Des documents récemment rendus publics montrent que les hauts responsables du gouvernement fédéral ne croient pas que l’intelligence artificielle et les robots menacent de grands segments de la main-d’œuvre canadienne.

Dans leurs travaux menés en 2019, les experts fédéraux ont estimé qu’un scénario « apocalyptique » dans lequel l’automatisation éliminerait la moitié des emplois au Canada était « exagéré ».

Mais ces responsables ont relevé des indicateurs de fragilité dans certains secteurs de l’économie dont le gouvernement devrait se soucier, comme la façon dont les services de diffusion en continu redéfinissent la production de la musique, de la télévision et du cinéma.

D’autres documents indiquent que le gouvernement a été informé avant l’été que 11 % des emplois au Canada pourraient être automatisés dans les 15 à 20 prochaines années, et que 29 % des emplois existants étaient « susceptibles de changer considérablement ».

La Presse canadienne a obtenu ces documents grâce à la Loi sur l’accès à l’information.

Le rapport devait servir de base pour conseiller le gouvernement qui serait élu en octobre quant à la façon d’aider les travailleurs au tournant d’une nouvelle décennie.

Ces travaux s’inscrivent dans une série d’exercices menés par les fonctionnaires fédéraux pour voir dans quelle mesure les programmes de sécurité sociale permettraient de répondre aux scénarios les plus pessimistes quant aux changements technologiques au sein de la main-d’œuvre.

On ne sait pas quelles ont été les conclusions de cet examen. Ces détails, comme beaucoup d’autres dans les documents, ont été caviardés ou n’ont pas été rendus publics.

Les fonctionnaires fédéraux ont déterminé où les impacts de l’automatisation se feraient probablement le plus sentir, comme dans les communautés rurales dépendantes de la fabrication, selon d’autres documents obtenus par La Presse canadienne en mars. Ces documents, mentionnés dans le rapport de juin, énuméraient également les villes les plus et les moins susceptibles de ressentir les impacts dans chaque province.

Sous-traitance à l’étranger

Mais les documents ne vont pas jusqu’à prédire exactement dans quels secteurs les effets se feront le plus sentir ni à quelle vitesse ils surviendront.

Par exemple, les experts prévoient que certaines tâches, telles que la relecture de textes et la saisie de données, pourraient être sous-traitées à l’étranger à des travailleurs à faible salaire par l’entremise des plateformes en ligne. L’impression en trois dimensions, en revanche, pourrait ramener des emplois manufacturiers.

Les responsables ont également écrit que d’autres tendances non évaluées dans le rapport façonneraient l’avenir du travail, comme la transition vers une économie à faibles émissions de carbone et l’augmentation du nombre de travailleurs issus des minorités sexuelles (LGBTQ2).

Certaines mesures adoptées pour faire face à la présence grandissante des technologies dans le monde du travail entrent en vigueur en 2020, notamment le lancement d’un crédit pour la formation de 250 $ par an et d’une nouvelle prestation d’assurance-emploi visant à soutenir les travailleurs qui suivent une formation.

Des experts qui conseillent le ministère fédéral de l’Emploi ont estimé que de nombreux adultes manquaient de « compétences numériques de base » et de « compétences complémentaires » pour réussir dans le monde du travail de l’avenir, selon un résumé d’une présentation faite en mai aux sous-ministres par un fonctionnaire de l’Organisation de coopération et de développement économiques.

Un rapport récent de l’Institut Brookfield est arrivé à une conclusion similaire et a recommandé aux gouvernements de créer « une grande variété de programmes accessibles conçus pour enseigner aux Canadiens des compétences numériques générales de la main-d’œuvre (…) ainsi que des compétences complémentaires générales ».