Jean-Daniel Côté, vice-président, retraite à BFL CANADA services conseils. Photo : James Wagner

Les rentes ne jouissent pas d’une très grande popularité auprès des épargnants. Pourtant, une utilisation judicieuse de ces produits financiers, jumelée à un report des prestations publiques, pourrait résoudre bien des problèmes liés à la planification de la retraite.

« Les rentes viagères différées à un âge avancé, c’est vraiment la clé, assure Jean-Daniel Côté, vice-président, retraite à BFL CANADA services conseils. Elles répondent à un besoin criant de la population. Ces rentes permettent aux retraités de se prémunir contre les risques d’inflation et de longévité. Il s’agit d’un développement réglementaire important qui doit se concrétiser. »

Dans son dernier budget, Ottawa a en effet annoncé que les Canadiens pourront consacrer une partie de leur épargne-retraite accumulée dans un compte enregistré pour souscrire une rente différée dont les premiers versements pourront être reportés jusqu’à l’âge de 85 ans. Selon les règles fiscales actuelles, une telle rente ne peut être différée au-delà de l’année pendant laquelle le rentier atteint l’âge de 71 ans.

Selon Jean-Daniel Côté, les rentes différées jusqu’à 85 ans ouvriront la porte à des stratégies de planification plus flexibles et personnalisées.

Les épargnants sont souvent réfractaires à l’idée d’acheter des rentes viagères en raison de leur coût élevé et l’impression de se départir d’une partie importante de ses épargnes trop tôt. Or, les rentes différées sont bien plus économiques que les rentes immédiates.

« Quand on regarde le coût relatif d’une rente différée par rapport à ce que le participant va obtenir en retour, ce n’est vraiment pas grand-chose, explique M. Côté. Par exemple, de nos jours et à l’âge de 60 ans, une rente différée à 85 ans de 3 000 $ par année (indexée à l’inflation avant et après le début des versements) ne coûte que 16 500 $. Quand on a un pécule de 200 000 ou 300 000 $ au moment de prendre sa retraite, il s’agit d’un montant plutôt minime. »

Pour se protéger contre le risque de longévité à bas coût, les épargnants auraient tout intérêt à retarder le versement des prestations de la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV) et du Régime de rentes du Québec (RRQ). Mais ce n’est pas gagné.

« Clairement, les gens n’ont pas compris la protection que procurent ces régimes avec leurs rentes indexées garanties à vie. En effet, pas moins de 83 % des nouveaux retraités prennent leur rente du RRQ avant 65 ans, et seulement 1 % attendent à 70 ans, indique-t-il. Selon mes observations, l’optimisme des gens concernant la planification de la retraite vient du fait qu’ils pensent mourir jeune, peu croyant dépasser l’espérance de vie d’un retraité! Il y a encore beaucoup de travail d’éducation à faire auprès de nos participants. »

Une stratégie qui combine une rente différée à 85 ans et le report des prestations des régimes publics à 70 ans peut se révéler très efficace. Un individu dont le revenu équivaut au maximum des gains admissibles (58 700 $ en 2020) touchera un revenu annuel de près de 30 000 $ provenant de la PSV et du RRQ s’il attend l’âge de 70 ans (comparativement à seulement 21 000 $ à 65 ans). Si on ajoute à cela une rente différée de 3 000 $ à 85 ans, qui ne coûte que 16 500 $ à l’achat, cet individu bénéficiera de prestations garanties indexées d’environ 33 000 $, ce qui lui permet d’atteindre un taux de remplacement du revenu de 60 %.

« Si on n’achète pas de rente, on doit s’assurer d’avoir des épargnes qui vont durer jusqu’à 95 ans, mentionne Jean-Daniel Côté. On se trouve alors à planifier pour le pire. Au final, le capital de retraite nécessaire est plus faible lorsque l’on achète une rente. C’est pourquoi il est crucial que le gouvernement fédéral permette les rentes viagères différées, qui offriraient un meilleur niveau de revenu et meilleure sécurité aux canadiens retraités dans le décaissement de leurs régimes d’accumulation de capital, tant collectifs qu’individuels. »