Une centaine de dirigeants d’entreprise se sont réunis à Montréal pour échanger sur la santé mentale en milieu de travail et les mesures pouvant être prises à ce sujet. Morneau Shepell, de concert avec l’initiative en santé mentale Bell Cause pour la cause, était l’hôte de Réseau Employeur, une conférence sur la santé mentale au travail qui s’est déroulée à Montréal.

L’expérience de Bell
Lucie Dutil, vice-présidente, Ressources humaines à Bell, a raconté l’expérience de son employeur ayant décidé d’investir massivement dans la promotion et le soutien de la santé mentale à l’échelle du Canada. Comptant plus de 60 000 membres au sein de son équipe, Bell a pris l’initiative d’aborder la maladie mentale et d’essayer de faire de nos communautés – que ce soit au bureau ou à la maison – des lieux plus sains et plus productifs.

La société de télécommunication a d’abord interrogé 150 employés (gestionnaires et employés syndiqués provenant d’unités d’affaires variées) afin de connaître les enjeux ainsi que leurs craintes et perceptions face à la santé mentale dans leur milieu de travail. À la suite de ces discussions, Bell a implanté un programme comprenant cinq points principaux :

  1. Offrir un meilleur accès à l’information afin de briser le silence et de réduire la stigmatisation (site Web dédié, plusieurs conférences avec des experts dans le domaine de la santé mentale, ateliers, matinées cinématographiques, promotion du PAEF, etc.)
  2. Offrir une formation appropriée aux employés (Tous ont accès à un cours en ligne et plus de 3 000 gestionnaires ont reçu une formation face à face obligatoire)
  3. Revoir son modèle de gestion d’absence et planification de retour au travail pour les cas spécifiquement reliés à la santé mentale
  4. Mettre en place des pratiques de gestion exemplaires
  5. Changer graduellement la culture d’entreprise

« Il fallait démystifier la santé mentale pour nos gestionnaires en leur fournissant les outils nécessaires pour reconnaître certains signes avant-coureurs. En résumé, il fallait équiper nos gestionnaires à faire face à la situation », a résumé Mme Dutil.

La santé mentale en statistiques

  • 1 personne sur 5 souffrira d’un problème de santé mentale au cours de sa vie
  • 1 personne sur 5 sera confrontée à une période d’invalidité au cours de sa carrière
  • Seulement 6 % des personnes demandent ou obtiennent un traitement
  • 24 $ à 40 $ par année pour des adresses de courriel personnalisées (@votredomaine.ca).
  • 62 % des personnes en détresse ne savent pas comment réagir
  • 78 % des personnes ont peur d’être jugées ou de perdre leur emploi en révélant leur souffrance
  • 75 % des cas sont reliés au stress

La compagnie a revu son modèle de gestion des cas d’employés souffrant de maladies mentales en améliorant la prévention et en offrant un meilleur soutien non seulement lors de la période d’invalidité mais également lors du retour au travail. « Le soutien offert à la personne en invalidité ainsi que l’équipe l’entourant est primordial. Pour ce faire, nous avons modifié nos politiques pour assurer un suivi régulier via une communication constante. » Des efforts sont faits afin d’évaluer les progrès tout en reconnaissant que d’autres stratégies seront nécessaires pour continuer à faire une différence dans un domaine où les meilleures pratiques sont en constante évolution.

La science de la résilience
le Dr Georges Sabongui, un ancien psychologue militaire a réalisé une étude sur le stress dans les Forces armées canadiennes. Le Dr Amir Georges Sabongui a débuté son allocution en demandant pourquoi certaines personnes brillent sous pression alors que d’autres s’effondrent.

Selon lui, la réponse réside dans la résilience de chacun, qui est déterminée selon son support social, son support organisationnel et ses ressources individuelles. « Le milieu de travail peut être le centre de risque ou de résilience pour les employés. »

Entre 1990 et 2010, le taux d’accidents de travail a chuté de 50 %, ce qui est une excellente nouvelle. Par contre, durant ce même laps de temps, le taux d’invalidité relié aux problèmes de santé mentale a augmenté de 500 %, ce qui est pour le moins inquiétant.

Et d’après le Dr Sabongui, ce n’est que la pointe de l’iceberg puisque bien des cas ne sont pas diagnostiqués ou traités, ce qui entraîne des dommages collatéraux pour les autres employés côtoyant l’individu en détresse. Environ 80 % des problèmes de santé mentale sont des troubles de l’humeur, alors que le reste constitue des troubles sévères et persistants (ex. bipolarité (ou troubles bipolaires)). De plus, dans certains cas, cela peut mener à des cas de suicide. La clé est de trouver un certain équilibre entre les demandes que l’on reçoit et les ressources que chaque individu possède intérieurement. Quand la surcharge de travail ou d’événements dépasse sa capacité d’en prendre, les problèmes arrivent et s’accentuent rapidement.

«Il faut être aux aguets et surveiller les changements subis de comportement chez les individus. Si les habitudes ou les humeurs d’une personne changent de façon radicale et que cet état semble persister, il faut se poser des questions. De plus, si le rendement ou la productivité d’un individu baisse significativement, il s’agit possiblement de signes avant-coureurs. Et personne n’est à l’abri », a terminé le Dr Sabongui.