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Après les régimes municipaux et les régimes interentreprises, le gouvernement du Québec a déposé ce matin le projet de loi 57 qui propose de modifier les règles de financement des régimes complémentaires de retraite.

Le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Sam Hamad, a souligné l’importance d’assurer la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées (PD).

« Le contexte économique et démographique a beaucoup changé. Il faut donc considérer une actualisation de la loi afin de tenir compte des nouvelles réalités ainsi que pour respecter la capacité de payer des parties prenantes et leur volonté commune », a-t-il expliqué.

Le projet de loi 57 modifie la Loi sur les régimes complémentaires de retraite afin d’établir une nouvelle méthode de financement axée sur la capitalisation, et non sur l’approche de solvabilité, que le gouvernement qualifie de « coûteuse et imprévisible ». Cette modification éliminerait l’exigence de financer les déficits selon l’approche de solvabilité pour les régimes PD du secteur privé.

Les règles de financement s’appliqueraient, selon le projet de loi, tant au service futur qu’au service passé. La période d’amortissement des déficits de capitalisation passerait graduellement de 15 à 10 ans.

Fonds de stabilisation

Le projet de loi prévoit par ailleurs la constitution obligatoire d’une provision de stabilisation dont le niveau sera déterminé selon une grille prévue par règlement. La taille de ce fonds de stabilisation variera en fonction de la politique de placement du régime de retraite et sera constituée par des gains actuariels et des cotisations particulières d’exercice et d’équilibre.

De plus, l’utilisation des surplus serait formellement encadrée. Notons qu’aucune utilisation des surplus ne serait permise à moins que la provision de stabilisation soit de 5 % au-dessus du niveau de capitalisation visé et que le régime soit solvable à 105 %, tout en respectant les règles fiscales.

Le projet de loi requiert la préparation d’évaluations actuarielles aux trois ans. Toutefois, un avis annuel relatif à la situation financière du régime devra être fourni à la Régie des rentes du Québec, dont les responsabilités devraient être assumées par le nouvel organisme Retraite Québec, dans les quatre mois de la fin de tout exercice financier du régime et, si le degré de solvabilité est inférieur à 85 %, le régime devra faire l’objet d’une évaluation actuarielle.

Quelque 500 régimes de retraite, qui regroupent environ 815 000 participants, sont concernés par ce projet de loi. Le taux de solvabilité de ces régimes est passé de 92 % à 87 % en 12 mois, soit de 2013 à 2014.

Le Conseil du patronat du Québec (CPQ) a souligné que le projet de loi a été déposé avant la fin de la session parlementaire.

« La situation des régimes PD nécessite un nouveau cadre réglementaire avant la fin de l’année », affirme Yves-Thomas Dorval, président-directeur général du CPQ.

« Le fait que ce projet de loi soit déposé maintenant, laissera le temps aux différentes parties prenantes d’en faire l’analyse requise, d’en évaluer les impacts et de proposer les bonifications qui s’avèrent nécessaires. L’objectif ultime que nous devrions tous poursuivre ensemble est de rendre les RRPD plus attrayants pour les employeurs afin qu’ils puissent continuer de les offrir, le tout pour le bénéfice des travailleurs ».

Les syndicats satisfaits

La Confédération des syndicats nationaux (CSN) a accueilli favorablement le contenu du projet de loi 57 et a salué le consensus qui s’est dégagé grâce aux efforts du Comité consultatif du travail et de la main d’œuvre (CCTM) pour assurer la pérennité des régimes. « Depuis 2008, nous réclamons une telle réforme en profondeur sur le financement des régimes de retraite, a déclaré la vice-présidente de la CSN, Francine Lévesque. Nous ne pouvons qu’être satisfaits du dépôt de ce projet de loi. »

Les travaux du CCTM, qui est formé de représentants syndicaux, dont la CSN, et d’employeurs, ont notamment permis de dégager une nouvelle méthode d’évaluation actuarielle qui tend à trouver un juste équilibre entre la sécurité des prestations et la stabilité des cotisations, explique la CSN.

« Ce projet de loi est la preuve qu’il est possible de trouver des solutions à des problèmes très complexes en mettant en commun l’ensemble des expertises du monde du travail et non en imposant unilatéralement une vision et des solutions qui ne collent pas aux relations de travail, a poursuivi Francine Lévesque. Plus encore, cette loi a le mérite de ne pas remettre en question les droits acquis des travailleurs et favorise le maintien et la création de régimes à prestations déterminées dans le secteur. »

La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) salue également l’atteinte du consensus qui a mené à l’élaboration de ce projet de loi.

« Cela fait plus d’une dizaine d’années qu’on ne négocie plus de nouveau régime de retraite à prestations déterminées (PD) au Québec en raison des responsabilités financières trop lourdes pour les employeurs en cas de déficit de caisse, explique Serge Cadieux, secrétaire général de la FTQ. Or, tout le monde s’accorde pour dire que ce sont les meilleurs régimes de retraite pour assurer une sécurité financière minimale aux retraités. Il fallait donc trouver une solution équilibrée et c’est ce que nous avons aujourd’hui. »

Le projet de loi 57 peut être consulté à partir du site web de l’Assemblée nationale.

Que pensez-vous des modifications proposées? Assureront-elles la pérennité des régimes PD dans le secteur privé? Laissez vos commentaires ci-dessous ou envoyez-les-nous à simeon.goldstein@tc.tc