Un regroupement d’organisations syndicales et communautaires mené par la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) presse le gouvernement fédéral de mettre sur pied un régime national, public et universel d’assurance médicaments au Canada.

Le regroupement met notamment en garde Ottawa « du puissant lobby qui s’organise pour freiner la mise en place d’un régime public et universel ». « Il n’y a qu’un régime entièrement public et universel qui serait bénéfique tant pour le gouvernement, les employeurs que pour les citoyennes et les citoyens. Il n’y a aucune raison de ne pas aller de l’avant », ont déclaré les porte-paroles.

Ils estiment que la coexistence de régimes d’assurance privés et public a entraîné une explosion des coûts et de profondes iniquités. Cette fragmentation de la couverture au pays limite le pouvoir de négociation auprès des compagnies pharmaceutiques. Les syndicats indiquent que la médiane des dépenses en médicaments par habitant est de 603 $ pour les pays de l’OCDE, comparativement à 1087 $ au Québec.

« Le même médicament peut coûter au Canada dix fois plus cher qu’en Nouvelle-Zélande. Les études démontrent que l’instauration d’un régime entièrement public et universel pourrait réduire le prix des médicaments de 20 à 40 %. Seulement au Québec, on parle d’économies de l’ordre de 1 à 3 milliards de dollars pour l’ensemble de la société », soutient Caroline Senneville, vice-présidente de la CSN.

Le régime public québécois, une « menace »

Les syndicats s’inquiètent que le gouvernement fédéral décide de reproduire le modèle hybride québécois à la grandeur du pays, car ce modèle contient de graves lacunes, jugent-ils.

« Au cours des dernières années, les primes d’assurance médicaments augmentent de 5 à 8 % par année. Résultat ? De plus en plus de syndicats prennent la décision de mettre un terme à leur régime d’assurance collective, seul moyen d’avoir accès au régime public d’assurance médicaments, perdant ainsi leur couverture d’assurance salaire, dentaire et d’autres bénéfices. En somme, le régime hybride québécois actuel menace plusieurs de nos protections sociales », affirme Luc Beauregard, secrétaire et trésorier de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).

D’autres organisations du regroupement déplorent les disparités entre les différents régimes. La Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles indique que 10 % des Québécois n’ont pas accès aux médicaments qui leur sont prescrits pour des raisons financières. Les personnes âgées, handicapées et souffrant de maladies chroniques seraient les plus touchées.

L’Union des consommateurs juge pour sa part que « le régime hybride québécois va complètement à l’encontre de la logique assurantielle », car les régimes privés couvrent les personnes en emploi, généralement en meilleure santé, alors que les personnes sans emploi ou retraités, qui consomment davantage de médicaments, sont couverts par le régime public.

« Des coûts supplémentaires incombent donc au gouvernement, alors que les compagnies d’assurance engrangent les profits », croit Élisabeth Gibeau, porte-parole de l’Union des consommateurs.

La FTQ a fait de la création d’un régime national d’assurance médicaments son cheval de bataille au cours de la dernière année. Lors d’un colloque organisé l’automne dernier, le syndicat a invité plusieurs experts qui se sont prononcés en faveur d’un tel régime, qualifiant au passage le régime hybride actuel d’inefficace et de de non fonctionnel.

Il y a quelques semaines, Reuters a appris que le gouvernement fédéral envisage d’adopter une approche plus ciblée que la création d’un régime national universel. Dans son prochain budget, Ottawa proposerait de couvrir une partie des médicaments d’ordonnance de façon à combler les écarts entre la couverture des régimes privés et publics.