Une majorité des retraités vivant seuls n’auraient pas un revenu décent au Québec, selon un rapport de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS). L’organisme de réflexion de gauche recommande de mettre en place un nouveau régime collectif pour s’assurer que tous les employeurs cotisent à un régime de retraite.

Au Québec, près de 53 % des personnes retraitées âgées de plus de 65 ans et vivant seules n’ont pas un revenu décent, selon le rapport publié jeudi.

Pour arriver à cette conclusion, l’IRIS fait une différence entre deux concepts : la mesure du panier de consommation (MPC), qui représente les besoins essentiels comme la nourriture et le logement, et le revenu viable, qui ratisse plus large pour inclure « les dépenses nécessaires pour une vie digne, comprenant par exemple des vacances, des sorties culturelles et des économies pour répondre aux imprévus ».

Par exemple, le MPC pour un aîné vivant seul est de 21 000 $ par année. Le seuil de revenu viable varierait entre 25 000 $ et 35 000 $, selon le coût de la vie dans la région où il réside.

Au Québec, le système de retraite public permet à la très grande majorité des aînés de répondre à leurs besoins de base. Seulement 5,1 % des aînés vivent sous la MPC. La situation semble moins favorable lorsqu’on considère l’indicateur du revenu viable. « La pauvreté des aînés, elle est plus fréquente, mais elle est moins profonde que l’ensemble de la population », résume la chercheuse Eve-Lyne Couturier.

Le Régime de rentes du Québec (RRQ), la pension de la Sécurité de vieillesse (PSV) et le Supplément de revenu garanti (SRG) ne sont pas suffisants pour assurer un revenu de retraite décent, selon le rapport.

En 2023, l’employeur cotise au RRQ l’équivalent de 6,40 % du salaire de son employé pour les premiers 66 600 $ gagnés. À cette contribution peuvent s’ajouter des cotisations à un régime privé, mais trop de travailleurs n’ont pas accès à ce véhicule d’épargne, déplore l’IRIS. Seulement la moitié des travailleurs en auraient un.

L’organisme propose la création d’un régime général d’épargne-retraite (RGER) collectif. Il remplacerait le régime volontaire d’épargne-retraite (RVER) auquel l’employeur n’est pas obligé de cotiser.

L’employeur serait obligé de cotiser au RGER, s’il n’offre pas déjà un régime de retraite. Il s’agirait également d’un régime à prestation déterminée géré collectivement. Le rapport identifie la Caisse de dépôt et placement du Québec comme le gestionnaire d’actif le plus indiqué.

« On veut s’assurer qu’on vit dans une société où les entreprises font également leur part pour assurer un revenu décent pour les travailleurs et travailleuses », explique Mme Couturier.

L’IRIS préférerait la création du RGER à l’augmentation des cotisations des employeurs au RRQ, qui est déjà un régime à prestation déterminée géré par la Caisse. L’idée serait de ne pas pénaliser les entreprises qui offrent déjà un régime de retraite à leur employé. « Le problème, c’est tous les employeurs qui n’ont pas décidé d’en mettre en place (un régime de retraite). Ce sont eux que nous visons. »

La cotisation suggérée au RGER serait de 3 % pour l’employeur et de 3 % pour l’employé, ce qui permettrait de remplacer une tranche supplémentaire de 20 % du revenu une fois à la retraite, estime la chercheuse.

L’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR) réagit favorablement aux conclusions du rapport. « Les constats de l’IRIS sont clairs : le système de retraite actuel est inégalitaire, mais heureusement, des solutions sont envisageables », commente son responsable du comité Revenu et fiscalité.