Le gouvernement fédéral se demande si la réforme annoncée du Code canadien du travail pourrait inclure le droit d’un employé d’ignorer ses courriels professionnels lorsqu’il a quitté le bureau.

Certains soutiennent que les employés font ainsi des heures supplémentaires sans être payés, et que cette pratique accentue les risques d’épuisement professionnel.

Le droit à la déconnexion fait partie des nombreux enjeux identifiés par le gouvernement libéral dans un rapport, rendu public jeudi, sur les consultations menées autour de la réforme des normes du travail pour les employés des secteurs sous réglementation fédérale, les transports, les institutions financières et les télécommunications, notamment.

Tout changement de ce code canadien pourrait toutefois influencer éventuellement les lois provinciales du travail.

Comme d’autres gouvernements ailleurs dans le monde, Ottawa se penche sur ce concept de droit à la déconnexion, depuis que la France a adopté une loi, en 2016, accordant aux travailleurs le droit de désactiver leurs appareils électroniques en dehors des heures de travail.

Les résultats d’un an de consultations sur la prochaine réforme du Code canadien du travail révèlent toutefois une fracture entre les employeurs et les syndicats à ce chapitre.

« Bien que de nombreuses préoccupations aient été soulevées lors de nos consultations, un message était clair : les Canadiens veulent plus d’équilibre entre leurs responsabilités professionnelles et personnelles », a quand même retenu la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et du Travail, Patty Hajdu. « Les normes qui tiennent compte des réalités actuelles des milieux de travail aideront les employeurs à recruter et à maintenir en poste des employés, tout en améliorant leur bien-être. Tout le monde y gagne. »

Assurer le repos des employés

Les syndicats ont fait valoir qu’un droit juridique de désactiver les appareils électroniques lorsque l’employé n’est pas au travail, ou des politiques en milieu de travail visant à limiter l’utilisation de ces appareils, assureraient plus de repos aux employés et ne grugeraient plus leurs heures personnelles.

Les employeurs se montraient plus prudents, en plaidant que certaines entreprises avaient besoin d’employés disponibles après les heures normales de travail. D’autant plus que certains employés choisissent de rester connectés parce qu’ils ne travaillent pas une journée traditionnelle de 9 à 5. Selon le rapport, au moins une organisation d’employeurs a estimé que le gouvernement outrepasserait ses pouvoirs s’il décidait de légiférer en ce sens.

Le rapport publié jeudi résume les consultations fédérales sur d’éventuelles mises à jour du Code canadien du travail, qui date de plusieurs décennies. Les consultations ont aussi porté sur l’opportunité de fixer un salaire minimum fédéral et d’établir des règles plus strictes concernant les travailleurs contractuels.

Les normes contenues dans l’actuel Code canadien du travail ont été rédigées dans les années 1960, à une époque où le travailleur moyen occupait un emploi à temps plein et permanent, assorti d’avantages et de protections garanties par la loi. Ce Code n’a pas beaucoup changé depuis, mais les temps, eux, ont bien changé : depuis les années 1970, la main-d’œuvre, davantage mobile, est de plus en plus marquée par ce que l’on appelle le « travail atypique », généralement à temps partiel, temporaire ou contractuel.

Les résultats des consultations alimenteront les travaux du gouvernement fédéral visant à moderniser les normes du travail qui touchent plus de 900 000 travailleurs au Canada, ce qui représente environ 6 % de la main-d’œuvre du pays.