Environ deux Québécois sur trois disent avoir du mal à épargner pour la retraite tandis qu’un tiers de la population de la province n’aurait pas assez d’argent pour subvenir à ses besoins, selon un sondage publié mercredi par BDO Canada.

Réalisée pour le compte de l’organisation, qui regroupe 62 syndics autorisés en insolvabilité au pays pour aider les consommateurs à régler leurs dettes, celui-ci révèle que 64 % des personnes interrogées éprouvent de la difficulté à mettre de l’argent de côté en vue de leurs vieux jours, tandis que près d’un sondé sur trois (29 %) ne dispose d’aucune épargne-retraite.

Il montre également qu’environ un tiers des Québécois (31 %) n’ont pas assez de fonds pour vivre au quotidien et que la majorité d’entre eux (71 %) ploient sous le fardeau des dettes. Pire, 18 % des répondants affirment avoir une dette personnelle tellement élevée qu’ils ignorent comment ils pourront s’en sortir.

Une dette non hypothécaire de 20 000 $

L’enquête d’opinion constate en outre que 18 % des sondés du Québec ont un enfant de plus de 18 ans encore à la maison, une situation que 65 % des parents justifient par le fait qu’il est trop dispendieux pour un jeune adulte de s’installer en appartement. De même, 48 % des répondants québécois déclarent être « mal » ou « très mal » préparés pour l’achat d’une maison.

« Notre tout premier indice d’accessibilité financière démontre que plusieurs Canadiens, incluant les Québécois, n’ont pas assez d’argent pour acheter ce dont ils ont besoin sont, et par là nous parlons de choses importantes telles que se nourrir et nourrir sa famille, ce qui est très inquiétant. Il démontre aussi que plus de la moitié des répondants (54 %) admettent que leur revenu ne leur permet pas de vivre sans faire dettes, ce qui fait que près du trois quarts des consommateurs au pays vivent sous le fardeau de la dette. Et parmi ceux-ci, un quart admet que leurs dettes sont tellement accablantes qu’ils ne savent plus quoi faire », résume pour Conseiller Ron Gagnon, vice-président principal chez BDO.

« Les femmes figurent parmi les personnes qui ont le plus de mal à joindre les deux bouts », ajoute-t-il. En effet, non seulement elles sont en moyenne davantage endettées que les hommes (52 % comparativement à 45 %), mais elles ont aussi plus de difficultés à épargner pour leur retraite (73 % contre 65 %) ou pour faire un achat important (74 %, par rapport à 64 %). Par ailleurs, les dettes plus lourdes sont plus répandues chez les membres de la génération Y (52 %) et les membres de la génération X, soit les 35-54 ans (57 %), que parmi les autres tranches d’âge.

La classe moyenne en mauvaise posture

« On peut penser que les gens qui ont le plus de difficultés sont les familles les plus modestes, c’est-à-dire celles dont le revenu est inférieur à 40 000 dollars par an. Cependant, notre indice d’accessibilité financière montre que, même si ce sont elles qui ont le plus de misère en matière de dettes, la classe moyenne, soit les ménages qui gagnent entre 60 000 et 100 000 dollars par an, a elle aussi du mal à gérer ses dettes », détaille Ron Gagnon.

Soulignant que, à l’instar des autres Canadiens, les Québécois « vivent depuis de nombreuses années dans un environnement où les taux d’intérêt étaient faibles », l’expert en gestion des dettes juge que « beaucoup ont eu ce faux sentiment de pouvoir gérer leur dette ». Toutefois, poursuit-il, les taux d’intérêt continuent d’augmenter depuis juillet 2017 et, à mesure qu’ils grimpent, la gestion devient plus délicate.

« Si vous vivez déjà d’une paie à l’autre, il peut être très difficile de s’ajuster à ces augmentations qui affectent vos dettes. Comme notre indice d’accessibilité financière le montre, plusieurs ont de la misère à subvenir à leurs besoins de base, sans parler de devoir rembourser leur dette ou investir dans leur épargne-retraite. Beaucoup ont également du mal à faire face à une situation d’urgence ou à un événement important de la vie. Et en l’absence d’un fond d’urgence, plusieurs n’ont d’autre choix que de dépendre de leurs cartes de crédit et de s’endetter encore davantage. »

À propos des retraites, Ron Gagnon ne se montre guère optimiste, notant que l’indice d’accessibilité financière de BDO Canada indique que « plusieurs Québécois ont du mal à joindre les deux bouts, et même à se payer les choses de base ». « Le résultat, insiste-t-il, c’est qu’il est encore plus difficile de rembourser des dettes ou d’investir dans une épargne-retraite lorsque vous avez des difficultés à vous procurer l’essentiel. Or, notre sondage révèle que 82 % des personnes aux prises avec des dettes ont du mal à investir dans leur retraite, ce qui n’est pas bon signe. »

Un constat très sombre

Sur le plan national, le sondage relève que trois Canadiens sur 10 n’ont pas assez d’argent pour acheter ce dont ils ont besoin au jour le jour, « ce qui peut entraîner une dépendance accrue aux dépenses », souligne BDO. Autre constat alarmant, le niveau d’endettement non hypothécaire moyen des consommateurs d’un océan à l’autre est de 19 977 dollars, alors que les trois quarts d’entre eux (74 %) ont des dettes et qu’un sur quatre a du mal à faire face à ses engagements financiers. La génération X et les familles en arrachent également. Un tiers (33 %) des 35-54 ans d’un océan à l’autre déclarent ainsi n’avoir aucune épargne-retraite, tandis qu’une proportion encore plus élevée (37 %) affirme en avoir « très peu ».

« Ce constat est très sombre, car il semble que la majorité de ceux qui sont dans leur meilleure période pour accumuler une bonne épargne-retraite n’y sont pas préparés. Cela peut entraîner une augmentation du nombre de personnes âgées incapables de financer leurs dernières années et qui doivent compter sur les cartes de crédit et d’autres formes de dette pour couvrir leurs frais de subsistance », conclut dans un communiqué le président de BDO Canada, Doug Jones.