de masse que la réalité économique et financière, soulignent Jim Bianco et Ben Breitholtz dans Bloomberg.

La polarisation de la politique aux États-Unis et l’apparition des médias sociaux seraient responsables de cet écart grandissant entre les données et la réalité. Les deux auteurs en veulent pour preuve l’optimisme démesuré de plusieurs sondages et indices boursiers, ainsi que les prévisions de rendement de Wall Street jugées exagérées depuis la fin de l’année dernière.

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Le plus récent sondage annuel de confiance de l’Université du Michigan présentait une proportion record de 35 % de répondants ayant entendu ou lu des nouvelles économiques positives.

Non seulement c’est un record, mais c’est cinq fois plus qu’au sommet de la bulle techno et de la bulle immobilière. Y a-t-il vraiment cinq fois plus de nouvelles économiques positives aujourd’hui qu’à cette époque? On peut en douter. Ce qu’il y a de nouveau, par contre, c’est l’importance des fils de nouvelles de Facebook et de Twitter, qui contribuent à créer une bulle d’information et donc un mouvement de masse.

L’indice Bloomberg Consumer Comfort, quant à lui, démontre que la perception qu’on a de l’économie est peut-être plus influencée par la partisanerie politique que par l’économie elle-même.

Aux États-Unis, les répondants à tendance républicaine voient actuellement l’économie en rose, alors que ceux qui votent démocrate, beaucoup moins. Les membres de la National Federation of Independant Business, qui penchent passablement du côté républicain, soutiennent qu’il n’y a jamais eu de meilleure période pour prendre de l’expansion qu’aujourd’hui, et ce, dans les 42 ans d’histoire de ce sondage. Vraiment?

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D’autres indices montrent un optimisme similaire. Le Business Roundtable CEO Survey n’a jamais été aussi positif depuis 16 ans, l’ISM Purchasing Manager’s Index depuis 14 ans et le Conference Board’s Consumer Confidence depuis 18 ans.

Les auteurs ont réuni toutes ces données au sein d’un indice de données subjectives pour le comparer à des données économiques objectives. Ils constatent que l’indice subjectif est juste sous son sommet de 1983.

Les indices subjectifs sont habituellement plus positifs que les données objectives lorsque l’économie ne va pas bien, mais que les gens estiment qu’une reprise pointe à l’horizon. Or, les données subjectives sont plus présentement plus fortes que les données objectives alors même que l’économie se porte bien.

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Cet excès d’enthousiasme se transmet à Wall Street. L’estimation médiane des revenus de croissance du S&P 500 est 7,49 % plus haut que l’an dernier.

Le danger, c’est que la réalité n’est pas conforme à toutes ces prédictions. Depuis 2008, la capacité de ces sondages à prédire les mouvements de l’économie a été très modeste, alors qu’elle était forte entre 1974 et 1995. Ces données ne reflètent plus la réalité, mais continuent pourtant d’être utilisées de la même manière.

Présentement, seule l’économie américaine affiche un contexte favorable, rappellent les auteurs. Les autres marchés ont ralenti, comme le démontrent les données économiques, notamment le Citigroup Data Change Index.

Le marché n’est d’ailleurs pas dupe et les rendements sont stables ou à la baisse. Les investisseurs devraient-ils se méfier des boules de cristal qui voient un peu trop la vie en rose?

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