Que l’on passe par les employeurs, les entreprises de services de paie ou un autre moyen, il faut que les travailleurs mis à pied à cause du coronavirus soient indemnisés et vite. C’est urgent, lance la FTQ.

« Les ajustements, on les fera après » , lance Daniel Boyer, président de la FTQ, qui représente plus de 600 000 travailleurs au Québec.

En entrevue à La Presse canadienne mercredi, le président de la plus grande centrale syndicale du Québec a indiqué qu’il existait plusieurs moyens pour parvenir à indemniser ces travailleurs.

La FTQ privilégie les services de paie qui font déjà des dépôts directs dans les comptes en banque des travailleurs, mais cela peut être de verser les prestations aux employeurs, qui les verseront à leur tour à leurs employés. Il suggère aussi de recourir aux informations contenues dans les déclarations d’impôt.

L’important, c’est de faire vite. Les délais sont trop longs. Les travailleurs mis à pied ne peuvent attendre.

La FTQ représente justement des fonctionnaires fédéraux au Québec, dont ceux de l’assurance-emploi, par le biais de l’Alliance de la fonction publique du Canada, un syndicat qui lui est affilié.

M. Boyer confirme que ses membres de l’AFPC lui disent qu’ils sont débordés par l’afflux de demandes de prestations.

« C’est quelque chose de spectaculaire qui se passe là. Le service d’assurance-emploi n’est pas adapté. Ils ne pourront pas traiter 1 000 000 ou 2 000 000 de demandes en 24 heures là! » , lance le président de la FTQ.

Il est donc urgent de trouver une façon d’aider ces travailleurs, insiste M. Boyer.

Les appels se multiplient

Devant l’afflux subit de demandes d’assurance-emploi tant des employeurs que des syndicats demandent au fédéral de verser l’argent aux entreprises, qui se chargeront ensuite de verser les prestations à leurs travailleurs mis à pied.

Le premier ministre canadien Justin Trudeau a plutôt laissé entendre que les chèques d’assurance-emploi arriveraient à compter du 6 avril, selon le premier ministre du Québec, François Legault.

Les plus récentes statistiques faisaient état d’un million de chômeurs au pays. Et c’était avant les dernières annonces de fermetures temporaires ordonnées lundi par le premier ministre François Legault.

En entrevue mardi, le directeur québécois d’Unifor, Renaud Gagné, a aussi demandé au premier ministre Legault de faire pression à cet effet sur le gouvernement fédéral pour que cette mesure d’urgence soit adoptée.

« Les employeurs sont au courant de qui est mis à pied. Ils connaissent la masse salariale. Nous, on dit: « que le fédéral fasse un chèque à l’entreprise et elle versera ensuite le montant aux employés » . Sinon, avec l’engorgement des lignes, ça peut prendre deux ou trois heures, puis des délais de six semaines » avant d’obtenir un chèque, justifie M. Gagné.

Les travailleurs mis à pied ne peuvent attendre plusieurs semaines avant de payer leur loyer, leur hypothèque, leurs mensualités de voiture, leur compte d’électricité, rappelle le dirigeant syndical.

La veille, c’était la Chambre de commerce du Montréal métropolitain qui se faisait la porte-parole d’employeurs pour solliciter semblable mesure.

« Nous demandons aux gouvernements d’adopter rapidement des mesures similaires à celles mises en place dans les États européens, qui permettent de verser des subventions salariales directement aux entreprises. Ces subventions atteignent de 80 à 95 % de la rémunération, selon les pays. Une telle approche offre aussi l’avantage de maintenir le lien d’emploi entre les travailleurs et leur employeur, ce qui élimine les traitements administratifs liés aux mises à pied et à l’inscription à l’assurance-emploi et, de façon très stratégique, facilitera la réintégration progressive des travailleurs lorsque la situation le permettra » , avait expliqué son président Michel Leblanc.

2000 $ par mois

« L’aide s’en vient » , a promis Justin Trudeau mercredi matin. Le premier ministre a annoncé que la « prestation canadienne d’urgence » distribuera 2000 $ par mois pendant quatre mois à tout Canadien qui en a besoin.

Pour avoir accès à cet argent, il faudra faire une demande à Ottawa, or, la fonction publique fédérale a déjà de la difficulté à gérer les centaines de milliers de demandes d’assurance-emploi qui lui sont acheminées.

Un portail en ligne sera mis en place d’ici le 6 avril. Les demandes qu’il faudra y remplir seront « très simplifiées », selon une source qui s’affaire à préparer cet outil.

« Les gens commenceront à recevoir de l’argent dans les 10 jours après avoir présenté leur demande » à l’aide de ce portail, a promis le premier ministre Trudeau.

« C’est énormément de gens qu’il faut aider dans un très court délai et on a besoin de développer des systèmes rapides mais fiables pour pouvoir le faire », a-t-il plaidé.

Cette nouvelle prestation canadienne d’urgence (PCU) est l’amalgame des allocations de soins d’urgence et de soutien d’urgence qui avaient été créés il y a quelques jours mais n’avaient pas encore pris forme.

La PCU vise, essentiellement, tous les Canadiens qui ne reçoivent plus de salaire. Ceux qui ont perdu leur emploi, qui tombent malades, qui sont mis en quarantaine, qui prennent soin d’une personne atteinte de la COVID-19, qui s’occupent de leurs enfants privés d’école et de garderie. Elle s’applique aussi aux travailleurs qui ne sont pas admissibles à l’assurance-emploi et à ceux qui ont toujours un emploi mais qui ne reçoivent plus de salaire à cause des interruptions de travail ordonnées par les autorités.

« C’est une subvention aux salaires livrée directement aux travailleurs » , a offert le ministre des Finances, Bill Morneau.

« Ce que ceci signifie pour les employeurs, c’est qu’ils n’auront pas à briser les liens d’emploi avec leurs employés. (…) Tout simplement, l’employé qui ne recevra plus de salaire aura accès à 2000 $ par mois pendant quatre mois (payés par Ottawa) » , a argué le ministre Morneau.

Il calcule ainsi que les mises à pied ne seront pas nécessaires.

Le plan d’aide fédéral adopté

Le plan économique d’urgence fédéral de plus de 100 G$ pour aider les citoyens et les entreprises du Canada affectés par l’éclosion de la COVID-19 est maintenant loi.

Le plan a reçu l’aval du Sénat mercredi matin et a reçu la sanction royale mercredi après-midi, comme prévu.

Le ministre des Finances, Bill Morneau, a indiqué au Sénat que les mesures d’urgence pour les travailleurs devraient être en place dès la semaine du 6 avril et l’élargissement de l’Allocation canadienne pour enfants et des crédits de TPS devraient être disponibles en mai.

Le plan d’urgence a été débattu à la Chambre des communes jusqu’aux petites heures du matin, après des négociations intenses avec les partis d’opposition toute la journée mardi au sujet des pouvoirs de taxation additionnels que les libéraux voulaient s’attribuer.

Les conservateurs ont vivement dénoncé mardi ce qu’ils estimaient être un « chèque en blanc » donné au gouvernement Trudeau pour dépenser, emprunter et imposer les Canadiens sans demander l’approbation du Parlement pour les 21 prochains mois.

Le gouvernement a finalement reculé sur ces mesures, ce qui a permis de dénouer l’impasse mercredi.

Le projet de loi permettra au gouvernement de dépenser finalement 107 G$ pour aider les Canadiens pendant la crise de la COVID-19.

Cette somme comprend notamment 52 G$ en aide pour les travailleurs, les étudiants qui doivent rembourser leurs prêts, en plus de fonds pour le système de santé, les sans-abri, les refuges pour femmes et les communautés autochtones.