La Cour supérieure du Québec a donné raison aux syndicats sur la non-indexation des prestations des retraités dans les régimes du secteur municipal, mais s’est rangée du côté des Villes pour ce qui est du partage des déficits.

Fort attendu, le jugement portant sur la controversée loi 15 sur la restructuration des régimes de retraite du secteur municipal est tombé jeudi dernier. Majoritairement favorable aux Villes, il se range toutefois du côté des syndicats en ce qui concerne les articles touchant les retraités et prévoyant la non-indexation de leurs prestations, rapporte Le Journal de Québec.

Dans le jugement de 227 pages, le juge Benoît Moulin estime que les Villes ne pouvaient agir unilatéralement en suspendant cette indexation, car les retraités perdent ainsi un « droit acquis » sans avoir « voix au chapitre ». Le tribunal ajoute qu’il s’agit d’une « entrave substantielle » à la liberté d’association et de négociation.

Le juge Benoît Moulin demeure saisi du dossier pour statuer sur les demandes en réparation en faveur des retraités.

En revanche, le jugement donne raison à l’État québécois et aux Villes au sujet du partage 50-50 des déficits des régimes de retraite, imposée par la loi 15 en décembre 2014. Selon le tribunal, ce mécanisme de partage des coûts comporte plus d’avantages que d’inconvénients, et le législateur n’est pas allé trop loin dans l’atteinte de son objectif, c’est-à-dire la pérennité des régimes PD du secteur municipal.

Dans un communiqué, l’Union des municipalités du Québec s’est dite satisfaite du jugement, qui « confirme que le législateur était dans son droit d’adopter la loi 15 ». L’UMQ juge qu’il s’agit d’un outil législatif « nécessaire en raison du vieillissement démographique, de l’instabilité économique mondiale et de la croissance constante des dépenses des municipalités ».

Pour les syndicats, il s’agit toutefois d’une victoire en demi-teinte : ils souhaitent que l’ensemble de la loi 15 soit jugée inconstitutionnelle. Le directeur québécois du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), Marc Ranger, a indiqué que son organisation allait porter le jugement en appel. « C’est certain qu’on va en appel, même si on est contents d’avoir gagné cet élément-là [l’indexation] pour les retraités. On pense que la même logique devrait s’appliquer pour les participants actifs et on va continuer la bataille. »

Une autre centrale syndicale, la Fédération indépendante des syndicats autonomes (FISA), a cependant jugé prématurée l’annonce du SCFP de poursuivre la bataille en Cour d’appel. « On est très contents pour les retraités de la province. Je respecte beaucoup M. Ranger, mais je trouve que c’est prématuré, aujourd’hui, de dire qu’on s’en va en appel. On ne peut pas aller en appel juste parce qu’on n’est pas d’accord. Il faut aller en appel pour contester des points de droit et on va commencer par analyser le jugement », indique le président de la FISA, Réal Pleau.

Marc Ranger affirme de son côté avoir l’appui de plusieurs centrales syndicales pour poursuivre sa bataille devant les tribunaux, notamment la CSN, la Fédération des policiers des Montréal et l’Association des policiers municipaux.